Algérie

Céréaliculture : entre le bon grain et l'ivraie, des chiffres controversés



Alors que la campagne labours-semailles est en préparation, le bilan officiel de la céréaliculture 2009-2010 n'est toujours pas annoncé.

Le directeur général de l'OAIC s'était avancé en parlant d'une production record. Le ministère de l'Agriculture est plus prudent.

« Pour la deuxième année consécutive, l'Algérie n'importera pas de céréales en 2010 en raison d'une production locale record de près de 61 millions de quintaux, a annoncé jeudi 22 juillet, le directeur général de l'Office interprofessionnel algérien des céréales (OAIC), Nouredine Kahal ». Cette information publiée et reprise, et non démentie, avait laissé croire que l'Algérie avait atteint l'autosuffisance dans le domaine de la production céréalière, toutes variétés confondues. En réécoutant, certaines de ses déclarations fin juillet à la radio nationale, M.Kahal avait quelque peu nuancé son propos. En 2009, « nous avons enregistré une production céréalière record avec près de 61,5 millions de quintaux. Pour l'année en cours, la récolte s'annonce bonne pour les blés dur et tendre». Un mois plus tôt, il déclarait, toujours à la radio, que «l'Algérie importera de moins en moins de blé tendre dans les années à venir».

 Le record de 2009, s'il se réédite, ne concerne pas toutes les variétés. Loin s'en faut. Et quand l'OAIC va sur le marché international, il ne communique pas. Si les traders étrangers et leurs Etats respectifs savent ce que fait l'Algérie et son Office sur ce marché, les Algériens, eux, n'en savent pas grand-chose. En bout de parcours, ils se contentent d'avoir à disposition de la farine, du pain et les autres produits dérivés qui sont encore loin d'être à 100% «made in Algeria».

Ainsi, selon l'agence Reuters, le 24 juin dernier, «l'Office algérien des céréales (OAIC) a acheté 400.000 tonnes de blé meunier d'origine optionnelle pour des embarquements en août au prix de 194,50 dollars/tonne coût et fret». Les traders européens, source de cette information, indiquaient que «l'origine de la marchandise sera vraisemblablement française mais le prix, considéré «très bas» par le négoce, montre la nécessité de «discounter» le blé français pour le vendre sur le marché mondial».

 Quelques semaines auparavant, l'Office exportait – pour la première fois depuis 1967 - 10.000 tonnes d'orge vers la Tunisie. Cela étant, dans ce type d'activité l'OAIC est dans son rôle de régulateur du marché national.

w Le «BRS»

Au niveau de la collecte des récoltes, l'OAIC agit par l'entremise des coopératives des céréales et légumes secs (CCLS). Sur un million d'agriculteurs que compte l'Algérie, près de 600 000 cultivent des céréales, selon l'OAIC. Annuellement, 3,25 millions d'hectares sont cultivés en céréales, soit 40% de la surface disponible. Les céréaliers vendent leur production à des opérateurs privés et surtout aux CCLS dont les capacités de stockage déclarées sont de 35 millions de quintaux. Lorsqu'ils s'adressent aux CCLS, les choses ne sont pas toujours transparentes, au plan de la communication. Des céréaliculteurs d'Aïn Témouchent ont contesté auprès de la Chambre de l'agriculture des chiffres rendus publics au journal télévisé de l'EPTV. La direction des services agricoles de la wilaya annonçait 1,2 million de quintaux tandis que les agriculteurs eux, calculs détaillés à l'appui, donnaient 650 000 quintaux. Du simple au double ! Quel chiffre figurera sur le « BRS » (Bordereau Récapitulatif des Stocks) ? C'est le «BRS» transmis aux autorités hiérarchiques qui va permettre d'établir le bilan national de la campagne moisson 2009-2010. Selon des spécialistes du secteur, aujourd'hui à la retraite, les wilayas céréalières (Sétif, Constantine, Tiaret, Tissemsilt) n'auraient pas obtenu de bons résultats. Ils ont appris avec étonnement la réception par les CCLS, en juin dernier, de «plus de 27 millions de quintaux de céréales dont 57% de blé dur». Selon eux, l'information est trop générale, trop vague. Quels chiffres vont figurer sur les stratégiques «BRS» ? Le sujet semble délicat puisque la publication du bilan final de cette campagne n'est encore intervenue.

1 000 milliards de DA pour 2010-2014

Va-t-on au moins égaler le chiffre officiel global de l'année dernière, soit 61 millions de quintaux ? On attend de savoir ce que vont dire les « BRS », une fois la synthèse nationale effectuée. Un confrère écrit que « les services du ministère veulent présenter un bilan qui refléterait les directives du chef de l'Etat ayant recommandé aux responsables du ministère d'inciter les agriculteurs à réduire les quantités de l'orge et renforcer la production du blé ». Et si la production de cette saison n'allait pas dans ce sens ? Irait-on jusqu'à faire mentir les chiffres ? Pour le moment, on se repose sur les lauriers de 2009. L'exposé du ministre de l'Agriculture Rachid Benaissa au président Bouteflika fait ressortir en 2009 «une croissance importante, notamment en matière de céréales ». Dans le cadre du plan quinquennal 2010-2014 et de la mise en Å“uvre de la politique de Renouveau agricole et rural, il est prévu un plan mobilisant 1000 milliards de dinars.

Au terme de l'audition du ministre, fin août dernier, le président de la République a lancé un appel à «la mobilisation des agriculteurs, éleveurs et opérateurs économiques pour assurer le succès de la mise en Å“uvre du plan quinquennal et relever le défi de la sécurité alimentaire, composante indissociable de la souveraineté nationale». Avec la poursuite du soutien de l'Etat, de bonnes conditions climatiques et une administration efficace et transparente, il n'y a pas de raison que de nouveaux succès agricoles ne soient pas réalisés.




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