Le mot «ouverture» a été prononcé par le chef du gouvernement au sujet de l'audiovisuel. Il faudra pourtant se contenter de cela comme « progrès » par opposition au « niet » en vigueur dans ce domaine. Le pouvoir algérien semble avoir compris qu'il ne gagne rien en termes d'image à dire crûment « non » alors que la bonne vertu de la langue de bois politique permet de l'enrober dans de vagues promesses. Au lieu de dire niet à l'ouverture, on développe un discours sur la « préparation » de l'ouverture qui, dans le cas de l'Algérie, promet de durer tant que le verrou politique reste mis. On devra se contenter de la promesse d'ouverture à défaut d'avoir l'ouverture. Â C'est dit, dans l'inimitable langage politico-administratif: les réformes engagées « visent à mettre en place un dispositif technique et organique régissant le processus d'ouverture de l'audiovisuel » et « le gouvernement aura à déterminer des phases de préparation et de transition en vue de réunir les conditions nécessaires à la réussite de ce projet ». Nul n'est en mesure de dire encore le temps qu'il faudra pour que le « processus d'ouverture » s'accomplisse, ni la nature de la « transition » dont il est question. Cela veut dire que le pouvoir n'est pas « prêt » et que le secteur de l'audiovisuel devra attendre longtemps les premiers signes de frémissement. Â A croire que nos gouvernants n'observent pas ce qui se passe, là, juste à côté. Ils paraissent obnubilés par le fait que la télévision publique continue d'être regardée et semblent en tirer argument en faveur de l'immobilisme. En réalité, les Algériens regardent dans toutes les directions et si la télévision nationale conserve des restes, cela tient au fait que l'offre qui vient du ciel ne répond pas aussi à un besoin d'information et de culture sur la vie locale. Jusqu'à preuve du contraire, par la concurrence s'entend, la télévision nationale résiste par défaut. Il ne sera pas dit qu'une offre ciblée à destination du public algérien ne viendra pas, elle existe déjà et elle existera encore davantage. C'est tellement « visible » déjà que cela rend inexplicable le glacis audiovisuel algérien au coeur du Maghreb. Â Les dérivatifs fondés sur une multiplication des chaînes publiques sont-ils une réponse alors que le paysage audiovisuel maghrébin bouge rapidement ? On peut en douter. Il ne sert à rien de revenir sur la pauvreté des arguments invoqués pour retarder l'ouverture de l'audiovisuel. C'est un veto politique qui dure depuis des années et qui porte la marque d'un mode de gouvernance incitateur à l'élan par le verbe et inhibiteur dans les actes. Ce report de l'ouverture audiovisuelle a un coût économique. Les médias audiovisuels des pays voisins sont en position de capter les grosses sommes de publicité qui pouvaient très naturellement avoir pour destination le marché algérien. Â On peut imaginer sans difficulté que ces fonds auraient contribué à créer une réelle activité dans le secteur de l'audiovisuel avec ses métiers, ses techniques à maîtriser et les incitations à la créativité. Même l'ENTV aurait gagné à baigner dans un contexte d'émulation et de concurrence. « Techniquement », disent les spécialistes, on est déjà en retard et le jour viendra où même la décision « d'ouvrir » n'aura plus de sens. Ce sera comme lancer des grands plans d'infrastructures sans avoir d'entreprises. On connaît déjà... C'est maintenant, si ce n'est déjà tard, que se dessine la possibilité d'avoir un secteur audiovisuel national. Cela suppose que le verrou qui freine l'élan vers la maîtrise et la créativité soit levé. Rien n'indique que ce sera le cas. « Il n'y a rien de changé », a dit le nouveau ministre de la Communication. Si quand même: Belkhadem parle « d'ouverture » pour dire que ce « n'est pas non, mais pas encore ». Ce qui n'est pas une consolation.
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Posté Le : 30/06/2007
Posté par : sofiane
Ecrit par : M Saâdoune
Source : www.lequotidien-oran.com