Algérie

Ce qui devait arriver arriva !


L’explosion de la rue, que tout le monde pressentait depuis quelques années, est finalement survenue. L’impression de déjà vu, de bégaiement de l’histoire, de gâchis avéré suscite des sentiments de dégoût, de lassitude et de colère, ingrédients détonants dans une réalité en déréliction.
Tout le monde perçoit plus ou moins les raisons immédiates de la colère. La cherté de la vie, le chômage endémique, l’injustice sociale, l’empilement en couches géologiques des problèmes jamais résolus et des questions toujours en suspens. C’est aussi ces scandales gargantuesques qui provoquent la nausée, ces trahisons d’une certaine élite, ces lâchetés multiples, ce cancer de la corruption qui a gangrené le corps entier de la société et beaucoup d’autres choses encore qui sont venues à bout de la patience d’un peuple en déshérence.
Mais c’est aussi cette incroyable arrogance de l’incompétence économique qui a réduit la gouvernance des richesses du pays à du tripotage des lois où les fausses promesses, les mauvais choix et l’absence de toute vision font office de programmes incohérents et parfois absurdes ! Après les dépenses de centaines de milliards de dollars en dix ans –argent faut-il le préciser, provenant d’une manne naturelle – nous en sommes toujours au même point : 99% de nos devises sont assurées par le pétrole ! Comme le disait Alberto Moravia, «pour gagner de l’argent, il faut une compétence, pour le dépenser, il faut une culture». Il est clair que la compétence n’était pas au rendez-vous, l’Algérie ne gagnant rien par ses propres efforts. Quant au deuxième terme de la sentence, chacun peut se faire son idée. De tous les bouts par lesquels nous pouvons prendre le problème, la responsabilité remonte au président de la République. Si les jeunes s’expriment dans la violence et le nihilisme, détruisant au passage autant les biens publics que privés, ils se mettent également eux-mêmes en grand danger.
A l’heure où ces lignes sont rédigées, deux de nos concitoyens sont décédés (que leurs parents et proches acceptent nos sincères condoléances). Espérons que cette liste s’arrêtera. Et contrairement à ce qu’a pu dire l’un des membres de ce gouvernement, ces jeunes n’avaient aucun autre moyen pour dire leur souffrance. La vie politique est pratiquement sous scellés, les syndicats indépendants muselés, la presse surveillée, les manifestations pacifiques interdites… Même la «harga» a été traitée par les autorités soit par le mépris (qualifiée de «mode») soit par la répression.
En s’asseyant sur le trône, Monsieur Bouteflika a immédiatement informé qu’il ne sera pas un trois quarts de président en assumant tous les pouvoirs, ceux, régaliens, de l’Etat mais aussi ceux de l’économie, de l’APS et de tous les autres démembrements de l’Etat. Rien ne devait faire obstacle à sa volonté, ni celle du peuple ni celle d’aucune institution, la Constitution n’étant là que pour se plier à ses propres désidératas.
Aujourd’hui, Monsieur Bouteflika doit tirer les conséquences de sa politique. L’Algérie doit faire repentance en revenant à tous ses enfants. La vie politique doit être permise à tous les citoyens dans le cadre de lois démocratiques. Organiser le débat politique, la saine compétition des compétences dans le cadre de l’Etat de droit reste l’unique solution structurelle pour le pays. Construire de vraies institutions et un vrai Etat, voilà de nobles objectifs.
En attendant, pour tous ces jeunes qui ne croient plus en rien, il faut un message vrai. Il faut immédiatement réorienter la politique économique vers la production tous azimuts en assurant une couverture sociale réaliste mais juste. Il faut ouvrir un vrai horizon d’espoir. L’argent existe largement pour cela. Il est préférable de le «risquer» dans une telle entreprise que de le condamner en pure perte au profit des puissances étrangères qui ne pourront rien, de toutes les façons, pour maintenir ce régime.
L’Algérie a besoin d’un vrai acte de patriotisme. C’est à cette aune que l’histoire retient ses héros.
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