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Chronique d'une élection fermée



Chronique d'une élection fermée
Le rendez-vous électoral qui a fait tant parler de lui en des termes peu rassurants arrive dans une Algérie qui a peur de lendemains incertains.Le 17 avril est là et Bouteflika est candidat à sa propre succession, affichant au compteur la plus longue présence à la tête de l'Etat depuis 1962. Après une année de faux suspense sur la candidature ou pas du président sortant, le discours de la peur s'installe pour habiller un scrutin dénué de crédibilité et d'ouverture. Depuis son hospitalisation le 27 avril 2013 dans un hôpital militaire parisien, pour une période de 80 jours, les spéculations sont allées bon train sur son incapacité à achever son troisième mandat. L'idée d'une quatrième investiture devenait tellement irréaliste que personne ne s'y attardait. Des analystes et autres «acteurs politiques» ont préféré se soucier de l'application de l'article 88 de la Constitution en demandant au Conseil constitutionnel de constater la vacance du pouvoir. C'était compter sans les ingénieux ressorts d'un système qui est passé maître dans la manipulation et le montage de scénarios.Un système dont les membres peuvent se livrer des guerres de tranchées par médias interposés et rire ensemble en coulisses de leur capacité à brouiller les pistes et à rendre leurs desseins indéchiffrables. Le quatrième mandat a été scellé en juin dernier, lors de la première apparition de Bouteflika à Paris, recevant dans sa chambre d'hôpital son Premier ministre, Abdelmalek Sellal, et le chef de d'état-major de l'armée, Ahmed Gaïd Salah. Son retour au pays, le mois suivant, a confirmé l'intention du système de continuer à miser sur lui, notamment en lui permettant dès la rentrée sociale de convoquer un nouveau gouvernement complètement acquis au clan présidentiel dont les ministères de souveraineté en charge de préparer, suivre et valider l'opération électorale.Le lifting touchant aux prérogatives du chef du Département du renseignement et de la sécurité a contribué quant à lui à nourrir et enfler les spéculations sur un «clash» entre le clan présidentiel et le puissant général Toufik, faisant de l'option du quatrième mandat une incertitude, voire même une impossibilité. C'était, encore une fois, compter sans la puissante machine à manipulation du système, laquelle a faussé les calculs des uns et des autres à maintes occasions. Abdelmalek Sellal annonce le 22 février 2014 la candidature de Abdelaziz Bouteflika à briguer un quatrième mandat avec l'assentiment et le consentement du DRS et de l'état-major de l'armée. Est-ce que les supputations sur le clash entre des clans au pouvoir ont cessé pour autant ' Que nenni, la campagne électorale a même été axée sur une soi-disant scission dans le système, donnant du fil à retordre aux plus fins analystes et faisant même douter de qui est le lièvre de qui.Une tension sans précédent s'est emparée du climat électoral et le verbe cède au ton de la menace. Même Bouteflika, affaibli et parlant difficilement, s'est mis de la partie en profitant de la visite d'un ministre étranger pour régler ses comptes avec celui qu'on présente comme son challenger, Ali Benflis, et l'accuse carrément de «terrorisme à travers la télévision». Benflis réplique en disant ne pas se taire si fraude il y aura. Les mots et les menaces lourds de sens qui sont lâchés renseignent sur le climat de peur dans lequel on a voulu plonger les Algériens afin de les pousser à aller voter. Une situation qui rappelle étrangement celle de 2004, où les deux hommes s'étaient livré une aussi virulente et dure bataille électorale.Tout comme il y a dix ans, le discours de la peur est l'acteur majeur sur une scène électorale faite d'ombres et de querelles feintes ou supposées. Résultat : les Algériens sont invités aujourd'hui à élire un président sous la menace. Le couperet, disent les voix aventureuses, risque de tomber en cas de «mauvais choix» du candidat à élire. Heureusement d'ailleurs, c'est juste le rideau qui tombera ce soir sur un moment de théâtralisation politique de mauvais goût.




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