C'est la vie passionnante d'un matelassier hors pair devenu, un personnage emblématique dans la ville de Guelma. Ammi Tounsi a fait la joie des familles, qui venaient à leur secours, pour confectionner les incontournables matelas de laine qui faisaient partie du trousseau de la mariée.
Ammi Tounsi est un matelassier ambulant, très doué, c'est l'un des plus anciens de la ville de Guelma. Il est accueilli avec une très grande joie dans tous les foyers pour sa gentillesse et son sens de l'humour, mais aussi pour la qualité de son travail. Pour les Guelmis : «C'est un honneur et un privilège d'avoir chez soi des matelas cousus à la main.» Il appartient à une génération native de Guelma, au début des années 1920, ancien employé dans une cuisine scolaire. Mais pour arrondir ses allocations familiales et ses maigres mensualités, il s'est investi cœur et âme dans le domaine des métiers traditionnels, pour subvenir aux besoins de toute la maisonnée. En effet, cet «artiste» est sollicité même par certaines familles de Guelma pour cuisiner lors des fêtes de famille, mariages et cérémonies diverses. Ses plats sont réputés être succulents (kefta, chorba, couscous…). Les Guelmis faisaient confiance à ces artisans hors pair, car ceux-ci étaient réputés pour être des hommes de métier intègres. «Les clients expriment leurs besoins et leurs goûts, et c'est au matelassier de choisir tout le nécessaire. Aujourd'hui, le contrat moral de confiance est totalement rompu, c'est le client qui achète tout, mais il paie seulement les honoraires», nous déclare une ancienne cliente. Cette dernière enchaîne : «A cette époque, les mariages sont exceptionnellement programmés en dehors de la saison estivale, c'est donc de bon matin que débute sa journée de travail.
«Je me rappelle de tous les coins et de toutes les maisons de Guelma qui ont servi de scène à chaque étape de ma vie, surtout Bab Essouk, ce quartier emblématique qui me tient à cœur.»
Si Ennououi Tounsi frappe à la porte, il annonce son arrivée, c'est un homme d'une gentillesse exemplaire. Je me rappelle bien, à cette époque, il paraissait déjà un peu éreinté, les traces de fatigue apparaissent sur son visage, c'est probablement l'effet d'un rythme de vie intense, mais la passion pour son métier ne l'a jamais quitté, c'est un type qui jouit d'une très grande fierté de gagner honnêtement sa croûte. Guelma était à l'époque une grande famille à un point où ammi Ennououi demandait des nouvelles de chaque membre de la famille, et il s'informe même des résultats scolaires des enfants ; c'était vraiment des moments merveilleux. On a également recueilli le témoignage d'une vieille dame, doyenne d'une grande famille de Guelma. «Avant de commencer son travail, on lui sert un café chaud parfumé de z'har (eau de rose) ayant une vertu stimulante et antalgique, notamment pour les maux de tête. Après l'avoir goûté et apprécié d'une profonde aspiration, ammi Ennououi s'assoit par terre et entame sa tâche. A chaque fois qu'on lui demandait s'il n'avait besoin de rien, il répondait gentiment qu'il avait tout ce qu'il fallait.» Notre interlocutrice a tenu à préciser que «ce matelassier termine toujours son travail à temps. Tout le monde lui reconnaît sa ponctualité exemplaire et son sens de l'humour qui permet de créer une ambiance familiale et presque festive durant toute cette séance de matelasserie», estime-t-elle. «Je me rappelle de tous les coins et toutes les maisons de Guelma qui ont servi de scène à chaque étape de ma vie, surtout Bab Essouk, ce quartier emblématique qui me tient à cœur. Des journées entières étaient consacrées à ma vocation, la matelasserie, la préparation du couscous maison et parfois les gâteaux traditionnels», disait ammi Ennououi, un artisan d'origine citadine, réputé pour être très sérieux, propre, mais surtout de confiance. «Son honnêteté lui confère une droiture indéniable, il est accueilli sans aucun problème par toutes les anciennes familles de Guelma, pour accomplir différents travaux à domicile», nous dira son ancien voisin. Tous les matelas traditionnels des trousseaux de mariées des années 1960 et 1970 de la ville de Guelma ont été presque confectionnés par ammi Ennououi, mais selon les exigences spécifiques des clientes. El Hadja Zbaida, une septuagénaire qui habitait à la cité Bel Air, sur les hauteurs de la ville, se rappelle : «Lors des préparatifs du mariage, le père ou le fils aîné annonce à la famille qu'il avait contacté cet artisan et que le rendez-vous est fixé. Les femmes commencent alors une intense activité, elles aménagent un coin adéquat pour le matelassier. En général, elles choisissent la chambre des enfants ou ouast eddar, la cour des anciennes habitations communes.» Pour les autochtones, le jour de la matelasserie est un grand moment de joie pour la famille mais c'est aussi un évènement qui marque le début des préparatifs de la grande fête de mariage. Les qualités exceptionnelles de ammi Ennououi n'expliquent pas à elles seules la confiance totale dont il jouissait auprès de toutes les anciennes familles de Guelma. Mais il y avait aussi sa réputation d'honnêteté irréprochable, qui lui avait permis de pénétrer à l'intérieur des foyers et accomplir correctement son travail et sans aucun problème, ce qui n'aurait jamais été permis à d'autres artisans de l'époque. Pour les gens qui l'ont côtoyé, ammi Ennoui n'a pas vu le temps passer du fait qu'il jouissait d'une grande passion pour son métier. «J'ai toujours été heureux d'aller travailler chez mes concitoyens, on était une grande famille», leur disait ammi Tounsi en évoquant avec émotion toute son ancienne clientèle, qu'il qualifie de fins connaisseurs, il reconnaît «leur savoir-vivre et leur gentillesse». «J'ai toujours été accueilli très chaleureusement chez les plus grandes familles, mais aussi chez les plus modestes et les plus simples tout autant accueillantes», révélait ammi Ennououi, qui nous a quittés il y a de cela quelques années.
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Posté Le : 16/06/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Noureddine Guergour
Source : www.lesoirdalgerie.com