Ces bons samaritains qui agacent

Depuis le début de la crise sanitaire et bien plus tard, on a assisté à un défilé de photos et de vidéos sur les réseaux sociaux de personnes lambda ou de responsables associatifs, politiques et même de ministres faisant des dons alimentaires à des personnes démunies.Comme pratiquement à pareille période de chaque année, et depuis l'avènement des réseaux sociaux et leur démocratisation en Algérie, on assiste à l'exaspération des internautes face à cette vague de bienfaiteurs "selfies" qui immortalisent, sur des vidéos publiées sur leur page Facebook, un don de denrées alimentaires ou une simple visite effectuée à un malade, soit dit en passant assez médiatisée pour faire le buzz.
À Oran, et un peu partout dans le pays, ces pratiques dévalorisantes des personnes en grande précarité ont ulcéré plus d'un, et les commentaires les plus acides accompagnent souvent cette charité affichée en dénonçant une publicité "infâme", "nauséabonde" et "exhibitionniste" que professent certaines associations "m'as-tu-vu" en mal de reconnaissance officielle. "Cet étalage de dons n'a pour but que de justifier aux yeux des autorités locales un travail sur le terrain qui n'en est pas un.
C'est juste de l'esbroufe, de la poudre aux yeux", explique Youcef, président d'une association sportive locale, qui ne comprend pas que ce soient les mêmes associations inféodées qui bénéficient encore et toujours des subventions annuelles.
En effet, et depuis le début de la crise sanitaire et bien plus tard, on a assisté à un défilé de photos et de vidéos de personnes lambda ou de responsables associatifs, politiques et même de ministres faisant des dons alimentaires aux personnes démunies.
Pour Miloud, enseignant universitaire, cette pratique ne fait que traduire la réalité à laquelle la société est confrontée. "On a, d'une part, une misère galopante, une pauvreté qui se généralise et, de l'autre, des personnes en mal de publicité, de reconnaissance sociale ou je ne sais pour quel autre dessein, qui profitent de ces situations pour en tirer profit, au détriment de l'honneur de ces familles démunies", explique-t-il.
On se rappelle qu'à Oran les photos du président d'une association offrant une plaquette d'?ufs à des familles dans le besoin sans prendre le soin de flouter leurs visages ont révolté les internautes, qui n'ont pas hésité à le remettre à sa place et à rappeler les liens étroits qu'il entretiendrait avec la contre-révolution, insistant particulièrement sur son rôle dans le ralliement des baltaguias qui ont semé violence et terreur parmi les manifestants lors du vendredi 45 du Hirak.
Ce personnage continue encore d'activer et de publier des vidéos de visites qu'il a effectuées, comme celle qui l'a conduit dernièrement au domicile d'un comédien.
Pourtant, il existe d'autres associations qui activent autrement, sans tomber dans le voyeurisme national, et ?uvrent dans l'objectif d'aider les familles en détresse. Des appels aux dons sont ainsi lancés pour les personnes dans le besoin et sont distribués en toute discrétion, loin des caméras.

Saïd OUSSAD