Algérie

Cela s'appelle l'aurore



Cela s'appelle l'aurore
La quiétude a déserté la vallée du M'zabC'est dans cette mentalité craintive et recroquevillée sur elle-même, que naît la notion d'orthodoxie formelle outrageusement perméable à tous les déchets idéologiques, à toutes les superstitions qui couvent dans le subconscient des couches ignorantes.L e M'zab se rappelle à notre bonne conscience cette semaine. Pour plusieurs raisons d'ailleurs dont la plus importante demeure incontestablement cette accusation lourde de sens portée par le Conseil des notables contre de cyberactivistes. Un cri de détresse, convient-il de préciser ici, qui se doit d'être entendu par les autorités invitées d'ailleurs à appliquer strictement les lois pour protéger l'histoire et la mémoire de tout un peuple. En s'adressant directement à la presse nationale à travers une longue déclaration, cette haute instance interpelle et l'opinion publique et l'Etat autour des tragiques événements vécus dans sa chair par la population de la région. Tout en se félicitant de l'implication particulièrement efficiente des pouvoirs publics dans la prise en charge et la normalisation de la situation qui y prévaut, les auteurs de l'appel mettent l'accent sur la nécessité de maintenir la pression à l'effet d'assainir davantage une situation qui, de leur point de vue, reste sensiblement précaire. Les préoccupations du Conseil des notables corroborent pleinement celles dévoilées par Cheikh Belhadj Nacereddine dans un entretien accordé au quotidien électronique Algérie Patriotique: «Il y a un tel cumul de problèmes et de ressentiments chez les habitants des deux communautés qu'il fallait s'attendre à une forte déflagration. Des cris d'alarme et des avertissements ont été lancés par des sages qui ont tenté d'attirer l'attention des hautes autorités du pays sur le pourrissement de la situation et sur l'absence de l'ordre public dans le M'zab, tombé entre les mains de bandes mafieuses qui font la pluie et le beau temps sans qu'elles ne soient inquiétées.» Il y avait, avant le redéploiement des forces de sécurité, une faillite sécuritaire, du laxisme et de l'amateurisme que le notable justifie aussi par le manque de compréhension de ce qui est réellement la source des tensions. Curieux, sont à ce niveau les propos du notable qui fait référence à une source des tensions tout en réfutant la thèse de la main étrangère: «Ahmed Ouyahia n'est pas le seul à l'agiter. D'autres voix au pouvoir l'ont déjà fait. Cette vieille rhétorique est ressortie à chaque aggravation de la situation. Mais je pense qu'on n'a pas besoin d'une force extérieure pour arriver à une telle catastrophe.» L'invité du journal électronique donne l'impression d'être naïf et son jugement lapidaire n'est pas fait pour inciter à la pondération, donc à la réflexion. Les forces hégémoniques procèdent désormais d'une autre façon. La guerre classique n'est plus de mise, remplacée qu'elle est par la guerre civile permanente, l'instabilité et l'agitation. Les «Printemps arabes» procèdent de cette même logique et ce n'est pas sans raison si le Conseil des notables du M'zab demande avec insistance aux autorités de sévir «contre ceux qui sèment la haine et la discorde à travers les réseaux sociaux et continuent à inciter à la violence contre les ibadites par des fatwas jetant de l'opprobre sur toute une communauté». Le rôle des réseaux sociaux dans le «Printemps arabe» a été très exagéré, notamment par les médias occidentaux. Dans Réseaux sociaux et révolutions arabes, Mounir Bensalah assimile la révolution Facebook/Twitter à un mythe et un fantasme nés de raccourcis journalistiques: «Ils ont indéniablement accompagné ce qu'on appelle les révolutions arabes, puisqu'ils ont servi à mobiliser, à informer et à s'informer. Voire à attiser la colère.» Dans leur deuxième revendication, les sages de Ghardaïa réclament «des lois strictes pour protéger l'histoire et la mémoire nationales contre les campagnes de dénigrement mettant en doute le patriotisme des Mozabites». Ils attendent aussi de l'école qu'elle contribue à «la sensibilisation du citoyen sur le respect de tous les rites et à la lutte contre les idées néfastes des takfiristes». Pour les sociétés trop tôt essoufflées par l'effort créateur, par l'Ijtihâd, il y a une autre sorte de résistance, et celle de la catéchisation est non des moindres estimait, à juste titre, cheikh Brahim Bayyoud. D'autant que certains réfractaires se replient derrière l'immunité du dogmatisme pour agir avec perfidie. C'est dans cette mentalité craintive et recroquevillée sur elle-même que naît la notion d'orthodoxie formelle outrageusement perméable à tous les déchets idéologiques, à toutes les superstitions qui couvent dans le subconscient des couches ignorantes. La presse est au centre des préoccupations du Conseil des notables, invitée qu'elle est à être plus objective et à éviter de «colporter les rumeurs tendancieuses qui servent les intérêts des forces qui souhaitent du mal au pays et attenter à sa stabilité et à sa sécurité». Plus sourcilleux, les rédacteurs de l'appel souhaitent que la presse nationale soit plus objective dans le traitement de cette situation et plus circonspecte dans «l'usage de certaines appellations réductrices, susceptibles de jeter de l'huile sur le feu et d'attiser davantage les rivalités entre les enfants de la même région». Les correspondants locaux font l'objet d'une attention particulière, interpellés qu'ils sont pour mener des enquêtes et réaliser des reportages sur la gestion locale à l'origine, semble-t-il, de tous les maux vécus par la région. Le message vise-t-il cette camarilla systémique qui serait devenue un centre de décision d'où les Mozabites seraient exclus' Bien qu'ils se félicitent de l'amélioration de leur situation objective, nombreux sont les Mozabites qui soutiennent qu'un traitement purement sécuritaire n'est pas de nature à faire évoluer les choses. Sitôt le calme rétabli et les forces de sécurité réduites, il est à craindre une recrudescence qui mènera inexorablement aux agressions, aux rackets et aux destructions des biens d'autrui. Pour cheikh Belhadj Nacereddine, le mal est tellement profond qu'il est impossible de résoudre la crise en un simple tour de vis sécuritaire. A la question de savoir «que faut-il faire pour ramener durablement le calme et la paix dans la Vallée du M'zab'», l'invité d'Algérie Patriotique a eu cette réponse pleine de sagesse: «Il n'y a pas de recette miracle. Ghardaïa souffre d'un déficit de développement et de l'absence d'une économie locale capable de créer de la richesse et de l'emploi. L'Etat doit revoir sa politique de développement local. Il faut créer des emplois et construire des logements pour permettre aux gens de vivre sans éprouver de ressentiment envers autrui.» Le Conseil des notables du M'zab ne terminera pas son communiqué sans faire la part belle à la solidarité nationale agissante que le peuple algérien a témoignée aux citoyens du M'zab dans le cadre de la restauration «de la fraternité et la tranquillité dans la Perle du désert, aujourd'hui meurtrie», mais ressuscitée de fort belle manière par ce même élan de sympathie et de générosité...




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