Algérie

Ces Algériens qui rêvent du changement



«C'est la possibilité de réaliser un rêve qui rend la vie intéressante» Paulo Coelho, romancier brésilien

C'est plus qu'une évidence, avec le décès de Abdelhamid Mehri, l'univers des idées dans notre pays a perdu l'un des siens, sinon pourrait-on dire de façon spontanée et sans exagération aucune, la galaxie de la pensée combien déjà tristement pauvre en Algérie a enterré dans la douleur une de ses rares étoiles filantes. En filigrane de ce tourbillon qui aurait menacé et menace encore de nos jours la santé morale de notre patrie, se dessine l'ombre de ce sincère politicien qui aurait voulu faire de la rupture définitive avec cette absurde «légitimité révolutionnaire» par la crédibilité des idées une de ses luttes les plus prioritaires. C'est aberrant et malheureux en même temps, les femmes et les hommes engagés de cette trempe qui s'écartent de la logique carriériste, végétative, rentière et «khobziste» pour reprendre à mon compte l'expression fort lucide et très chère à mes compatriotes se comptent en Algérie du XXI siècle sur les doigts de la main à telle enseigne que l'on s'interroge le plus souvent ça et là sur le devenir de toute une nation sclérosée par le souvenir des feux mal-éteints de son passé colonial, de la terreur des années d'acier d'autoritarisme ayant émaillé les lendemains de l'indépendance, de la parenthèse tragique des années 90 et de cet oiseau de mauvais augure que l'on appelle par euphémisme amplificateur «terrorisme administratif» et par souci de circonvolution rhétorique «al-fassad», traduction fantaisiste en arabe du mot corruption avec ses diverses ramifications (incompétence, gaspillage, dilapidation des deniers publics, clientélisme et tribalisme). Personne ne saurait le nier, cette nation-là dont on parle si souvent dans les médias étatiques avec un surplus d'euphorie nationaliste n'est née hélas et au grand malheur des masses populaires que pour être pendue aux basques de certaines élites désaxées par rapport au contexte géopolitique régional et mondial où elles vivent et même peu portées à assumer aussi bien les enjeux de leur propre relève que ceux de leur avenir. Pire, l'Algérie qu'il ont apprivoisée par le langage de la violence et du mensonge, ne rêve plus désormais. Elle est comme devenue étanche aux embruns de la modernité et sourde aux sirènes de l'évolution. C'est vraiment malheureux, les acquis démocratiques de tant d'années de luttes de militants et de citoyens engagés sont sacrifiés sur l'autel du désespoir et du ralliement au camp des défaitistes de tous bords. D'où la déstructuration et la crispation du sens civique.

Les Algériens, du moins la jeune génération, sont désintéressés à tout ce qui a trait au politique et à la politique dans le global et les menus détails. Bref, le rêve entretenu jadis d'une Algérie qui avance a lâché ses amarres dans l'incertitude en se dissipant à la rencontre du cauchemar d'une intelligentsia qui se noie chaque jour davantage dans la boue de ses incohérences protéiformes (idéologiques, partisanes et même idéelles), déglinguée et vieillissante quant à son espérance de vie, et comble de malheur et de hasard, «dépatriotisée» et «dénationalisée» en son for intérieur. Sur son sillage, la jeunesse a attrapé le rhume dévastateur de «l'aphasie linguistique et culturelle» dans la mesure où elle n'arrive point à s'exprimer correctement dans aucune des langues qu'elle avait apprises à l'école. Même le premier magistrat du pays, on s'en souvient tous, s'en est plaint un jour de façon véhémente devant les caméras des médias. Victimes propitiatoires des plans de francisation sauvage de l'enseignement avec ses différents paliers à l'aube de l'indépendance et de stratégies aussi revanchardes que manipulatrices d'arabisation forcée entamée dès la fin des années 70, les trois tiers des Algériens baignent au jour d'aujourd'hui dans une véritable cacophonie langagière. Ainsi, en écoutant des gens parler dans les banlieues algéroises, on est presque incapable de distinguer si c'était de l'arabe, du berbère ou du français dont ils font usage pour communiquer entre eux. On ne saurait le dire autrement au risque de paraître thuriféraire de la nullité, l'histoire porte dans ses fastes un jugement sévère: l'ancienne élite a failli à son devoir patriotique et à sa mission citoyenne de transmission et d'inculcation du patrimoine immatériel, culturel et historique aux générations montantes et celles-ci se sont vu privées et sevrées de téter à la mamelle d'une éducation civique et citoyenne de nature à promouvoir une démocratie réelle et authentique. Les Algériens, s'il l'on en veut dépeindre un vrai portrait, vivent le supplice de Tantale, car tout est à portée de leurs mains (hydrocarbures, tourisme, un large littoral, des paysages magnifiques, richesses souterraines et minières) mais eux sont malheureusement, incapables de s'en servir. C'est pourquoi, il est grand temps que les élites responsables de ce désastre (le sous-développement structurel, la dévolution morale et le retard à tous les niveaux, économique, politique et diplomatique) se remettent en cause et fassent amende honorable à cette Algérie souffrante dans le déni et l'injustice. Dommage que nos jeunes situent la ligne de démarcation de leurs utopies au-delà des côtes espagnoles! Dommage que nos compétences fuient nos universités, devenues depuis des temples de médiocrité, afin d'enguirlander par leur savoir des pays qui n'ont rien dépensé pour les former! Qu'adviendrait-il donc de l'Algérie d'ici 10, 20 ans? Qu'en sait-on au juste quand se profile à nos regards une absence terrifiante d'études prospectives et de recherches sur les perspectives d'avenir dans un pays considéré pourtant comme le plus stratégique dans la Méditerranée et dont la population avoisine les 35 millions mais qui ne possède aucun centre de recherche digne de ce nom? Que fait-on au gouvernement à part le fait de distribuer l'argent de la rente sans compter, printemps arabe oblige, pour endiguer le fléau endémique du chômage? A-t-on ressenti un jour la douleur des harragas, des familles des disparus, et celle de nos tristes mères? Pourquoi l'Algérie régresse-t-elle? Pourquoi est-elle en retard par rapport à ses voisines? C'est un fait avéré, l'Algérie, ce beau pays qui fut «la prune du Maghreb» à l'aube de l'indépendance pour paraphraser le mot du journaliste Ignacio Ramonet, est de nos jours devenue un repoussoir. C'est pourquoi, elle a besoin de la bonne volonté, de la franchise et du courage de ses élites pour reconquérir sa place. De même la force de ses masses lui serait-elle un atout indispensable. Bien évidemment, ces élites-là qui sont la plupart des fois hésitantes et confuses à propos des différents plans, stratégies et réformes (sociales, économiques, politiques) à adopter à moyen et long terme afin de sortir de l'ornière de la crise sont appelées à leur renvoyer l'ascenseur. Ce qui n'est plus le cas présentement.

En un mot générique et polysémique à la fois, l'on saurait affirmer que l'élite algérienne se délite quoi! C'est pourquoi, actuellement, l'idée du changement est banalisée et popularisée parmi la population d'une façon digne de la littérature du bas quartier et qui de surcroît frise l'insolence et l'invraisemblable. A ce titre, le sésame «changement» se déplace partout de bouche en bouche sans toutefois susciter le moindre soupçon d'enthousiasme et de zèle. les citoyens s'ennuient dans cette routine de «réformes» avec laquelle les médias publics leur cassent les oreilles. Ils n'ont à vrai dire qu'une seule idée en tête qui se multiplie en diverses versions voisines les unes des autres: la situation actuelle est intenable et il faudrait «changer» en urgence le cours de choses, réformer ne serait-ce qu'un secteur de l'administration, de la justice, de la fonction publique ou moins encore de l'école est plus que nécessaire. Mais à y regarder de plus près, il ne savent plus à quel ciel se vouer, changer quoi exactement, comment et en combien du temps? L'Algérie est-elle vraiment à ce point incapable de protéger ses enfants et leur venir en aide aux moments difficiles? Pourquoi les inondations de Bab El Oued à Alger en 2001 n'ont-elles pas incité nos responsables à réfléchir sur les dégâts qu'engendrent les intempéries quand on n'y prend pas garde? Le fameux plan O.R.S.E.C existe-t-il effectivement ou il n'est que l'ombre de lui-même ?

Si la réponse pour les autorités est par l'affirmative, qu'ont-elles fait donc pour parer aux dernières chutes de neiges et désengorger les «dechras» enclavées et coupées de lumière de l'Algérie profonde? Les Algériens veulent rêver qu'un jour leurs élites se délestent de ce fardeau de bureaucratie qui occupe les administrations comme une toile d'araignée et qu'elles fassent elles-mêmes leurs propres ablutions démocratiques aux plus hautes sphères de l'État en s'ancrant à jamais dans les ères novatrices de l'édification nationale et de la modernité culturelle. L'impasse se pose donc au niveau des solutions à y apporter par l'intelligentsia politique et non plus à l'aune de la volonté et de la prédisposition citoyenne à changer. Dans cet ordre d'idées, l'on pourrait avancer tout de même et sans crainte d'être contredit, l'argument selon lequel tout le monde, que ce soi à l'intérieur ou à l'extérieur du régime en place, est d'accord sur le fait qu'il y a un blocage quelque part dans les institutions étatiques, y compris ces dirigeants-là qui s'entêtent à nier le fait accompli en teintant leurs discours et déclarations de formules ambiguës, démagogues et pleines de fioritures qui laissent planer le doute sur leurs réelles intentions. Mais indépendamment de ces données et supputations, notre nomenclature dirigeante est-elle réellement consciente que l'Algérie vit une période critique et charnière de son histoire où elle devrait soit enfourcher le cheval du changement en marche ou rester sur le quai, c'est-à-dire à la marge de la dynamique régionale en cours en se recroquevillant sur elle-même dans une logique de stand-by. Chose qui, en l'absence d'un réel management des crises, la clouerait inévitablement au pilori des pays arabes les plus en retard en matière de démocratie après qu'elle en avait ouvert le bal. Cela dit, le changement est inéluctable mais comment y procéder. En l'état actuel des choses, les données politiques et géostratégiques sont en défaveur de notre pays puisque la vapeur révolutionnaire a pris de court ce simulacre de réformes qui n'ont pris de forme effective qu'à l'intérieur des coulisses du régime qui les avait fomentées. Car, à l'évidence, les masses sont restées sur la touche alors les responsables politiques concoctent des mesures d'urgence qui les concernent eux au premier chef sur les tribunes. Tout au plus, l'Algérie est-elle une proie facile aux visées néo-impérialistes et néo-colonialistes des pays du Nord, plus particulièrement la France qui s'acharnent à y sécuriser leurs appuis stratégiques et à pérenniser la survie du statu quo.

MAIS POURQUOI ON EN EST LA?

Pourquoi cette «fracture dialogique» entre les responsables et le peuple persiste-t-elle au point de se muer en scission sociologique entre sommet et base? A cette problématique obsessionnelle du cas extrêmement pathologique de l'Algérie répond en écho une kyrielle d'antidotes, laissés jusqu'à présent au grenier du laboratoire de nos officiels au rang desquels l'on peut citer «l'absence des idées». Lesquelles sont le carburant philosophique et éthique de tout processus du changement. Les rêves et les idées sont les préliminaires obligatoires pour la construction des nations. En réalité, la morphologie de la crise algérienne appelle à un décryptage de trois étapes clés dès sa genèse. La première est celle où la légitimité populaire a été accaparée et détournée de son cours par une pseudo-légalité révolutionnaire. Si l'on dit ici légalité, c'est parce que la forme des institutions au lendemain de l'indépendance nationale a épousé superficiellement les normes légales sans pour autant prendre en compte l'assentiment populaire à leur égard. Le G.P.R.A qui fut écarté des rênes du pouvoir par l'armée des frontières en connivence avec quelques wilayas de l'intérieur, constitue à n'en point douter le premier camouflet de «l'Algérie des idées» devant à «la tyrannie des armes et des larmes». En d'autres termes, la locomotive algérienne a pris dès le départ un mauvais sens. Lequel l'aurait mené tout droit vers le dérapage.

Chemin faisant, la gestion archaïque basée sur l'improvisation (les politiques d'arabisation), le populisme (la politique des plans, la révolution agraire, industrielle ainsi que la fameuse «industrie industrialisante», le dogmatisme (instauration du parti unique et interdiction de tout pluralisme syndical), et un mépris du politique qui laisse deviner à petits traits la tournure autoritaire qu'allait caractériser quelques années plus tard le pouvoir, a miné le socle idéel de toute la nation. Le plus souvent les manifestations multiformes du régime politique et ses reptations insidieuses dans l'espace sociétal depuis l'indépendance sont émaillées de fausses idées de lutte anti-coloniale et anti-impérialiste furent largement propagées parmi l'opinion publique. Celle-ci fut conquise par les discours creux des dirigeants qui érigent le défi à l'Occident et de l'ex-puissance colonisatrice, en l'occurrence la France, en norme de conduite alors qu'ils furent incapables de remettre sur rails une économie gâchée par plus de 132 ans d'hégémonie et d'exploitation impérialiste tout azimuts.

Il est vrai par ailleurs que ces plans du désordre et de gabegie sont propres à chaque remue-ménage post-révolutionnaire mais il n'en demeure pas moins que les quelques politiques de récupérations de territoire comme celle de Mers-el-Kébir en 1968 et le coup d'éclat de la nationalisation des hydrocarbures en 1974 furent des exceptions rarissimes de ce tiersmondisme triomphant qu'aurait incarné le colonel Boumèdiène juste après la mort de Nasser en 1970. Car, encore faudrait-il le préciser, sur le plan des idées, les tares rédhibitoires du système sautent clairement aux yeux et la poigne du fer de Rais n'a fait en vérité que tordre le cou à l'espace des libertés combien déjà rétrécissant et générer des exclusivismes et des particularismes régionaux. Ainsi la spécificité culturelle du pays fut-elle ignorée, les opposants exilés et la parole contradictoire muselée.

En effet, depuis belle lurette, l'espace politique algérien est régi par les manigances au sérail, des constellations claniques aux plus hautes sphères de l'État, une instrumentalisation des plus machiavélique de la religion à des fins strictement politiciennes et pour fermer le cortège une récupération démagogue de l'héritage révolutionnaire du peuple au seul intérêt des gouvernants. En un mot, le simple observateur de la scène politique serait amené à corroborer le fait que c'est la force qui aurait souvent primé dans le jeu politique. La charte nationale de 1976 aurait fermé le banc de ce chapitre tumultueux de négations des aspirations populaires en permettant un personnalisme outrageux du régime via le conseil de la révolution, porté au summum du centre de décisions, bref une instance de direction mise sous la férule du maître du céans, en l'occurrence, le colonel Boumédiène. Aucun périmètre n'est donné alors aux idées et le dialogue n'a plus droit de cité. Les années suivantes n'en sont pas moins choquantes, la naissance de l'article 120 dès l'accession de Chadli aux affaires en 1979 a mis fin au mythe de la révolution faite dans la solidarité de tous les courants politiques fondus dans le sigle du F.L.N. Ainsi les militants communistes furent-ils mis en minorité et privés de participation au processus d'édification nationale. Ce qui aurait laissé le champ libre aux deux courants islamistes et berbéristes d'entrer en dissidence frontale avec les caciques du parti unique et le système politique dans sa globalité. Les premiers, boucs émissaires du Baâthisme benbelliste ainsi que du militarisme boumédiéniste ont saisi l'opportunité au vol en profitant des bienfaits de la politique économique d'anti-pénurie (P.A.P) pour servir via «l'entrisme politique» de relais à un réformisme politique prôné dès le départ par le président Chadli afin d'amorcer «Al-Infitah», stratégie économique calquée sur le modèle des pays émergents de l'Amérique Latine et de l'Asie du Sud-Est avec comme mode d'emploi, une libéralisation économique graduelle ainsi qu'une «déboumédiénisation» sans relâche du système de gouvernance tandis que les seconds, furent marginalisés et étouffés dès la crise de 1949 à la faveur de ce que l'historien Mohammed Harbi appelle «l'unanimisme de façade» dont s'est drapé le mouvement national bien avant le déclenchement de l'insurrection de 1954. Il est un fait indéniable, les bourdes commises sous le règne de Boumédiène et Chadli, marginalisation des islamistes et des berbéristes pour le premier et stigmatisation des communistes pour le second, se sont soldées bien plus tard par un retour en force de la violence comme moteur de la politique et purgatoire de toutes les frustrations accumulées des décennies durant sous les coups de boutoir de l'autoritarisme dans la mesure où l'ouverture au forceps et «par effraction» comme dirait Ait Ahmed du champ politique suite aux événements tragiques d'Octobre 88 n'a, avouons-le bien, été qu'une illusion. Pire, elle fut un bonus octroyé gratis à la nomenclature gouvernante afin de se régénérer in extremis en avatar démocratique au tout début des années 90. A preuve que le fondement du régime est resté le même, avec en prime et comme seul ornement, une constitution qui aurait permis le foisonnement des partis et non plus la floraison des idées. Comme effet immédiat, les quelques retouches concédées en réformes superficielles qui consistent en un multipartisme en trompe-l'Å“il ont avorté dans l'Å“uf les pétales du «printemps algérien». Dans la foulée, le gouvernement réformiste de Hamrouche a été gentiment remercié pour ne s'être jamais acoquiné avec les dérives d'un régime qui a montré ses limites et la jeunesse a décidément été humiliée dans sa dignité et amour-propre. Car, vivant d'expédients, elle aurait tablé sur le marché noir, la débrouillardise ainsi que les ventes à la sauvette pour survivre aux «politiques économiques d'austérité» engagées par les autorités et non plus sur la participation citoyenne et dans l'autre versant la légalité révolutionnaire a changé ses oripeaux mais gardé cependant son essence, largué sa forme mais préservé son fond puisque les mêmes figures «gérontocrates» qui ont jadis traité la révolte de la rue de «chahut de gamins» circulent encore dans les quatre coins du sérail et le FLN, cet héritage de tous les Algériens a, au lieu de servir les seuls intérêts des citoyens, viré sa cuti pour devenir l'unique porte-parole de la grande muette dont sont descendues en effet les têtes pensantes de l'armée des frontières. Celle-ci aurait déjà scellé le destin de l'Algérie dès la cessation des hostilités le 19 mars 1962.

La deuxième étape fut sans l'ombre d'un doute le piège tendu à la mouvance islamiste afin de l'acculer coûte que coûte à l'usage de la violence au lendemain de l'arrêt du processus électoral en 1992 en faveur d'un «réordonnancement» méticuleux de l'intérieur de la maison mise sens dessus-dessous par les diverses tergiversations, manipulations, et désordres politiques. Période durant laquelle une caution morale en la personne du révolutionnaire Mohammed Boudiaf a été appelée de l'extérieur pour entériner les frasques du régime en place. En vérité, si le F.L.N fut l'ancêtre paternel de l'État algérien, l'islamisme en serait le fils adoptif car la décrédibilsation du fait politique par le régime a généré en contrepartie la méfiance du vieux parti et une islamisation rampante dans ses instances. Ainsi l'opposition a-t-elle commencé à se structurer et à se fortifier dans ses rangs. Pour preuve, l'alignement des positions de Mehri sur celle des réconciliateurs de la plateforme de Sant'Egidio à Rome en janvier 1995 a été une initiative courageuse, un pari plus que salutaire pour l'image de marque du parti et un coup de grâce sans merci pour la nomenclature dirigeante. Raison pour laquelle toutes les démarches des éradicateurs pour faire capoter l'initiative de négociation avec le parti dissout sur fond de mobilisation populaire sans précédent ont fait chou blanc devant le désenchantement de la communauté internationale à l'époque. Néanmoins, le régime, ailé par l'establishment militaire, fut contraint après l'éviction de Mehri de son poste de secrétaire général du FLN en 1996 par «un coup d'État scientifique», de créer le RND, «le bébé qui porte des moustaches» comme ironisent la plupart des algériens afin de contrecarrer la suprématie de la politique et de dégonfler la bulle des idées qu'elle contient.../...

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