Algérie

«Ce coût est très pesant sur le budget de l'Etat»



«Ce coût est très pesant sur le budget de l'Etat»
- D'après des statistiques de la Banque d'Algérie, la facture des services du pays est passée de 4,78 milliards de dollars en 2006 à  11,90 milliards de dollars en 2010. Quelle est votre lecture '
Les importations de services sont en passe de s'ériger en véritable casse-tête et influent négativement notamment sur la balance des paiements du pays. La facture des services est synonyme désormais d'une véritable saignée. Elle a atteint pendant les trois dernières années les 11 milliards de dollars. A la lecture de la courbe représentant l'évolution de la facture des services importés par le pays, il est facile de constater une croissance significative notamment, sur la période 2006-2011.
L'évolution, en valeur, de l'importation des services est accompagnée par une importante sortie de capitaux de l'Algérie vers l'étranger. Le coût des services pour le pays dépasse aujourd'hui sa facture alimentaire et représente une réelle menace si les revenus venaient à  se rétrécir. Ces statistiques que vous venez de présenter, dont l'évolution est visiblement rapide, fait ressortir une croissance de plus de 6 milliards entre 2006 et 2010, un signe trop inquiétant surtout lorsqu'on sait que, se référant aux prévisions actuelles, la facture risque d'être encore plus salée à  la fin de 2011.
- Quel serait le risque d'une telle évolution sur le budget de l'Etat '
Ces statistiques commencent bel et bien à  susciter l'inquiétude des pouvoirs publics qui tentent tant bien que mal de se justifier en faisant référence aux différents programmes de développement lancés dans le cadre de l'actuel programme quinquennal. Cependant, il est à  remarquer que les bureaux d'études et sociétés étrangères sont pratiquement les seuls bénéficiaires de la plupart des opérations d'importation de services. Les transferts nets de capitaux vers l'étranger, du moins ceux qui étaient annoncés, étaient à  l'origine d'un déficit important de la balance des paiements. Cette évolution de la facture d'importation des services — près de 7 milliards de dollars en 4 ans — est intervenue au moment où le gouvernement tentait de colmater l'autre hémorragie liée à  l'importation des biens alimentaires et non alimentaires. Autrement dit, alors que le crédit documentaire, institué en 2008 comme seul moyen de paiement des importations, tentait de réparer la plaie, les services évoluent, eux, en valeur, de manière sensible. Il faut rappeler aussi que l'Algérie a exclu le chapitre des services de ses négociations en vue de parapher l'Accord d'association avec l'Union européenne et l'a inscrit dans son agenda d'adhésion à  l'OMC afin de pouvoir bénéficier d'un délai supplémentaire. Cependant, la libéralisation du secteur des services en Algérie s'annoncera impératif à  compter de 2013, ce qui exposera l'Algérie, à  nouveau, à  la situation d'incapacité de faire face à  la concurrence étrangère, étant donné que le pays ne dispose point des compétences nécessaires dans ce domaine pour faire face à  cette concurrence.
- L'expertise étrangère coûte-t-elle aussi cher '
Il y a trois constatations à  faire ; il faut relever d'abord les disparités flagrantes entre les rémunérations attribuées aux experts étrangers et qui sont fondées sur un système de rémunération international, tandis que l'expert algérien dépend d'un système de rémunération local. L e coût journalier d'un expert étranger oscille entre 1500 et 2000 euros, tandis que la rémunération d'un expert algérien va de 150 à  300 euros. Les avocats spécialisés dans le conseil sont rémunérés, eux, à  hauteur de 300 à  500 euros l'heure, d'après les organismes nationaux ayant l'habitude de recourir à  ce genre de services. Ceci, alors que les contrats conclus par des organismes et/ou sociétés algériennes et les cabinets d'études étrangers atteignent plusieurs millions d'euros ; la fourchette oscille entre 1 et 10 millions d'euros (seuil minimal), selon la nature des services. Ceci dit, ces contrats sont toujours assortis de rallonges budgétaires en relation avec les coûts de la restauration, de l'hébergement, du transport… etc.  Dans le détail, les contrats prennent en charge la rémunération de l'expert étranger (conseiller) selon l'expérience acquise (1000 à  1500 euros/jour pour un expert dont l'expérience est de moins de 3 ans), 1150 à  1900 euros pour le conseiller principal, 1500 à  3500 euros pour le gérant principal, tandis que l'associé perçoit de 1700 à Â  4500 euros. Outre les frais supplémentaires relatifs à  l'hébergement et au transport, la rémunération peut augmenter de 20 à  30% suivant les conditions que pose la partie étrangère.
Il faut préciser également que les revenus des cabinets d'études et d'expertise internationaux ainsi que des sociétés de réassurance sont estimés annuellement entre 3 et 4 milliards de dollars. Ce coût entre dans le cadre de la logique de la transformation des pétrodollars en importation de services, étant donné que le pays peine toujours à  produire une économie hors hydrocarbures.  
- Les programmes de développement lancés par le gouvernement peuvent-ils, à  eux seuls, justifier l'explosion de la facture des services '     
Il est attendu que la facture des services dépasse les 12 milliards de dollars cette année. Elle concerne notamment les services qu'apportent les cabinets d'études et d'expertise internationaux aux secteurs du transport aérien et maritime, du bâtiment et des travaux publics, à  celui des banques et assurances. Ce coût est très pesant sur le budget de l'Etat. Il est justifié soit par l'absence et/ou la faiblesse de l'expertise algérienne ou bien par le recours excessif à  l'importation des services.
Les cabinets d'expertise internationaux, à  l'image de KPMG, Gide Loyrette Nouel, Ernest & Young, gagnent des millions à  travers leurs filiales en Algérie ; le coût par individu et par jour dépasse souvent 1000 euros. Ces cabinets ont eu les marchés les plus importants en Algérie, dont, à  titre d'exemple, la stratégie industrielle algérienne attribuée au cabinet Ernest & Young, des études au profit du Crédit populaire d'Algérie attribuées à  KPMG ainsi que le recours de la Banque extérieure d'Algérie à  un autre cabinet d'étude français afin d'accompagner la modernisation des systèmes de management, de contrôle et de paiement. Nous avons constaté, ces dernières années, un recours excessif à  l'expertise étrangère dû à  la dépendance de l'Algérie de ces services notamment en matière de réassurance. Dans ce domaine, nous savons que les biens de Sonatrach et Sonelgaz, à  titre d'exemple, sont réassurés à  coups de millions d'euros annuellement auprès des compagnies de réassurance internationales, tandis que d'autres secteurs tels que le bâtiment et les travaux publics, les transports aérien et maritime, l'assurance et les finances monopolisent à  hauteur de 76% les importations de services.  
 


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)