Malgré ses ennuis financiers, le Cinemed est de retour avec un programme foisonnant.La trente-sixième édition du Festival du cinéma méditerranéen de Montpellier se déroulera cette année du 25 octobre au 1er novembre 2014. Depuis quelques années, le festival a été écourté de deux journées pour maîtriser les coûts et offrir de meilleurs spectacles. Son directeur, Jean François Bourgeot, explique ce raccourcissement : «De toutes les façons, aucun spectateur ne pourra voir les 250 films proposés par le passé, c'est pour cela qu'on a décidé de ne projeter que 150 films cette année.»Il faut dire que la frustration de ne pas tout voir pour les cinéphiles est un moteur pour faire venir plus de spectateurs et, en même temps, fidéliser un public toujours en attente d'enchantement. L'objectif reste de faire des économies et de traquer les dépenses inutiles car les subventions culturelles ont tendance à diminuer. Dans le même ordre d'idée, le directeur du festival ajoute qu'il était temps de réfléchir à une autre organisation. Le n'ud du problème dans cette affaire reste le lieu du festival, le Corum de Montpellier, sorte de palais des congrès fastueux dont les coûts d'exploitation et les déficits accumulés ont fait grimper les prix de location.Du coup, pour jouir des lieux, le festival doit payer chaque année des frais de plus en plus insupportables qui grèvent son budget. Fermons cette parenthèse financière pour revenir à ce qui intéresse les cinéphiles, à savoir le programme de cette nouvelle édition. Il faut souligner que sur les vingt-cinq pays qui bordent la Méditerranée, dix-huit d'entre eux ont vu un ou plusieurs films sélectionnés pour cette édition. Les spectateurs qui étaient, l'an dernier, plus de 80 000, vont, entre autres, découvrir la nouvelle vague du cinéma venue de Grèce. Voilà un pays frappé de plein fouet par la crise mais qui continue à produire des films de qualité. Le cinéma turc reste aussi une valeur sûre de la manifestation.Cette année, ce festival va évoquer la figure de l'un de ses fondateurs, à savoir Pierre Pitot. Mais il mettra aussi à l'honneur l'actrice d'origine algérienne, Leïla Bekhti, qui effectue une belle carrière. Cette artiste est née en 1984 en région parisienne dans une famille venue de la région de Sidi Bel Abbès. C'est en 2006 que le public l'a découverte aux côtés de Vincent Cassel, dans le film Sheitan de Kim Chapiron. Depuis, elle n'arrête pas d'enchaîner les rôles. En 2011, elle a décroché le César du meilleur espoir féminin pour son rôle magistral dans Tout ce qui brille de son amie Géraldine Nakache. Au cours du Cinemed, elle aura carte blanche pour présenter certains films comme La source des femmes et Le Prophète, sans oublier une grande rencontre avec le public et la presse, le 26 octobre à 16 h, à l'espace Joffre.Derrière l'hommage à la belle comédienne, se profile une présence massive de la fiction algérienne durant ce festival. Il y aura, le 27 octobre au Diagonal, l'avant-première du film L'Oranais, de Lyes Salem. Ce film est très attendu à Montpellier, où il sera projeté en présence du réalisateur. Ici, les cinéphiles connaissent les films de Lyes Salem et, depuis Mascarade, le savent capable de réaliser des fictions intelligentes et enlevées qui scrutent la réalité algérienne avec un 'il novateur.Dans la sélection officielle du Cinemed où l'on compte douze longs métrages, signalons la présence du film Certifié halal, de Mahmoud Zemmouri. Comme à son habitude, ce réalisateur algérien aborde des problématiques qui lient les deux rives. Celui-ci évoque les mariages arrangés et tous les problèmes que pose cette pratique courante dans le milieu de l'immigration en France. Il raconte l'histoire d'une jeune fille d'origine algérienne, Kenza, révoltée par la domination masculine et qui, pour donner un sens à sa vie, milite dans une association, Ni poules ni soumises, parodie du célèbre mouvement qui semble avoir disparu de nos jours.Cette fréquentation déplaît à son frère Chérif, qui demande à leur cousin Aziz d'arranger un mariage pour exfiltrer de France la révoltée. Pour aborder les problèmes sociaux et les mutations de la société, Mahmoud Zemmouri s'en tient toujours au registre qu'il maîtrise, à savoir le tragi-comique. Dans l'autre section du festival, où l'on concourt pour le prix du Public de Midi-Libre avec quatorze films projetés, on notera la participation de deux films qui évoquent aussi l'Algérie. Le premier, Cinéma bidon, est l'œuvre de Bahia Allouache. Cette jeune cinéaste algérienne n'est autre que la fille de Merzak Allouache.Avant de passer derrière la caméra, elle a travaillé en tant que journaliste de cinéma. Ce film part du synopsis suivant : Suite à un AVC, le président de la République algérienne est transporté d'urgence à Paris pour soins. Djamel, jeune cinéaste indépendant algérois, décide de faire un film d'intervention politique s'inspirant de cette actualité. Il propose à Yasmine, son ex-femme, de se saisir de cet événement politique pour imaginer un scénario, mêlant fiction et réalité. Au lieu de cela, la jeune femme commence à écrire une histoire farfelue pour régler malicieusement ses comptes avec lui. D'après certains privilégiés qui ont vu le film, c'est un loufoque rappelant la belle époque du burlesque.L'autre film qui concourt dans la même catégorie, Les portes de soleil- Algérie pour toujours, de Jean-Marc Minéo, revisite l'histoire tragique de la colonisation en la réimplantant dans l'Algérie indépendante avec un ancien sympathisant de l'OAS qui revient sur les lieux du crime, à savoir Oran, pour régler a posteriori des comptes avec un pays représentant à ses yeux une sorte de paradis perdu. Dans la compétition officielle des courts métrages, le cinéma algérien est présent avec le film de Hassène Belaïd, Le beau-frère. Comme toujours, cette section reste l'antichambre des talents de demain. Le jeune cinéaste a planté sa caméra dans la belle ville de Sétif pour parler d'une histoire familiale en vingt-deux minutes. Ce format réserve toujours de bonnes surprises aux spectateurs qui viennent nombreux l'applaudir.De son côté, Anis Djaâd, propose dans la catégorie "Panorama Prix du public", le film Passage à niveau, réalisé en 2014. Ce court métrage d'Anis Djaâd a connu déjà une première diffusion au Festival de Cannes en mai dernier dans le Short Corner. Il nous propose, en vingt-trois minutes, de scruter la solitude d'un garde-barrière. Et, pour boucler la boucle, un autre film algérien sera présent dans la compétition des documentaires où la concurrence est vraiment rude avec dix films retenus sur 300 reçus. Chantier A, du trio Tarek Sami, Lucie Dèche et Karim Loualiche, décrit le retour d'un Algérien au pays après dix années d'absence. Dans ce grand voyage, les cinéastes nous proposent une série de rencontres avec des personnages atypiques rencontrés à Tizi Ouzou, Tamanrasset, Alger, Constantine et Timimoun.Cette présence du cinéma algérien, qui draine à Montpellier un nombreux public, s'inscrit dans un riche programme où classiques et nouveautés de toute la Méditerranée se côtoient dans une harmonie totale. Dans le lot, la projection des copies restaurées de certains films cultes comme Plàcido, du grand cinéaste espagnol, Luis Garcia Berlanga. Le festival propose aussi des initiations aux métiers du cinéma pour les lycéens et les profanes, avec un point culminant lors de cette fameuse journée du lundi consacrée au scénario qui sera dirigée par le célèbre écrivain Tonino Benaquista.Enfin, des porteurs de projets de films à réaliser viendront les défendre devant un jury de spécialistes pour obtenir des bourses d'aide ou des subventions. Le public donc, comme chaque année, aura l'embarras du choix dans une programmation foisonnante avec des expositions permanentes et des rencontres multiples. L'observation de cette formidable ruche festivalière à l'intérieur du Corum, le temple du festival, est à elle seule un véritable spectacle à ne pas rater.
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Posté Le : 18/10/2014
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Slimane Aït Sidhoum
Source : www.elwatan.com