Algérie

Bouteflika ira-t-il jusqu'au bout ' Les dossiers de corruption de Sonatrach



Bouteflika ira-t-il jusqu'au bout ' Les dossiers de corruption de Sonatrach
Dans un message à l'occasion de la célébration du 24 Février, il a déclaré être «révolté» par les révélations faites par la presse sur les scandales de corruption ayant affecté Sonatrach. Va-t-il ordonner à la justice et aux services de sécurité de toucher aux hautes personnalités citées par les affaires et bénéficiant jusque-là de l'impunité '
La compagnie nationale des hydrocarbures, Sonatrach, fête ses 50 années d'existence sous une pluie de scandales dévoilant les méthodes frauduleuses d'octroi des marchés sous l'ère Chakib Khelil. C'est à la veille de cette célébration, qui aura lieu aujourd'hui sur le site gazier de Tiguentourine, que le président de la République a choisi de réagir au feuilleton des révélations scandaleuses en disant : «Je ne peux pas passer sous silence les scandales récemment relevés par la presse et qui touchent la gestion de Sonatrach.» Bouteflika affirme que ces informations «soulèvent notre révolte et notre réprobation, mais je fais confiance à la justice de notre pays pour tirer au clair l'écheveau de ces informations, pour situer les responsabilités et appliquer avec rigueur et fermeté les sanctions prévues par notre législation».
Les mots sont lâchés : «Situer les responsabilités» et «rigueur et fermeté», dit-il à l'adresse des juges algériens, mais comment peuvent se traduire de telles déclarations dans un contexte où la justice est connue pour être aux ordres '
Jusqu'où ira Bouteflika pour faire la lumière sur ces scabreuses affaires touchant de hauts dignitaires du régime jouissant jusqu'alors d'impunité ' On est en droit de nous poser ces questions, car le scandale Sonatrach ne date pas du jour où les médias italiens et canadiens s'en sont saisi. Sonatrach est la boîte à scandales depuis janvier 2010, lorsqu'une enquête judiciaire diligentée par le DRS a conduit à décapiter le staff managérial de la compagnie, sans toutefois toucher au ministre de l'époque, en l'occurrence Chakib Khelil, qu'on disait derrière toutes les décisions prises par ces mêmes cadres aujourd'hui en prison. Ce même ministre, invoquant son appartenance au «clan présidentiel», jurait ne pas quitter le gouvernement, mais il a fini par le faire, car son nom revenait de manière récurrente et «gênante» dans les plaidoyers des avocats des cadres dirigeants de Sonatrach impliqués dans le scandale. En aucun cas, toutefois, il n'a été inquiété par la justice algérienne. Cette dernière, faisant fi, comme à son accoutumée, d'ignorer la responsabilité politique et donc épargner toute poursuite aux ministres comme c'est le cas dans la série de scandales de l'autoroute Est-Ouest, Khalifa, le secteur de la pêche, etc.
Aujourd'hui, Bouteflika affirme faire confiance à la justice algérienne, qui est connue pour être dépourvue de toute autonomie et dépendant du pouvoir exécutif et de ses ramifications. Le Président étant à la tête du pouvoir exécutif va-t-il enfin donner son feu vert et ordonner à la justice de faire ce qu'elle devait faire il y a déjà deux ans, c'est-à-dire convoquer Chakib Khelil, Mohamed Bedjaoui et d'autres membres de la nomenklatura pour répondre comme tout autre justiciable des faits qui leur sont reprochés ' La décision du parquet de s'autosaisir de l'affaire Saipem-ENI-Sonatrach, après que la justice italienne ait montré la voie «normale» qu'une telle affaire devait prendre dans un contexte de justice indépendante, n'a pas été accueillie avec un tonnerre d'applaudissements. Car d'aucuns savent que la justice algérienne n'a pas encore trouvé la voie de son indépendance. Pourquoi d'ailleurs avoir attendu que ces scandales aient éclaté outre Méditerranée pour se dire : «Finalement, oui on va enquêter.» Les enquêteurs du DRS n'ont-ils pas été en mesure de dévoiler tous les tenants et les aboutissants des transactions douteuses menées par Sonatrach du temps de Khelil ' Le nom de Farid Bedjaoui circulait déjà à l'époque, autant que celui de Khelil, de Hemch, etc. Ne fallait-il pas déjà à l'époque que la justice civile s'autosaisisse et mène sa propre enquête loin de toute chapelle ou influence ' Sonatrach, le plus gros patrimoine économique de ce pays, fête aujourd'hui son cinquantième anniversaire et dévoile, à lui seul, une gestion calamiteuse et prédatrice des richesses de ce pays.
Son ancien dirigeant Hocine Malti a même interpellé, dans une lettre ouverte, le premier chef du Département de renseignement et de sécurité (DRS), sans toutefois que cela ne fasse réagir grand monde. La sortie de Bouteflika signe-t-elle réellement la volonté d'aller jusqu'au bout pour rendre justice aux Algériens dont le bien a été spolié et dilapidé, ou est-ce juste un discours de circonstance pour montrer à l'opinion internationale que de telles pratiques frauduleuses sont «punies» '
Ce qui est de l'ordre de la certitude en tout cas, c'est que le patrimoine énergétique nationalisé en grande pompe un certain 24 février 1971 a été livré des années durant à des aventuriers sans foi ni loi qui ont amassé des fortunes sur le dos des Algériens, et servant le sous-sol algérien en pompes à sous aux multinationales. Il est plus qu'impératif aujourd'hui de situer les responsabilités d'un tel gâchis programmé, et que chacun réponde de son implication directe ou indirecte.


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