Algérie

Carnet de voyage : Gratte-ciel et soupe de nouilles



Parti de la biennale des «Carnettistes», un groupe d’artistes surnommés «Les Carnettistes turbulents», a pris le chemin de la Chine, à Xi’an, capitale de la province de Shaanxi. Cette vieille cité de 3000 ans d’histoire est devenue, aujourd’hui, une métropole ultramoderne de 8 millions d’habitants. C’était le terminus de la Route de la soie. Le célèbre musée de l’Armée de terre cuite se trouve aussi à Xi’an, ville natale du grand cinéaste chinois Zhang Yimou, Ours d’or à Berlin pour son film Le sorgho rouge (1988).
«Les  Carnettistes turbulents» publient cet hiver un album joyeux et triste à la fois, fruit de leurs pérégrinations. Les dessins et aquarelles témoignent de leur regard, leur rencontre avec Xi’an, cité historique aux projets de modernisation étourdissants.
C’est à Xi’an qu’un étranger demande à un habitant de la ville : «Quel est ce gratte-ciel érigé sur ce terrain vague '» Réponse du Chinois : «Je ne sais pas, ce n’était pas là hier». Leurs carnets sous le bras, le pas alerte, le sourire aux lèvres, les «Carnettistes» ont sillonné la ville, croquant le marché, les boutiques, la grande mosquée (Xi’an est habitée par une grande communauté musulmane), les avenues très encombrées (les Chinois ont abandonné leur vélo et ont tous acheté des voitures).Ils ont tenté d’épuiser leur curiosité de la Chine en abordant partout les gens, en s’introduisant dans les maisons. Xi’an apparaît comme une ville infinie, qui change à vue d’œil, au fil des jours.
A intervalle régulier, ils quittent l’immense vacarme de la rue pour se réfugier dans un boui-boui et commander une soupe de nouilles qu’ils avalent vite avant qu’elle ne refroidisse. La recherche d’espaces verts, de ruelles tranquilles, fut assez difficile. Il fallait aller jusqu’aux rives du fleuve Jaune, à 80 km de Xi’an, pour admirer un paysage agréable, loin des tours massives et écrasantes de la nouvelle ville.
Il n’y a pas si longtemps, Xi’an regorgeait de milliers de vélos, de cyclo-pousse, de charrettes de paysans. Aujourd’hui, le fléau automobile piaffe en klaxonnant aux feux rouges. La rue chinoise est envahie par les pots d’échappement. Il n’y a plus de règle ni de priorité pour les piétons. Plutôt comique ce dessin d’un cycliste solitaire, coincé au milieu d’un raffut incroyable d’autos, de camions, de taxis, d’engins indéfinissables, genre bulldozers géants qui s’en vont creuser le sol pour voir surgir des tours grises de béton à l’aspect lugubre.
C’est à Xi’an, comme dans toute la Chine, qu’on emploie sur un chantier plusieurs milliers d’ouvriers qui terminent, au bout de deux mois, un bâtiment hors normes. Comment font-ils ' Mystère et boule de gomme. Xi’an possède ainsi un océan de gratte-ciel la tête dans les nuages. Sitôt terminés, on installe les grues géantes sur le terrain libre le plus proche pour faire d’autres tours inhumaines. Et pendant ce temps-là, tout autour de la ville, les chantiers de construction d’autoroutes n’arrêtent pas de défigurer le paysage d’où surgissent des ponts perchés sur des pylônes vertigineux. Surprise : dans Xi’an même, il subsiste encore des quartiers anciens, d’une beauté architecturale incomparable. Ils sont tous en sursis. Un jour ou l’autre, les projets de modernisation vont tout faire raser.
  Les Carnettistes turbulents / éditions Huang Li , 2011 / 160 pages, grand format
 


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)