Braqui, braqui !

Zid braqui, braqui». Braqué, il l?est le chauffeur. C?est son cinquième arrêt, pour terminer ses courses. Cinq arrêts, dix dinars par arrêt, ça fait cinquante dinars. C?est un kilo de tomate. Tu gares et gare à toi si tu ne respectes pas le deal. Des gardiens, non ce ne sont pas des gardiens. Ils ne sont pas responsables au cas où votre voiture est abîmée. Il gèrent l?espace qu?ils se sont approprié. Une partie de la rue. C?est au fait une équipe bien organisée. Le matin, c?est le plus vieux qui est là à vous faire stationner. A partir de midi c?est un jeune qui, pour vous permettre de garer, tend la matraque au début, et la main pour encaisser les dix dinars que vous êtes sommé de donner, ou assommé si vous ne le faites pas. Le soir c?est le balaise. C?est que la clientèle change. Et veiller jusqu?à une heure tardive, n?est pas à la portée de n?importe quel biceps. Le soir, c?est une clientèle éructée quelque bar, généreuse bartout, car dans les «vap», qui tarde au stationnement. «C?est quoi cent dinars, devant une tournée de verres dans la grande poésie des fêtards ?», Oualou ! Les gardiens patrons autoproclamés de parkings, motarguia cent fois, ni loi qui les gère, le savent. Tarif de nuit. «Zid zid gleb... alli demain inch?Allah». Ce n?est pas rare qu?au moment où vous braquez, deux motarguia vous braquent au même endroit. Tu fais les frais de leur compétition. Ils font mine de se bagarrer le droit de propriété. Ils te mettent en insécurité. Le chauffeur étant en pilotage automatique par la grâce éthylique, il a peur de l?intervention d?un quelconque policier, qui l?arrêterait pour conduite en état de buveresse. Il offre la pièce pour les deux concurrents, pourvu qu?il sorte du stationnement. Il démarre en trombe. Les deux «alcoolytes», qui font caisse commune, se séparent, la comédie a marché, elle marche à tous les coups, surtout avec ceux qui ont un coup de trop.Il faut avoir roulé sa bosse et avoir une expérience profonde de la psychologie des stationneurs. Etre physionomiste pour faire la différence entre le «chauffeur houkouma», le loupen et l?arriviste qui a chipé la voiture de papa. C?est dire que n?est pas motargui qui veut !