Algérie

CINÉMA



Terre promise d?Amos Gitaï La traite des femmes en Israël Plus fort qu?un événement politique, c?est une onde de choc que soulève le cinéaste israélien Amos Gitaï avec son dernier film Terre promise. Le titre d?évocation biblique, interprété comme une provocation en Israël, est à la mesure du désenchantement de ces jeunes filles d?Europe de l?Est, attirées par le rêve de « faire mannequins dans les pays riches ». Amos Gitaï, qui est à son 36e film, se penche cette fois sur le sort des Estoniennes réduites à l?état d?esclavage et vendues à la criée dans des marchés très spéciaux en Israël. Perplexes, les cinéphiles n?en reviennent pas de leur stupeur face à ce bouleversant témoignage sur les faits accablants qui se passent en Israël. Le film met en scène des jeunes femmes vendues sur le modèle du marché à bestiaux. La femme maquerelle, commissaire-priseur présente les jeunes filles aux acheteurs sous l?éclairage des phares des voitures tout-terrain, en rase campagne. Ils renchérissent jusqu?à la vente. Les vierges valent plus cher. « Admirez celle-ci, six mille, sept mille, qui dit mieux ? Et celle-la, une rouquine, elle est grande, les cheveux longs, elle a de belles cuisses, regardez les seins, j?en demande sept mille... » « On commence par 4000. Tu dis combien toi ? 5000, qui dit mieux... » Après ce premier choc d?humiliation, les victimes qui traversent le désert du Sinaï à dos de chameaux via le Caire passeront sous une douche à l?eau froide, nues, se collant les unes aux autres pour échapper à la violence du jet d?eau glacé au tuyau et sous la surveillance de vigiles musclés. Cette scène aurait, semble-t-il, choqué particulièrement les critiques et le public israéliens vu qu?elle rappelle des images d?un temps ancien sous le régime nazi dans des camps de concentration. Accueilli par la presse israélienne en termes amers, Amos Gitaï est traité « d?anti-israélien » à défaut d?« antisémite » puisqu?il est juif et israélien à la fois. Pour l?auteur, ce film se veut comme l?autopsie d?une société boulimique « qui avale les femmes » en tant qu?objet de plaisirs pervers « comme on avale des territoires ». Aussi, Terre promise se veut comme une ?uvre à caractère politique. Elle révèle la nature d?une société survalorisée au point que le pouvoir « s?exerce par l?humiliation d?autrui ». Quand le cinéaste interpelle l?opinion israélienne sur ce registre de puissance, il fait naturellement allusion à la tragédie du peuple palestinien en proie à une brutalité érigée en système. Les jeunes Estoniennes sont transportées par camions bâchés d?une ville à une autre, pour les lupanars dans des conditions qui rappellent les wagons plombés de l?époque nazie. La libération inattendue fait suite à un attentat à la voiture piégée dans un amoncellement de feu et de sang et de rugissements de sirènes. Filmé avec une simple caméra d?épaule qui donne parfois le mal de tête, Terre promise se traduit comme un reportage, où le souci de coller à la réalité donne l?impression d?images prises sur le vif. Amos Gitaï, connu pour ses prises de position contre l?exploitation des femmes en est à son 36e film, et le troisième qu?il consacre au même thème. En 1984, il a réalisé Bangkok Bahreïn, un documentaire sur le marché de la prostitution en Thaïlande, et en 1999, il a osé dénoncer dans Kadosh, des pratiques d?extrémistes juifs à l?encontre de celles qui refusent le mariage forcé.


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