Algérie

Chronique d'un désaveu annoncé



Chronique d'un désaveu annoncé
Abdelmadjid Tebboune fait face à un cinglant désaveu qui remet carrément en cause la feuille de route que lui a attribuée le président de la République à sa nomination, le 24 mai dernier, au poste de Premier ministre.Mohamed Kebci - Alger (Le Soir) - Le fil des événements ayant suivi son intronisation à la place de Abdelmalek Sellal conforte, en effet, ce constat en ce sens que le coordinateur de l'exécutif se retrouve contrarié dans ce qu'il affirmait dans ses toutes premières déclarations en tant que tel, comme étant sa feuille de route que lui a tracée le président de la République.A commencer par sa «détermination» affichée devant les membres de la nouvelle Assemblée populaire nationale, à faire le ménage dans la sphère politique en en extirpant les forces de l'argent, affirmant, pour ce faire, que «des limites existent entre le pouvoir et l'argent».Intervenant devant les députés lors de la présentation du plan d'action de son équipe, Tebboune s'est engagé à «veiller à séparer le pouvoir de l'argent et le pouvoir politique, et que chacun n'a qu'à nager dans son monde».Un premier coup de semonce auquel il ajoutera un autre, comme pour marquer son entame de règne à la tête de l'exécutif et se distinguer de son prédécesseur. Ce fut quelques jours après quand il évoquera l'affaire des 70 milliards de dinars investis dans l'industrie sans pour autant qu'il y ait un impact sur le secteur ni sur le niveau de vie des citoyens, dans une remise en cause claire et nette de la stratégie adoptée par l'ex-ministre de l'Industrie et des mines dans le volet industrie automobile. Le successeur de Abdeslam Bouchouareb, certainement inspiré par Tebboune, enfonce le clou en accusant son prédécesseur d'avoir encouragé une «importation déguisée» de véhicules.Et le Premier ministre ne s'arrêtera pas en si bon chemin, visiblement encouragé par le retour d'écoute de ses premières sorties auprès de l'opinion publique qui commençait à percevoir dans sa démarche, les prémices du changement tant espéré. A la mi-juillet dernier, il sera l'acteur d'un geste qui polarisera, une dizaine de jours durant, l'actualité nationale, commenté qu'il était en long et en large. Ce fut quand il a poliment refusé que le patron du FCE soit présent à une cérémonie officielle qu'il devait présider. Un «acte» «difficilement qualifiable» qui a «indéniablement porté préjudice» au Pacte économique et social, estime la famille patronale à laquelle s'est jointe la centrale syndicale, à l'issue d'un conclave d'urgence à l'hôtel El-Aurassi. Et d'enfoncer le clou en renouvelant leur «engagement sans faille à agir pour traduire dans la réalité nos engagements contenus dans le Pacte, et exprimons par là même notre attachement indéfectible et notre fidélité totale à la seule personne du président de la République, Monsieur Abdelaziz Bouteflika», dans un propos qui sonne comme une défiance à peine voilée à l'endroit du Premier ministre.Un autre coup de semonce qui ne tardera pas, cependant, à susciter des grincements de dents au sein du sérail, ceci au moment où ce «geste osé et audacieux» a été salué même par des acteurs politiques à l'image de la secrétaire générale du Parti des travailleurs qui a ouvertement apporté son soutien au Premier ministre. «On attend des faits et des actes. Le Premier ministre s'est engagé à assainir la situation pour protéger l'économie nationale et notre parti s'inscrit dans le même sillage. M Tebboune a complètement cassé les lignes du vieux discours, mais cela est insuffisant. Le Premier ministre voudrait en finir avec l'argent sale qui a pollué la vie politique et séparer l'affairisme du politique. Je pense qu'il faudra commencer avec la nouvelle APN qui compte 30 % d'hommes d'affaires», soutenait Louisa Hanoune dans une sortie publique à l'occasion de la célébration du 27e anniversaire de la création de son parti. Ou encore tout récemment Soufiane Djillali qui, tout en prenant acte des «faveurs de l'opinion publique et le bénéfice du doute pour ses positions», invitera Tebboune à ne «pas leurrer le peuple en reculant».Un conseil du président de Jil Jadid que le Premier ministre ne semble pas avoir écouté puisque les événements ayant suivi ont confirmé un net désaveu de son action, remettant en cause la concrétisation des «effets d'annonce des intentions» de son équipe.A commencer par sa réunion, avant-hier dimanche, avec les partenaires sociaux signataires en 2006 du Pacte national économique et social, avec comme unique sujet la fixation de la date de la prochaine tripartite. Un maigre ordre du jour qui invite à penser que ce conclave a été «provoqué» d'en haut, juste pour signifier la fin d'une «fausse guerre» qui n'aura que trop duré. Une appréciation que corrobore l'atmosphère de cette réunion tenue loin des médias comme s'il s'agissait d'un conclave qui devait discuter d'un quelconque sujet classé secret d'Etat. Une ambiance empreinte d'un strict minimum protocolaire, d'un froid et d'un silence de cathédrale qui en disent long sur un fait : Tebboune est loin d'avoir acquiescé à cette injonction d'en haut et se retrouverait fragilisé et affaibli.Ce que le show de l'après-midi de la même journée confortera avec un Ali Haddad et un Sidi-Saïd qui ont éprouvé le «plaisir de leur vie» à prolonger, près d'une heure durant, leur discussion avec le frère-conseiller du président de la République lors de la cérémonie d'inhumation de Rédha Malek, le tout sous les crépitements incessants des appareils-photos et des caméras de télévision. Le patron du FCE et Saïd Bouteflika, inséparables lors de ces obsèques, quitteront le cimetière El Alia ensemble, dans le véhicule officiel de ce dernier dans une séquence à très fort message !Alors, la question qui coule de source : quelle sera l'attitude de Tebboune face à cette nouvelle donne ' : démissionnera-t-il comme le lui recommande le président de Jil Jadid ou poursuivra-t-il sa mission contre vents et marées '


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