Algérie

Chaises pliantes, tables… et plus, si affinités !


Location de chaises, tables, méga-couscoussier, big marmite, bâche, tabounate, sono et autres guirlandes lumineuses, un créneau qui tombe quelque peu en désuétude. Pourtant, au temps où les Algériens célébraient exclusivement les mariages sur les terrasses, cette activité avait pignon sur rue.
A présent que fiançailles, épousailles et autres ripailles sont fêtées dans des salles, ces prestataires, ô combien utiles, sont beaucoup moins nombreux. Mais les plus téméraires font de la résistance. On les trouve surtout dans la périphérie de la ville ou dans les vieux quartiers populaires comme à Bab-El-Oued. L'une de ces plus anciennes enseignes, située à la rue des Frères-Achache, ex- rue Livingston, à proximité de l'ancien cinéma La Perle, nous a ouvert ses portes pour mieux éclairer notre lanterne. Redouane, 44 ans, est dans ce métier depuis qu'il était haut comme trois pommes. «Ce commerce existe depuis les années 1950. Il était tenu par une Française qui louait des chaises, des tables, des estrades et même de la vaisselle. A l'indépendance, cette dame a plié bagage. Et c'est ainsi que cette activité commerciale a été récupérée par ma famille. C'est l'époux de ma grande sœur, le défunt Yahi Mohamed, qui s'y est attelé en premier. Tout cela pour dire que cette enseigne n'a jamais changé de vocation depuis sa création !» insiste-t-il.
La fête à l'ancienne !
Même si de nos jours la célébration des mariages et autres réjouissances, fiançailles, circoncision, naissance… a pris le chemin des salles de fêtes, de nombreuses familles continuent à perpétrer la tradition en organisant ces événements festifs sur la terrasse de leur immeuble ou carrément à la maison en empruntant, en général, l'appartement d'à côté. Les familles modestes, qui n'ont pas les moyens de consacrer 10 à 20 millions dans la location d'une salle austère, préfèrent honorer leurs fêtes à l'ancienne. «Je travaille beaucoup avec des familles à revenus modestes. Cependant, j'ai aussi été sollicité par des gens aisés, mais très attachées aux traditions, telle que cette dame qui a fêté le mariage de son fils cet été et qui m'a avoué qu'elle voulait que les chaises pliantes en bois, symboles des fêtes chez nous, fassent partie du décor. D'autant que, selon ses confidences, ces mêmes chaises ont servi lors de ses propres noces ! Elle s'en rappelle pour avoir accompagné à l'époque, son père dans notre boutique. Par ailleurs, d'autres me sollicitent également pour des chaises et tables supplémentaires, lorsqu'ils attendent beaucoup d'invités à la maison pour un repas familial ou entre amis. Les chaises pliantes en bois, nécessitant moins de place, demeure le produit phare de notre activité. Ils en prennent aussi pour en mettre au pied de leur immeuble, où les hommes aiment s'asseoir et papoter en sirotant un café. D'ailleurs, ces anciennes chaises fabriquées avec des lattes en bois symbolisent la fête dans l'esprit collectif. Rien qu'à leur vue, on devine la présence d'une cérémonie. Ça remplace le panneau de signalisation. » À la réservation, notamment en période d'été, où plusieurs mariages peuvent coïncider le même jour, une caution de 2 000 DA est indispensable. «Je dispose de 500 chaises en bois et de 400 en plastique, pour respectivement, 15 et 20 DA la location par unité», nous révèle Redouane. Il y a aussi les bâches pour les terrasses, les guirlandes, les tables et les ustensiles de cuisine. «Il est certainement préférable de louer, à titre d'exemple, un couscoussier de fête à 200 DA plutôt que d'en acheter un à 2000 DA et de s'encombrer avec, une fois la fête terminée. Malheureusement, certaines personnes ne sont pas promptes à ramener le matériel dans les temps. Je suis parfois obligé de grimper moi-même sur les terrasses pour récupérer mon matériel, pendant qu'une autre famille l'attend !» regrette notre interlocuteur.
Priorité aux disparus !
Même lieu, autre circonstance. Une circonstance, qui, elle, n'est pas soumise à une réservation préalable ni au paiement de la prestation. Il s'agit de décès survenu subitement et pour lequel il est aussi indispensable de recourir aux services de Redouane. «S'il y a une situation qui peut se passer de la réservation, c'est bien celle liée à la mort. Ça n'avertit pas ! Lorsqu'il y a un décès dans le quartier, j'offre les chaises et autres matériels, gratuitement et en priorité, le temps des funérailles. C'est la moindre des choses», reconnaît-il. Comme pour appuyer ses dires, au moment de notre passage, un jeune homme rapportait 20 chaises prêtées pour «la djanaza» d'un membre de sa famille. Un métier comme un autre… mais bien plus qu'une simple activité, cet établissement apporte une réelle aide et assistance de proximité à travers ses prestations. Et si on en fait son gagne-pain, c'est encore mieux ! Chaque peine mérite salaire…
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