Annonçant la couleur dès sa nomination, le nouveau premier ministre, Abdelmalek Sellal, a indiqué que l'objectif principal de son gouvernement sera «la poursuite de l'application du programme du président de la République sur le terrain», ce qui était déjà l'objectif de son prédécesseur.
Mais, pour les acteurs et les observateurs de l'économie nationale, il y a des actions prioritaires et des chantiers à lancer ou à mener à bien qui doivent être pris en charge rapidement.
Pour le secrétaire général de la Confédération générale des entrepreneurs algériens (CGEA), Mahfoud Megatli, avant de se lancer dans de nouveaux chantiers, l'urgence réside dans «la mise en 'uvre des résolutions des dernières tripartites, qui s'avère très lente notamment dans son aspect lié aux rééchelonnement des dettes bancaires». Certes, des actions ont été entreprises en matière de «prise en charge des dettes fiscales, mais globalement et dans l'exécution des décisions il y a un grand retard et donc la nécessité d'aller plus rapidement».
Qualifié de «technocrate», le nouveau gouvernement dispose ainsi de l'avis de Zaïm Bensaci, président du conseil national de promotion de la PME de tous «les ingrédients qui doivent lui permettre la concrétisation de véritables projets», mais sa priorité devra être de «redonner la préférence au secteur productif national». Un secteur éprouvé, qui n'a pas tant besoin de «protection» que de «promotion», soutient M. Megatli. En la matière, il y a «des décisions rapides à prendre» comme la révision du système tarifaire par exemple, car «il n'est pas normal qu'on taxe un produit fini et la matière première servant à sa fabrication au même taux».
Le nouveau Premier ministre a reconnu lui-même l'ampleur de la tâche qui l'attend, en affirmant : «Nous avons du pain sur la planche». Car, outre l'objectif de mener à terme d'ici 2014 les projets inscrits dans le cadre du plan présidentiel de 286 milliards de dollars, d'autres actions non moins prioritaires sur le plan économique sont à prendre. Pour l'économiste Camille Sari, il s'agit tout d'abord de la diversification de la production nationale et des exportations, car «quand on dépend à 98% d'un seul produit, c'est dangereux dans le cadre de l'instabilité qui caractérise l'économie mondiale».
A côté de la diversification figure le chantier du tourisme qui doit se focaliser non seulement sur l'attraction des touristes étrangers, mais également sur «la fidélisation des Algériens eux-mêmes». M. Sari souligne également la nécessité d'entreprendre des actions pour encourager la communauté des Algériens à l'étranger à mettre ses ressources au service de l'économie nationale. «On peut drainer jusqu'à 5 à 6 milliards d'euros de revenus. Or, actuellement, ils passent par le circuit informel». En parallèle, le gouvernement devra prendre en charge le problème de «la fuite des capitaux qui a pris des proportions alarmantes ces derniers temps», souligne l'économiste. Ceci étant lié aux printemps arabes et aux risques de contagion qu'il a engendrés, explique-t-il.
Souci de prudence
Outre tous ces dossiers auxquels il faut ajouter celui de l'informel, de la corruption et du chômage, le nouveau gouvernement sera confronté à la problématique de devoir atteindre un équilibre budgétaire tout en maintenant un même niveau de dépenses publiques d'équipements. Le ministre des finances, Karim Djoudi, a laissé entendre que le mot d'ordre pour le prochain exercice budgétaire sera la prudence, mais le gouvernement n'envisage pas pour autant des coupes dans les subventions à l'économie, dans les transferts sociaux ou même dans les dépenses d'équipements, alors même que le marché pétrolier mondial n'est pas à l'abri d'une chute et que l'on annonce déjà une hausse des prix des produits alimentaires. Autant dire que face à une rentrée sociale comme à l'accoutumée houleuse, l'option de la redistribution de la rente pour calmer la rue atteindrait vite ses limites.
Concilier prudence et dépense s'annonce donc un exercice difficile pour le nouvel exécutif, d'autant que les 286 milliards de dollars du plan quinquennal ne servent pas, comme l'ont déjà souligné bon nombre d'experts et d'acteurs économiques, la relance de la production ou la remise à niveau de l'industrie. Or, affirme M. Sari, injecter autant d'argent dans les équipements publics «coûte aussi bien en fonctionnement qu'en maintenance». Par ailleurs, dit-il, «un gouvernement qui se respecte ne doit pas raisonner sur 5 ans, mais se projeter sur 20 à 30 ans et faire des choix en fonction de l'intérêt général et des générations futures».
La prudence prônée par M. Djoudi peut répondre à ces deux préoccupations, même si elle semble plus dictée par les données de la conjoncture mondiale que découlant d'un choix délibéré. Elle suppose néanmoins en matière de distribution de la rente une démarche repensée, selon M. Sari. A ce titre, explique-t-il, «il faut maintenir les subventions pour protéger les plus faibles et ne pas lésiner sur les aides à la santé, à l'éducation, aux formations techniques, à condition que cela rapporte par la suite». En parallèle aux subventions, la politique budgétaire doit néanmoins s'accompagner d'une «taxation des produits de luxe», indique l'économiste. Selon lui, «il faut équilibrer le budget par le prélèvement de l'impôt, en faisant payer les plus riches et en imposant par exemple un impôt sur les grandes fortunes».
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Posté Le : 10/09/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Safia Berkouk
Source : www.elwatan.com