C'est Canal-moins...
Contrairement aux prévisions commerciales, la nouvelle carte de Canal+ mise en service depuis peu chez nous avec un bouquet spécial Maghreb adapté aux goûts et... aux m'urs de notre société (dixit le PDG d'Overseas) ne semble pas susciter l'engouement des téléspectateurs algériens. Pour dire vrai, il n'y a pas le grand rush auprès des distributeurs comme celui provoqué par la carte pirate qui offrait un « menu » bien plus consistant aux moindres frais. Il est évident qu'entre l'offre des hackers qui reste aléatoire et celle de Canal+ qui assure un programme stable à raison de 2000 DA par mois, il n'y a en principe pas photo pour ceux qui peuvent se permettre le luxe d'une carte officielle. Mais s'il y a réticence de la part des accros du petit écran qui font partie de la « classe moyenne » ciblée par la multinationale française, c'est bien au niveau du contenu qu'il faut aller la chercher. De ce point de vue, on reconnaît à l'unanimité que le nouveau produit de Canal+ est vraiment loin de répondre aux exigences du consommateur algérien lequel, sans vouloir faire la fine bouche, trouve, à raison, que le marché proposé par Overseas ressemble étrangement à un marché de dupes. Un mini-sondage effectué auprès des détenteurs de la nouvelle carte confirme ce sentiment d'avoir été floué quelque part par une proposition qui tient davantage à faire de gros profits sans trop donner le change, surtout en ignorant les spécificités de la sphère télévisuelle maghrébine où les modèles de consommation ont été forgés depuis de nombreuses années. Premières impressions et premières déceptions. La critique la plus virulente en direction de Canal + qui, en réinvestissant cet espace ô combien juteux ' le plus grand marché télévisuel du continent africain avec 75 millions d'habitants ' n'a apparemment pas tiré les leçons de l'échec de sa première expérience tentée en 1990 avec Canal Horizons, se rapporte à la discrimination flagrante qu'il entretient volontairement entre la marchandise qu'il vend en France et dans toute l'Europe et celle destinée au tiers-monde. En effet, le canal appelé bizarrement « essentiel » qui tient la place de choix dans le bouquet algérien n'a rien à voir avec le Canal officiel distribué par câble de l'autre côté de la Méditerranée.Contrairement aux allégations de Jean-Noël Tronc, PDG de Canal Overseas, selon lequel l'offre algérienne, qu'il voudrait étendre au Maroc et en Tunisie dans un avenir très proche, est loin d'être inférieure à celle des autres pays, une offre qu'il qualifie de « 110% Canal + », les téléspectateurs algériens pensent plutôt qu'on leur a refilé un... Canal-moins qui leur procure plus de frustrations que de satisfactions. Mis à part les petits réglages qui ont été effectués au niveau du sport avec notamment la diffusion en direct des grand matches de football, un petit bonus intervenu non sans une certaine pression qui risquait de tout remettre en cause si les Algériens devaient être privés de leur distraction favorite, l'ensemble du programme de divertissement, particulièrement figurant dans les chaînes de cinéma est de moindre qualité par rapport à celui diffusé en France. Le PDG d'Overseas fait dans la publicité mensongère en soutenant qu'il n'y a aucune différence, alors que celle-ci est trop flagrante pour être occultée. Par exemple, l'abonné français a eu le privilège de voir le film qui a fait sensation dans l'Hexagone, Bienvenue chez les Ch'tis, alors que le téléspectateur algérien a dû dans le même temps se farcir pour la énième fois le film tunisien La Graine et le mulet qui ne cesse tourner en boucle jusqu'à saturation... On voit bien que Canal + ne s'adresse pas au même public. L'un a droit aux réalisations récentes, l'autre doit attendre... C'est le même sentiment de mépris qui a été ressenti avec la non-diffusion sur Canal Essentiel de l'émission consacrée au 2e anniversaire de la création des Guignols qui est passée en direct sur Canal+ officiel. « On a la nette impression d'être considérés comme une clientèle de seconde zone, qu'on nous prend pour des moins que rien à partir du moment où on nous a concocté un bouquet qui ressemble à un véritable fourre-tout » nous dit un abonné d'ici, qui ne comprend pas pourquoi, de manière générale, le promoteur de télé ne respecte pas les règles de ses propres prestations de service. Non seulement, il ne nous en donne pas pour notre argent, mais il se permet de décider pour nous de ce qui est bon ou pas pour notre sensibilité culturelle puisque, selon lui, les Algériens ne sont pas encore suffisamment adultes pour sélectionner par eux-mêmes les programmes qui conviennent à leur sens de la morale. Tant qu'on y est, pourquoi Canal+ Maghreb ne pousse pas le bouchon jusqu'à censurer, avant de les diffuser, toutes les scènes de films à tendance licencieuse ou les propos contenus dans les émissions qui peuvent heurter les consciences '
Posté Le : 18/03/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : A. Merad
Source : www.elwatan.com