Algérie

C'est bien ma faute



C'est bien ma faute
«En politique toute faute est un crime.» Eugène ChatelainLes effets de la crise ne se sont pas encore fait sentir dans le cercle très large des citoyens lambda dont je fais partie, que je vois déjà mes enfants me ressortir une fois de plus la formule qui consiste à me charger de tous les petits soucis qu'ils rencontrent dans leur grise petite vie quotidienne: «C'est ta faute! Si tu étais parti comme tous tes camarades, nous ne serions pas là!» Et oui! Je le reconnais et je ne cesse pas de battre ma coulpe et de me faire de virtuelles pénitences et crier à qui veut l'entendre que je ne suis qu'un misérable dénué de tout sens commun et trompé sur toute la ligne depuis le début. Mais il ne suffit pas de tirer un trait sur toutes les erreurs accumulées pour s'en tirer à bon compte. Mais que peut-on y faire' Tout le monde se trompe et une faute avouée est à moitié pardonnée... La confession est un acte d'hygiène mentale et de salubrité publique. Eh oui! Je me suis trompé depuis le début. Je reconnais avoir toujours eu un faible pour les futilités. Et c'est ainsi que je reconnais humblement que toute ma vie n'a été qu'une suite d'erreurs. D'abord à l'école! Je suis tombé tout de suite amoureux de la langue française et j'ai délibérément délaissé l'autre langue, bien qu'elle ne fut ni ma langue paternelle ni ma langue maternelle, elle n'en demeurait pas moins une langue aux accents très proches de ma vraie langue, celle que je parlais à la maison et dans la rue. Eh oui! J'admets que je me suis jeté à corps perdu sur les textes de Villon, Marot, Du Bellay, Ronsard, La Fontaine, Hugo et Aragon (et j'en passe!) et que j'ai appris à jongler avec les mots de Tristan Bernard ou de La comtesse... Je ne savais pas alors que j'allais le payer cher plus tard, face à ce coopérant égyptien qui allait tenter de m'inculquer, tout en épongeant son front basané, une langue aux accents étrangers, sortie tout droit des rives du Nil! Je me suis trompé encore quand je m'inscrivis dans une organisation de jeunesse, héritière d'un glorieux parti, auteur de l'indépendance. J'ai participé à tous les volontariats... J'ai planté des arbres, j'ai nettoyé des rues, participé à la construction d'un village pour veuves de chouhada. Je me suis jeté à corps perdu dans la construction du socialisme spécifique qui nous était proposé! J'ai travaillé comme un enragé dans une entreprise dirigée par des gens qui étaient réfugiés en Tunisie! J'ai crié «Vive Ben Bella, vive Boumediene, Yahia Chadli». J'ai applaudi tous les bonimenteurs à m'en rompre les phalanges. Quand Boudiaf est arrivé, je n'avais plus la force de crier tant j'étais déçu par la tournure des choses.Quand j'ai pris ma plume pour défendre mes idées, je me suis attaqué aux hommes politiques qui le méritaient moins, les plus faibles, ceux qui n'avaient pas de nervis à leurs ordres, ceux que la nature et la fortune n'avaient pas gâtés. Cette lâcheté me poursuit encore.Je me suis trompé en croyant à toutes les institutions qui ont été créées pour aveugler les gens bornés, j'ai cru en la justice, en la santé, en l'éducation. J'ai cru au parti, au syndicat. J'ai défendu des travailleurs qui allaient se retourner contre moi quand les claquettes ont commencé à devenir la chaussure nationale...J'ai milité aveuglément avec des gens qui se sont révélés être des agents doubles et qui, à la première alerte, ont sorti leur passeport bleu...Je me suis trompé. J'ai une excuse: j'ai été trompé en naissant ici...




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