Algérie

Ces femmes qui viennent d'ailleurs...



Ces femmes qui viennent d'ailleurs...
Dans « La terre et le sang » de Mouloud Feraoun, Marie, la Parisienne, qu'Amer, un enfant du village qui renoue enfin avec ses racines ramène, détonne au milieu de femmes curieuses et secrètement envieuses. L'écrivain, s'il venait à ressusciter, sera grandement étonné de voir que les étrangères ne sont plus comme cette épouse modèle et qui, au fond, ne l'était pas tant. La perle rare qui semblait alors débarquer d'une lointaine planète a vite fait d'intégrer le milieu où elle évolue, progressivement, à l'aise. Comme pour préserver la vraisemblance de son intrigue romanesque, l'écrivain s'est comme senti obligé de lier le destin tourmenté de celle-ci à celui de Rabah, l'oncle de Amer. Ce dernier avait trouvé la mort accidentellement dans une mine de charbon du nord de la France par « mégarde » de son neveu. Elles sont désormais plus nombreuses ces femmes d'ailleurs et n'ont aucun lien avec la terre ou le sang. Elles sont conquises surtout sur les réseaux sociaux devenus un lieu de recherche de l'âme s?ur. Les fils de cette gigantesque toile tissent des histoires que nulle imagination ne peut concevoir. Le phénomène universel est désigné joliment en Afrique de l'Ouest par ce terme approprié de brouteurs. Le mariage, comme toutes les choses, voit ses repères se brouiller, ses règles se chambouler. Il prend de nouveaux visages. Ainsi, on ne se contente plus de séduire la cousine de la banlieue de Paris ou de Roubaix. La « migria » qui, malgré tout, fait partie de la famille, a toujours suscité des fantasmes, des films, mais elle se voit de plus en plus déclassée et moins courue. On ne s'étonne même plus de voir des Canadiennes venir de la lointaine Alberta ou des vieilles qui n'ont connu que les charmes et la tranquillité du Puy de Dôme ou de la Bretagne arriver, sans crier gare, au milieu de familles qui cachent mal quelque dépit secret. Une mère n'est, certes, jamais satisfaite de voir, comme dans la chanson, « son fils emporté par une roumiya ». La majorité se garde, pourtant, de l'afficher. On se retrouve même dans cette situation cocasse où une jeune femme devient la belle-mère d'une retraitée qui revit par la grâce d'un amour avec celui qui aurait pu être... son petit-fils. Dans son coin, le père peut grogner et refuser ces cadeaux dont la belle-fille gave la famille. Mais l'exil n'est pas plus vécu comme une malédiction, un arrachement au pays et à sa famille. Il s'avère pour beaucoup une délivrance et le projet d'une vie. Le ronchon finira bien par se rendre à la raison et taire ses griefs sous peine de paraître encore plus « vieux jeu ». Ces dernières années, on n'a plus affaire au jeune étudiant qui, parti poursuivre des études en Russie, succombe aux charmes d'une Soviétique ou à l'émigré d'antan qui, l'été venu, revient parmi les siens avec femme et enfants. Ni au jeune qui, parti clandestinement dans quelque ville européenne, veut régler ses problèmes de papiers par le recours au fameux mariage blanc qui permet de mettre fin au travail en noir. Personne ne trouvait, naguère, à redire sur ces couples qu'on trouvait un peu étranges mais au fond sympathiques. On ferme les yeux sur les libertés que s'octroyait la femme, libre d'aller et de circuler au milieu des hommes dans les marchés, de se laisser caresser par la brise au bord de la plage. On enviait, aussi, les enfants qui affichaient tous les signes de l'aisance. Maintenant, c'est la femme qui vient chercher le « marié », comme si elle seule pouvait lui ouvrir une fenêtre vers l'espoir. Certes, les filles de chez nous se gardent encore de succomber à ce phénomène. Certaines ont épousé des étrangers mais loin du pays natal, préservées par l'anonymat et l'éloignement. Beaucoup de familles n'ont pas consenti à accepter une telle liberté conjuguée au masculin. Pourtant, certaines tissent déjà des idylles sur les lieux de travail, entament une relation sur le net. Sauteront-elles un jour le pas pour se laisser emporter par les flots de l'évolution que personne, dit-on, ne peut arrêter '




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