Algérie

Chacun y va de son horaire !



De nos entretiens avec élèves, enseignants et responsables de certains établissements scolaires, on peut tirer une première conclusion : chaque établissement, chaque élève, chaque enseignant et chaque responsable a vécu l'évènement de la rentrée scolaire de cette année à sa manière. Donc, le premier perdant de cette rentrée est l'évènement lui-même qui a perdu son caractère national. Et pourtant, la volonté de conférer à l'évènement une dimension unitaire n'a pas fait défaut. Pour preuve, la leçon inaugurale retenue pour cette année qui a porté sur «L'unité nationale», actualité politique nationale et régionale oblige. Précisons que cette leçon a été dispensée aussi bien dans les CEM que les lycées. Même à ce niveau, nous avons relevé quelques confusions. Une enseignante dans un CEM se trouvant à Oran-est, nous dira, sur un ton fier, que les élèves ont bien assimilé ses propos. Mieux, un échange des plus intéressants s'en est suivi, ajoute-t-elle. Cependant, pour elle, la leçon avait pour thème «la citoyenneté». Entre «L'unité nationale» et «la citoyenneté», il y a un écart, nous semble-t-il. Toujours sur ce plan, une élève qui vient de passer du cycle moyen au secondaire ne s'est pas empêchée de qualifier cette leçon inaugurale «du n'importe quoi». On retrouvera ce même jugement chez d'autres élèves, réfractaires à tout ce qui porte le sceau du politique. Un enseignant, dans un CEM de Bir El Djir, nous dira à ce sujet. «J'ai chargé une élève de lire le texte que m'a fourni l'administration». Son rôle s'est limité à organiser les débats. Il a retenu quelques-unes des interventions qu'il a jugées dignes d'intérêt. Tel cet élève qui a essayé de lui expliquer que «l'amour de la patrie se manifeste lors des rencontres de foot de l'équipe nationale». Doit-on attendre les éliminatoires de la prochaine coupe du monde pour manifester notre attachement à notre Algérie ?

 Une autre confusion est due à l'application ou non des nouveaux horaires décidés par le ministre de la tutelle. Dans un même quartier, deux CEM distants l'un de l'autre de quelques centaines de mètres vont fonctionner différemment. Les deux ne sont pas dotés de réfectoires. L'un a décidé d'opter pour les horaires habituels et l'autre pour les nouveaux, c'est-à-dire libérer les élèves à 14h et demi. Celui qui a pris cette option va fournir des casse-croûtes à ses élèves entre midi et midi et demi. L'information a circulé dans les ensembles d'habitats de ce quartier. Et déjà certains ont fait savoir de rejoindre celui qui dispense le sandwich. Peine perdue de vouloir leur expliquer que l'établissement qu'ils envisagent de quitter a été classé en bonne place concernant les résultats du BEF au niveau de la wilaya d'Oran. Donc, il faut s'attendre à des vagues de transferts d'un établissement à un autre. Dans ce sens, l'on apprendra que le lycée Lotfi, où les classes sont surchargées, est débordé de demandes dans ce sens. Toujours sur ce chapitre, l'on notera les dilemmes devant lesquels se trouvent certains établissements et leurs responsables. C'est le cas notamment d'un CEM au niveau de Bir El Djir. Doté d'une cantine, cet établissement ne peut offrir des centaines de repas aux élèves et aux enseignants en l'espace d'une demi-heure. «Ça risque de provoquer des mécontentements», croit dur comme fer un enseignant qui a accepté de nous entretenir sur la rentrée scolaire de cette saison. Au lycée Hamou Boutlélis, les élèves semblent déroutés parce qu'ils ne se voient pas trimballer avec eux leurs déjeuners dans des boîtes en plastique. La direction de cet établissement a opté pour les nouveaux horaires mais ne peut répondre à la demande de restaurer les élèves immédiatement. Donc, ces derniers doivent se débrouiller durant les premières semaines. Pourvu que le provisoire ne se transforme pas en éternel.

 Concernant les parents, notamment ceux qui travaillent et qui doivent chercher leurs enfants à la sortie de classes, ils ne savent pas comment ils vont s'adapter avec la nouvelle situation. Les nouveautés, concernant les horaires, introduites par Benbouzid ont cet avantage : elles ont évacué les préoccupations pédagogiques et la qualité de l'enseignement dispensé. Ce qui est un autre coup fatal à un système jugé, par presque la majorité, de sinistré.




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