Algérie

Centre de tri de déchets ménagers à Tizi Ouzou: Un projet à l’abandon



Centre de tri de déchets ménagers à Tizi Ouzou: Un projet à l’abandon




Après dix ans de démarches, le projet de centre de tri de Tizi Ouzou est tombé à l’eau, alors que la wilaya continue
à générer 1.000 tonnes de déchets ménagers/jour.

La wilaya de Tizi Ouzou est qualifiée de région la plus sale en Algérie avec à son compte plus de 1.360 décharges sauvages de déchets ménagers et autres ordures diverses, comme le rapportaient récemment des médias nationaux, se fiant à une étude lancée par des brigades de la protection de l’environnement relevant de la Gendarmerie nationale.

Un constat amer mais véridique. Imprégné de la gravité de la chose, avant même que cette wilaya n’atteigne une telle ampleur en matière de saleté, M. Hallalou Abderrahmane, investisseur vivant en Europe où il a acquis de précieuses connaissances dans le domaine du tri et de recyclage des déchets, entame des démarches auprès des autorités du pays et de sa wilaya natale pour un projet d’investissement dans cette optique qu’il maîtrise le mieux.

Notre écologiste sera d’autant plus motivé par le projet du chef de l’Etat, Abdelaziz Bouteflika, qui a donné suite à ses requêtes en 2007, puis en 2010 et en 2011. Devant un tunnel bureaucratique qui se boucha subrepticement au moment de la concrétisation de son projet, Abderrahmane Hallalou ne voit pas de solutions hormis de s’adresser par lettre ouverte, comme dernier recours, aux plus hautes autorités du pays.

Il relate ainsi ses pérégrinations en expliquant que tout à commencé un certain 19 décembre 2000, lorsqu’il reçut un courrier de la part du ministre délégué chargé de la communauté nationale à l’étranger et de la coopération régionale, Abdelaziz Ziari, qui incitait l’élite intellectuelle algérienne établie à l’étranger, à apporter sa contribution au développement du pays.

L’auteur de la lettre indique avoir décidé alors, en 2002, de se rendre en Algérie où il découvrit que le pays était dévasté par des déchets visibles et invisibles. Il entamera ensuite des enquêtes sur le terrain, qui auront duré deux années, en filmant les dégâts causés par la non gestion des déchets. Delà, il développera son projet de centre de tri d’ordures ménagères (CTOM).

Invité en 2004 en France par l’ambassadeur d’Algérie dans ce pays pour assister à une conférence-débat du conseiller du président de la République pour les affaires économiques, Hamid Temmar, sous l’intitulé «Etat et perspectives de l’économie algérienne», M. Hallalou précise qu’il a été motivé davantage à entamer ses démarches après avoir été rassuré par le conférencier sur sa disposition à le recevoir et mieux l’orienter vers les services concernés pour opérer vite, devant l’urgence de lancer un tel projet. Ainsi rassuré, le promoteur pour un centre de tri des déchets prendra part à de nombreuses réunions avec la direction de wilaya de l’Environnement et le service d’hygiène de l’APC de Tizi Ouzou.

En 2006, rédigeant alors son projet, il remit tout le dossier de ses travaux à la direction de l’Environnement à Tizi Ouzou dont il obtint l’aval pour le lancement de son centre. Il dépose aussi une copie de l’étude technico-économique au Comité d’assistance à la localisation et à la promotion de l’investissement et de la régularisation du foncier (Calpiref) en vue d’obtenir un terrain d’assiette. De son côté, cette institution donnera son avis favorable à l’investisseur en lui affectant un terrain, cédé «aux enchères restreintes» à Oued Falli, au sud de la ville de Tizi Ouzou, «conformément à la réglementation en vigueur».

Le 22 janvier 2008, M. Hallalou est informé par la direction de l’environnement que son offre a été retenue à la suite de la mise en «adjudication restreinte», tenue une semaine auparavant, l’invitant à entreprendre toutes les démarches nécessaires pour la concrétisation de son projet, qualifié de premier du genre dans la wilaya, et dont elle attendait qu’il contribuera grandement à la résolution d’une partie de la problématique de gestion des déchets.

Les services de cette direction rassurent le promoteur qu’ils resteront à sa disposition pour l’accompagner dans l’aboutissement de son projet en lui faisant remarquer dès lors que les 67 communes de la wilaya lui offriraient de grandes opportunités en matière de collecte et de traitement de déchets dont le «gisement» est estimé à 1.000 tonnes/jour.

Se rapprochant, le 16 décembre 2008, de la direction des domaines pour finaliser l’affectation, M. Hallalou reçoit de celle-ci l’attestation de la concession d’une superficie de 15.000 m² retenue par le Calpiref. L’attestation lui est remise pour lancer son projet en attendant la délivrance de l’acte de concession.

Ainsi, à l’issue de plusieurs années de travail (2006 à 2009) au service de documentation du ministère français de l’environnement, notre promoteur entamera ses travaux de concrétisation, notamment l’acquittement de la concession du terrain, le bornage, l’établissement d’études d’impacts, plans d’architecture, études et agencements du Centre par les fournisseurs des machines de tri, achat d’ouvrages et supports traitant des problèmes environnementaux, participation à des salons à l’étranger, notamment en Europe, etc.

Et les déboires commencent !

A l’issue de 8 années de pérégrinations (4 à 5 voyages par an, signale-t-il) entre le pays hôte et sa patrie natale, l’Algérie, et en quelques mois seulement, M. Hallalou perçoit un écho s’ébruitant quant à la «réaffectation de terrains d’investissement privé pour autre chose, sans tenir compte de ceux déjà acquis», déplore-t-il dans sa lettre. Il tente alors de se rapprocher des autorités concernées pour leur faire part de ses déboires et désagréments, en vain.

Il sera conseillé alors d’aller voir le wali de Tizi Ouzou (au temps de Hocine Mazouz), avec lequel le promoteur indique avoir eu pas moins de 6 entretiens, mais à aucun moment celui-ci ne lui avait fait part de sa nouvelle vision quant à la réalisation d’un centre de tri juste à 200 mètres du site où il devait mettre en place son unité.

En novembre 2011, il se présente à la direction de l’environnement dans l’espoir de découvrir quelque avancée concernant son projet. Sur place, il lui est fait part par écrit en date du 15 novembre 2011, que son dossier, déposé en juin 2008 pour étude d’impact sur l’environnement et étude de dangers, «n’a pu être examiné du fait du non aboutissement de la procédure d’acquisition du terrain auprès des services des domaines».

«L’instruction technique des études d’impact et de dangers reprendra dans le cas où la contrainte d’assiette foncière venait à être levée», lui fera-t-on savoir.

Depuis 2006, notre investisseur se déplace sans cesse pour mieux avancer en passant voir les services concernés (municipalités, associations, comités de quartiers, écoles et surtout la direction de l’environnement et des domaines) mais sans jamais avoir été mis au courant du moindre chamboulement administratif quant aux éventuelles modifications de POS (plan d’occupation des sols).

Aussi, à travers son écrit, M. Hallalou veut interpeller les hautes autorités du pays quant à cette volonté d’une administration qui veut l’avoir en usure en vue d’abandonner son projet.

«Il est temps que chacun assume ses responsabilités et ses engagements, en se mettant au travail, tel qu’ordonné et tracé par la feuille de route du président de la République et des ministres de son gouvernement», clame-t-il, avouant en conclusion qu’il «espère que les récents discours de nos ministres quant à leur volonté d’assainir tous les problèmes ayant trait à l’environnement dans notre pays puissent se concrétiser dans les faits» et lui permettent ainsi de «trouver des solutions à l’amiable» en vue d’arrêter la procédure judiciaire qu’il a engagée face aux entraves et blocages rencontrés par son projet pour lequel, dit-il, «j’ai mobilisé, des années durant, l’essentiel de mon énergie».


Salah Yermèche



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