Algérie

CE MONDE QUI BOUGE La droite française et le 19 Mars



Par Hassane Zerrouky
Dix jours avant le 50e anniversaire du 19 Mars 1962, Nicolas Sarkozy s'est rappelé au bon souvenir des rapatriés d'Algérie et des harkis. Ces deux groupes représentent 3,2 millions d'électeurs potentiels. Pas question donc de laisser le terrain de la mémoire sélective à la seule Marine Le Pen, en tête, d'ailleurs, des intentions de vote parmi cet électorat nostalgique de «l'Algérie de papa». Vendredi passé, le président-candidat s'est donc rendu à Nice leur rendre un hommage appuyé. Extraits. Harkis d'abord.
«A l'époque, les autorités de la République française ne se sont pas bien comportées à l'égard de ceux qu'elles auraient dû protéger (…) Nous, les autorités, avons une dette vis-à-vis des harkis (...) mais je ne veux pas qu'elle soit portée par une communauté nationale qui n'y était pour rien (…) Je suis venu porter témoignage de cette injustice pour qu'au fond de vous-mêmes, les descendants des harkis, vous puissiez pardonner ce qui est arrivé à vos parents. Pour que vous puissiez pardonner, il faut que la République reconnaisse qu'il y a eu une injustice, qu'il y a eu une forme d'abandon, c'est fait. Maintenant, pardonnez parce que la République a besoin de vous (…) Les harkis et leurs familles ont le droit au respect. Insulter un harki, c'est insulter un soldat français», a-t-il conclu. Pieds-noirs ensuite. «Il nous faut reconnaître la part de responsabilité de la France dans l'abandon de nos concitoyens rapatriés et harkis en particulier dans les mois qui ont suivi cette date», a-t-il ajouté. Bien sûr, le candidat à sa propre succession s'est défendu de toute arrière-pensée électoraliste. «Quand je parle aux Français, je ne parle pas à des segments de Français, je parle à la communauté nationale. Je leur dis simplement que crier sa colère, ça ne soulage qu'un temps, qu'il faut construire. Et construire, ce n'est pas avec le Front national.» En 2007, Nicolas Sarokozy avait promis, s'il était élu, qu'il reconnaîtrait officiellement «la responsabilité de la France dans l'abandon et le massacre des milliers de harkis et d'autres milliers de musulmans français». Cinq ans après, le président-candidat, qui se refuse toujours à condamner le colonialisme qui, en tant que système, est un crime contre l'humanité, n'a pas l'intention de laisser ce terrain au Front national quitte, pour ce faire, à droitiser à l'extrême son discours politique. Certes, durant son mandat, il n'a pas fait adopter une loi mémorielle en faveur des rapatriés et des harkis. Mais il a fait des gestes et délivré des signaux à fort contenu symbolique qui montrent que sur le fond sa position sur la colonisation de l'Algérie n'a pas varié. Dès son retour d'une visite officielle en Algérie en décembre 1997, il a fait du 5 décembre, une journée nationale d'hommage aux combattants morts pour la France en Afrique du Nord. Courant septembre et fin novembre 2011, il a décoré des harkis et fait officier de la légion d'honneur Denoix de Saint-Marc, l'ancien putschiste du 22 avril 1961 contre de Gaulle et membre de l'OAS, l'ex-colonel du 1er REP (parachutistes étrangers) ! Et surtout, le 23 février dernier, il a fait voter une loi sanctionnant pénalement les «insultes» aux harkis ! En revanche, comme le rappelait Henri Alleg, l'ancien directeur d' Alger républicain et auteur de La Question sur la torture durant la guerre de Libération nationale, «on assiste à des choses incroyables, comme cette loi qui se félicite de la colonisation en Algérie et, pire, qui demande qu'on enseigne ce mensonge dans les écoles». Une chose est sûre, le cinquantième anniversaire ne préoccupe que la droite française. Pour conclure, si en France, le 50e anniversaire de l'indépendance de l'Algérie fait un retour remarqué émissions de radios et de télés, livres, films documentaires, colloques, débats contradictoires en Algérie, c'est silence radio. Comme si un demi-siècle d'indépendance au sortir d'une nuit coloniale de 132 ans et de la plus terrible guerre de décolonisation du XXe siècle était un évènement banal.


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