«Les grandes âmes sont capables de grandes vertus.» (René Descartes) Hadj Smaïl Nezzar s'est éteint à Batna, sa ville natale, un certain vendredi 13 janvier 2012 à l'âge de 75 ans. Ce personnage charismatique a laissé un vide incommensurable parmi ses anciens compagnons, ses anciens collègues, les gens qu'il avait formés et ses proches.
Issu d'une famille nationaliste et homme de conviction, il s'engagea très tôt dans la lutte de libération nationale. Connu comme un loup blanc, il débuta comme agent de liaison auprès de la population locale pour sensibiliser les citoyens et les inciter à intensifier les actions de lutte car, disait-il autour de lui, la colonisation est par essence un acte criminel contre l'humanité. Mais un beau jour, il fut démasqué suite probablement à une délation et recherché activement par les autorités coloniales... Pour se soustraire à ses ennemis, la seule alternative était de quitter la région sous peine de subir un châtiment exemplaire infligé aux mutins. Sa fuite vers les montagnes demeure jusqu'à ce jour une légende et fait partie des anecdotes inédites. En effet, ses proches l'aidèrent à se déguiser en jeune mariée installée confortablement dans une voiture soigneusement décorée en tête d'une procession de véhicules et dans une ambiance festive soutenue par des youyous stridents. Les militaires et les policiers en faction ne s'étaient pas aperçus de la supercherie. A l'époque, il fallait ruser pour tromper l'ennemi. Au maquis, il fit la connaissance du docteur Othmani et devint son assistant. Il apprit grâce à lui et en un laps de temps très court les rudiments du métier. Au lendemain de l'indépendance, il se retrouva comme garde du corps du colonel Tahar Zbiri à la villa Jolie où l'organigramme de la jeune République algérienne fut établi. Juste après, des propositions lui avaient été faites par sa hiérarchie pour embrasser la carrière dans la santé militaire ou la police mais il refusa poliment et décida de se retirer et retourna au bercail pour servir sa région. Contrairement à certains qui couraient derrière les privilèges, il se contenta de vivre avec son salaire et ne demanda absolument rien car il estimait que sa contribution à la libération du pays n'était qu'un devoir. Il ne laisse d'ailleurs ni fortune ni biens à l'exception toutefois d'une modeste maison qu'il avait construite grâce aux sacrifices consenties. Il fut parmi les rares moudjahidine à inaugurer le premier commissariat de police de l'Algérie indépendante à Batna. Il fonda un foyer selon les traditions du milieu et prodigua amour et affection à sa progéniture et leur inculqua une éducation exemplaire basée sur le respect et l'entraide. Il intégra l'hôpital de Batna où il connut une ascension rapide grâce à son intelligence et son sérieux pour devenir surveillant médical de toute la structure sanitaire de la ville. Organisé, méthodique et endurant à l'ouvrage, il s'attelait à plusieurs activités à la fois pour être utile à toute la société. Il s'occupa entre autres de la prévention pour prémunir les habitants des maladies graves et fut à l'origine de la création de l'école des sourds-muets et travailla un certain temps à la direction de la maternité. Au milieu des années 80, à cause de la grave pénurie du sang qui touchait toute la wilaya, il fonda et devint le président de la banque de sang de Batna. Il travailla aussi d'arrache-pied pour mettre en place une organisation viable en faisant une campagne de sensibilisation tous azimuts pour attirer beaucoup de donneurs de sang, collecter l'argent nécessaire, trouver des bénévoles et acquérir des locaux. Cette institution demeure à ce jour liée à son fondateur. Son nom restera désormais mémorable. En parallèle, il entraîna les jeunes au sein de l'équipe du CAB et passait tout son temps à la recherche de jeunes talents pour promouvoir une équipe solide et capable d'accéder à un rang supérieur. Un exemple important mérite d'être cité. Il réussira à convaincre M. Sassi Haousmani qui activait dans l'équipe de la 5e Région militaire à signer avec le CAB et le payait de ses propres moyens. Surnommé Herrera par ses amateurs au nom du célèbre entraîneur de l'Inter de Milan qui porta cette équipe sur les plus hauts podiums mondiaux entre 1960 et 1968. En bref, Hadj Smaïl était non seulement l'entraîneur, mais aussi l'éducateur, le père et le guide. C'était une icône. C'était un humaniste dont la mission est d'aider sans cesse les autres. C'est aussi un être social totalement impliqué, observateur attentif de la moindre pulsion de la vie des humbles, des petites gens, des anonymes qu'il aidait. Soucieux du bonheur de ses compatriotes, il ne connaissait ni haine ni vengeance. Il était d'une bienveillance et d'une générosité extrêmes, aimait la vérité et la bonté. Il y a d'ailleurs un hadith du prophète Mohammed que le salut soit sur lui qui disait : «Quiconque apporte aide et assistance à ses semblables et contribue d'une manière ou d'une autre à l'amélioration de leurs conditions de vie sera béni par Dieu». Qu'Allah le Tout-Puissant lui accorde Sa Miséricorde et l'accueille dans Son Vaste Paradis !
Posté Le : 21/03/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Le Soir d'Algérie
Source : www.lesoirdalgerie.com