Algérie

Chronique d'une gabegie à 130 millions de dinars



Lancés au début de l'année 2009 par l'ancien exécutif communal, les travaux de réalisation de cette importante structure commerciale n'en finissent pas d'alterner entre retards et arrêts.Le projet de l'implantation d'un marché de gros à Aïn Bessam (sud-ouest de Bouira) est toujours à la traîne, et ce, dix ans après son lancement en grande pompe par les autorités de l'époque. Lancé au début de l'année 2009 par l'ancien exécutif communal, les travaux de réalisation de cette importante structure commerciale n'en finissent pas d'alterner entre retards et arrêts. Actuellement, le wali de Bouira évoque une réception prévue pour le premier semestre 2020. Ce projet est l'archétype de l'amateurisme des autorités concernées et surtout la mauvaise gestion des deniers publics.
D'une AP (autorisation de programme) initiale de 70 millions de dinars, puis deux rallonges budgétaires de deux fois 30 millions de dinars, ce projet tant attendu connaît depuis son lancement nombre d'embûches et n'en finit pas de faire couler beaucoup d'encre. Pour comprendre les raisons de cette gabegie, car c'en est bel et bien une, il faudrait retracer le cheminement de ce projet qui devait être à l'origine d'envergure régionale, avant d'être relégué à un rang de marché local et pour finir, terminer en un "souk" de quartier.
Entre effet d'annonce et amateurisme
En 2010, l'ancien wali de Bouira, Ali Bouguera, annonce en grande pompe que cette structure allait être de dimension régionale qu'il devait concurrencer les marchés de gros de ceux de Sétif et des Eucalyptus. Ce même responsable, d'un ton excessivement rassurant s'est engagé à ce qu'il soit achevé en douze mois et pas un seul de plus. Bien évidemment, il n'en fut rien. Quelques mois après, l'APW de Bouira de l'époque accorde une importante rallonge financière dans le cadre du programme Plan sectoriel de développement (PSD), pour l'extension et la concrétisation du projet. Malgré l'importance de la cagnotte financière accordée par les élus de l'APW, les travaux de réalisation sont restés cependant en stand-by. Le 19 février 2013, alors qu'il était en visite d'inspection des projets du secteur, l'ex-wali de Bouira, M. Ali Bouguera, qui s'est arrêté sur le chantier, avait par la suite ordonné une enquête élargie sur les circonstances exactes de l'arrêt des travaux. Plusieurs mois après, une importante délégation officielle (composée du secrétaire général de la wilaya, des responsables locaux et de la direction du commerce ainsi que des délégués de la société nationale Magros) s'est rendue sur place, pour examiner la viabilité de la réalisation du projet en question. Plusieurs propositions ont été retenues ce jour-là, à l'image d'un changement de site d'implantation. En septembre de la même année, le dossier du marché avait connu un nouveau rebondissement avec les déclarations du ministre du Commerce de l'époque, à savoir Mustapha Benbada. Ce dernier avait indiqué à la presse que la prérogative de la construction et de la gestion des marchés de proximité ainsi que ceux de gros, sera transmise aux autorités locales dans chaque wilaya. Un changement de taille sera donc opéré dans le dossier, une fois la note ministérielle appliquée. À partir de là, c'était à l'APC de l'époque d'agir. Et le moins que l'on puisse dire est qu'elle avait fait montre de ses limites en la matière. L'entreprise et le BET choisis au départ ont fait étalage de leur incapacité de mener ce chantier à son terme. Pis encore, les fonds nécessaires à la réalisation de ce marché ont été prélevés sur les PCD alloués.
Cet état de fait reviendrait à dire que les différents élus, qui se sont succédé à la tête de cette municipalité depuis le lancement de ce chantier, ont participé d'une manière directe ou indirecte à la dilapidation des deniers de l'Etat, puisque plus de la moitié du budget initial a été consommé, pour un taux de réalisation qui ne dépassait pas les 40%.
De marché régional à celui du coin
C'est à partir de là que les choses commencent sérieusement à se compliquer, voire prendre une tournure ubuesque. Et pour cause, puisque les autorités locales de Aïn Bessam étaient incapables d'assurer la réalisation de cette structure, il fallait en toute urgence trouver un repreneur. C'est là que la wilaya de Bouira et à sa tête son premier magistrat de l'époque, Nacer Maskri, entre en jeu en reprenant en main le projet. L'ancien wali de Bouira avait estimé que cette structure commerciale ne correspondait nullement aux normes en vigueur. À partir de là, ce projet était censé connaître un nouveau départ, et ce, avec l'implication de l'entreprise publique Magros, chargée de la réalisation et la gestion des marchés à travers l'ensemble du territoire national.
Cette entreprise avait été saisie afin d'émettre un avis consultatif sur le réaménagement de cette structure commerciale.
Et sur un autre volet, réfléchir sur l'hypothèse de sa délocalisation vers une assiette foncière plus conséquente, à même de garantir sa "dimension régionale".
Après des mois d'attente et plus exactement en mars 2014, Magros prend tout le monde de court et lâche publiquement une bombe : "Magros n'a jamais eu pour vocation, du moins à l'échelle de Bouira, de réaliser le moindre marché de gros. On a été sollicité par le chef de l'exécutif de Bouira pour donner notre avis sur le sujet, rien de plus."
Coup de tonnerre ! Et d'enfoncer le clou : "C'est à l'APC de Aïn Bessam qu'incombe la réalisation de ce marché, car il n'est pas répertorié pour être un marché de gros régional." En juillet 2016, l'ancienne APC de Aïn Bessam débloque une nouvelle rallonge budgétaire prélevée sur son PCD de l'ordre de 30 millions de dinars dans le but de relancer les travaux.
Cette énième tentative fut la bonne puisque l'entreprise réalisatrice tiendra relativement ses engagements. Trois ans plus tard, ce marché en est à ses dernières retouches, après avoir consommé plus de 130 millions de dinars et enregistré dix ans de retard.

RAMDANE BOURAHLA


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