Algérie

Cinéma et cinquantenaire de l’indépendance de l’Algérie



Cinéma et cinquantenaire de l’indépendance de l’Algérie
Au mois de juin 2011, le ministère de la Culture a lancé un appel à projets dont voici le texte : A l’ occasion de la célébration du cinquantenaire du recouvrement de l’indépendance (1962-2012), le ministère de la Culture lance un appel à projets cinématographiques et audiovisuels, destiné aux entreprises de production détentrices d’un agrément dans la filière de production cinématographique.


Plus loin : Les porteurs de projets intéressés sont invités à déposer leur dossier de participation au Centre national de la cinématographie et de l’audiovisuel (CNCA), sis 03, Bd Franz Fanon, Alger, avant le 31 octobre 2011, date limite de réception des projets.Quelque temps après, la date limite a été prorogée d’un mois et l’on ne l’a su que de bouche à oreille. La commémoration de cet important événement le 5 juillet 2012 a été pourtant annoncée depuis plus d’une année par le président Bouteflika ; pourquoi alors avoir attendu aussi longtemps pour lancer cet appel ? Mystère!

Faut-il comprendre par là que la production des films historiques touchant la période coloniale dans notre pays est identique à celles des productions «Chorba» qui précèdent les mois de Ramadhan ?
Ou bien faut-il comprendre, peut-être, qu’on l’ignore que l’Algérie s’est dotée de tous les moyens nécessaires pour réaliser en un temps record tous les projets retenus ? Franchement, cela nous dépasse, tout se déroule en catimini.

Les services concernés du ministère sont pourtant bien placés pour savoir que la production d’une œuvre cinématographique et à plus forte raison historique, en dehors de l’écriture du scénario, nécessite un minimum 6 mois de préparation et 8 mois de tournage, de montage, de post-production et de kinescopage à l’étranger (Laboratoire pour le transfert du Film en 35 mm).
Nous n’avons rien créé, ce sont-là des normes internationales minimales. Ajouté à cela, pourquoi exiger dans le dossier un plan de travail alors que ce dernier ne vient qu’en seconde étape, c’est-à-dire une fois que le scénario est avalisé par la commission de validation et après avoir reçu le OK du ministère pour le produire ? Un plan de travail, cela ne s’improvise pas, il fait partie de la phase de préparation de tournage.

Quel est, aujourd’hui, le producteur qui va prendre le risque d’investir par ses propres frais dans le travail de préparation : repérage des lieux de tournage et préparation des décors, casting, élaboration du plan de travail et dépouillement, découpage technique... sans avoir reçu au préalable la garantie de tourner ? Sans rentrer dans les détails de l’appel à projets du ministère de tutelle qui s’apparente beaucoup plus à du «formalisme bureaucratique», j’estime cependant qu’il y a eu négligence et faute sur toute la ligne jusqu’à dénuer l’originalité de l’événement lui-même.

Entreprendre des productions historiques à quelques mois à peine du cinquantenaire est une véritable gageure, à moins de bâcler et de se contenter des navets pour marquer le rendez-vous, juste pour le décor et les parades de circonstance, comme il est devenu de coutume chez nous à chaque événement. Non seulement le ministère n’a pas pris la décision à temps, mais en plus il semble ignorer que notre cinéma est encore au stade rudimentaire et ne peut pas faire face à plusieurs productions à la fois. Toutes proportions gardées en additionnant tous les moyens de production du secteur d’Etat et celui du privé, on peut à peine produire 5 films longs métrages avec des équipes de tournage professionnelles (je précise bien, professionnelles) plus ou moins complètes et encore faut-il s’entendre entre producteurs pour le partage de certains moyens techniques et plus particulièrement celui de la distribution (comédiens et comédiennes) et des techniciens des effets spéciaux (artificiers...).
Il faut souligner que ceci n’est valable que pour les productions de films ordinaires, quant aux films d’époque (historiques), c’est plus compliqué encore, les besoins sont multipliés par deux et les délais de préparation et de tournage sont beaucoup plus longs.

Pour un événement aussi important que le cinquantenaire, le ministère n’aurait pas dû faire cavalier seul pour une meilleure efficacité et pour une approche beaucoup plus appropriée des voies et moyens à mettre en œuvre, il aurait dû (le ministère), au préalable, provoquer au moins des rencontres consultatives avec les premiers concernés (cinéastes et producteurs). Parce qu’avant tout, c’est un travail de concertation entre l’administration et les professionnels.

D’une manière ou d’une autre, il ne nous reste que quelques mois devant nous et cela tient de l’impossible pour que toutes les productions soient fin prêtes à la date prévue, sauf si l’on considère la date du 5 juillet 2012 comme le début du coup d’envoi symbolique des projections de films qui se prolongeront jusqu’à la fin de l’année 2012 par un cycle de projections à travers toutes les wilayas du pays, au fur et à mesure que les productions en cours boucleront leurs films.
Un programme et un calendrier dûment établis entre les deux parties (ministère et producteurs) sont plus que nécessaires. Et c’est peut-être là un des meilleurs moyens de sauver la situation pour «célébrer cinématographiquement» en quantité et en qualité cette date historique hautement symbolique.

Souhaitons seulement que les pratiques d’influence, de privilège, de préjugé et de parti pris ne l’emportent pas sur les travaux de la commission de lecture et de validation. Autre chose, c’est aussi important que les producteurs (pas tous heureusement) ne trouvent pas là, comme dans le passé, l’occasion d’enrichissement aux dépens de la production, de l’équipe de tournage et de distribution.

Qu’ils soient à la hauteur de l’événement et fassent preuve de probité et de professionnalisme.
Mais avant toute chose, il appartient au ministère de revoir sa copie à la lumière des réalités de notre cinéma, en commençant d’ores et déjà à prendre attache avec les principaux concernés (tous les cinéastes et producteurs sans discrimination aucune) qu’il doit considérer comme des partenaires et non de simples figurants à faire prévaloir des décisions et des choix unilatéraux. Ce cinquantenaire ne doit pas, entre autres, nous faire oublier que notre cinéma est encore à l’état de convalescence suite aux multiples opérations de démantèlement qu’il a subies depuis 1986 et qu’à ce jour il ne s’est toujours pas relevé.


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