Au commencement est le paysage, un essai signé Sabiha Benmansour. L’auteure, en sa qualité d’universitaire, a consacré le plus grand de sa recherche à l’exploration minutieuse de l’œuvre pluridimensionnelle de Mohammed Dib, et son engouement pour cet écrivain de notoriété établie tant en Algérie qu’en Europe et aux USA, la conduira chemin faisant à fonder, avec le consentement de l’écrivain, l’association La Grande Maison dont elle est la présidente.
Dans le même mouvement de reconnaissance honorifique, elle instituera le prestigieux prix Mohammed Dib. Au commencement est le paysage – paysage de Tlemcen – est reçu en premier lieu comme une déclinaison explicative et argumentative de Tlemcen ou les lieux de l’écriture (1994) où l’iconographie de la ville conjuguée aux segments textuels qui l’accompagnent décline une mémoire toute singulière du site d’où se dégagent nécessairement des manifestations de l’affect, fruits de l’introspection de soi et des interrogations existentielles.
Sabéha Benmansour se livre alors à la lecture croisée des photos (celles de Dib photographe amateur et celles de Philippe Bordas photographe professionnel) et des mots qui coulent de la plume de Dib pour élucider au mieux et en profondeur ce que recouvre Tlemcen – la ville et ses alentours – dans l’imaginaire dibien, comment la cité dans sa morphologie et ses stratifications historiques, sociales, culturelles, anthropologiques, s’impose comme la source vive où s’abreuve l’art scriptural de Dib par lequel la simple description réaliste devient une invitation à capter le métalangage qui s’y inscrit.
Tlemcen intériorisée
C’est cela même que recouvre le titre Au commencement est le paysage, car «le paysage s’entend comme cadre où l’être vient à la vie puis à la conscience. A la fin aussi».
Paysage comme lieu focal initial qui s’ouvre alors à la productivité sémantique et discursive.
Dans un mouvement conjoint, Tlemcen intériorisée est ce par quoi l’écrivain extériorise son moi intime et définit sa relation au monde, expression d’une extranéité qui fait se conjuguer et se répondre les particularismes de l’ici et de l’ailleurs. Sabéha Benmansour embrasse ce vaste ensemble pour le décrire au moyen d’une démarche graduelle à valeur démonstrative, soutenue par des références livresques multiples qui viennent en appui.
Ainsi parvient-elle à imposer l’image de Tlemcen incontournable en indiquant comment la ville, lieu de l’ancrage, irradie – de maintes manières et parfois par le seul effleurement – toute l’œuvre, même lorsque les récits recouvrent les lointains espaces de la Tétralogie nordique.
Mieux encore, subtilement, l’empreinte de la ville se moule avec souplesse dans la langue d’écriture, langue française qui devient, à l’insu du lecteur non averti, le véhicule de formes langagières propres au lieu des origines et de leur phrasé, quand cette langue d’adoption n’est pas ostensiblement le support des chants et mélodies du terroir tlemcenéen. Au commencement est le paysage de Sabiha Benmansour s’avère, autant que Tlemcen ou les lieux de l’écriture de Mohammed Dib, un hymne – hommage à Tlemcen, la ville-source, la ville-substrat, de l’imaginaire romanesque de Mohammed Dib.
La Ville de présence pérenne et de valeur patrimoniale établie est, dans une sorte de relais, ce que cultive inlassablement et avec abnégation Sabéha Benmansour.
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Posté Le : 07/04/2021
Posté par : tlemcen2011
Ecrit par : Par Afifa Brerehi Dr en langue et littérature fraçaise à l’université d’Alger
Source : El Watan