La courageuse Tunisie, d'où est partie la flamme du Printemps arabe,
célèbre aujourd'hui samedi 14 janvier l'an I de sa révolution. La chute du
dictateur Zine el Abidine Benali et de son régime.
Des festivités officielles, marquées par la présence notamment du président
Abdelaziz Bouteflika, sont organisées pour marquer ce
moment historique pour le peuple tunisien. Pourtant, si le plus dur est passé,
l'avenir de la petite Tunisie est également semé de défis que les nouvelles
autorités doivent lever. Une année après le départ de Benali
et la naissance d'un formidable mouvement de démocratie qui balaie la région du
Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, le leader du parti Ennahda,
Rached Ghannouchi, n'est pas peu fier de cette dynamique. ‘'Je suis bien sûr
très fier que la Tunisie
ait amorcé le Printemps arabe. En un an, on a assisté à cinq révolutions, dont
la plupart ont abouti'', a-t-il indiqué dans une déclaration à la presse. Et,
selon lui, ‘'cette vague de révolutions va s'étendre et influencer tous les
pays arabes et musulmans, et même influencer le reste du monde''. Des
déclarations triomphalistes, à la veille de la célébration de la naissance
d'une nouvelle Tunisie, plurielle et ouverte au monde. Le parti Ennahda, dont le numéro 2, Hamadi
Jebali dirige le gouvernement, a remporté les
élections pour la constituante. Mais, pour le président Moncef
Merzouki, c'est un autre discours qu'il lance aux
Tunisiens, avant de recevoir ses invités, dont le cheikh du Qatar et le chef du
CNT libyen Mustapha Abdeldjalil. Face aux énormes
problèmes que connaît la
Tunisie, dont le chômage, les grèves et la hausse des prix
des produits de première nécessité, il lance un message de patience. ‘'Je
demande qu'on attende un peu avant de tirer des conclusions. Cela fait 50 ans
que les Tunisiens vivent sous une dictature. Maintenant tous les problèmes qui
ont été mis de côté, mis sous le tapis, oubliés, refoulés, nous explosent à la
figure», a estimé le président tunisien. «C'est un vrai tsunami de problèmes.
C'est un vaste chantier», a-t-il ajouté. «C'est ce que je demande aux
Tunisiens: laissez-nous travailler», a ajouté le chef de l'Etat tunisien,
refusant toutefois le tableau d'une Tunisie à l'arrêt et estimant que «90% de la Tunisie tourne». Quant à
son alliance avec le parti islamiste d'Ennahda, qui
domine au sein de l'Assemblée constituante, Moncef Marzouki, un laïc classé à gauche, estime qu'»il n'y a pas
eu le choix». «Le grand reproche qu'on me fait est de m'être allié avec la
frange modérée de l'islamisme, il n'y avait pas d'autre choix. Ou bien on
dégage une majorité sage d'islamistes modérés, de laïcs modérés pour gouverner
ce pays ou c'est l'affrontement», a-t-il expliqué. «Présenter la Tunisie comme étant un
pays tombé dans l'escarcelle de l'islamisme, c'est une vision du monde, c'est
une vision partielle et partiale. Cela n'est pas vrai», a-t-il martelé. «Nous
avons des discussions extrêmement serrées pour que la Tunisie reste dans la
droite ligne d'un centrisme démocratique, respectueux des droits de l'Homme et
qu'elle n'ait rien à voir avec un régime islamiste», a encore précisé le
président tunisien dans une déclaration à une radio française.
BENALI GENOCIDAIRE ?
Par ailleurs, l'Union générale des travailleurs tunisiens, qui a joué un
rôle important dans la mobilisation de ses troupes contre le régime de Benali, a fêté l'an I de la révolution en rappelant ses
principales revendications : l'amnistie générale, la dissolution du
Rassemblement constitutionnel démocratique, la révision de la loi électorale,
du code de la presse et de la loi sur les associations, et la création de la Haute commission nationale
pour la réforme politique. Pour autant, elle demande toujours que des
investigations soient menées pour expliquer les dépassements. Pourtant, à en
croire l'ancien Premier ministre de Benali, Mohamed Ghannouchi, la
Tunisie est passé tout près d'un véritable bain de sang, une
boucherie à l'échelle d'un pays. Une année après, Ghannouchi
parle des derniers moments de Benali, et ce qu'il
voulait faire pour mater la
Révolution de Jasmin. Jeudi dernier, il a rapporté ses propos
avec le président déchu Benali, quelques heures avant
sa fuite vers l'Arabie Saoudite. ‘'Ils n'arriveront à rien, quitte à ce qu'on
en tue mille ou plus''. C'est en ces termes que se serait exprimé Benali le matin du 14 janvier 2011, évoquant les
manifestants réclamant son départ. Le 14 janvier 2011, des centaines de
manifestants se sont rassemblés sur l'avenue Bourguiba, dans la capitale
tunisienne, pour réclamer le départ du Raïs. ‘' J'étais sous le choc. Je découvrais
un autre homme que celui avec qui je travaillais depuis des années'', a
expliqué Mohamed Ghannouchi. Le Premier ministre
aurait, selon ses dires, tenté de convaincre Ben Ali que tuer ‘'mille''
Tunisiens n'était ‘'pas la bonne solution'', mais qu'il fallait ‘'mettre en
oeuvre des mesures pour le développement et contre la corruption''. « On en
parlera après », aurait rétorqué Ben Ali. Par désaccord avec le président, le
Premier ministre décide alors de quitter son poste, afin de ‘'ne pas être
complice'' de la répression sanglante voulue par le président, avait-il déclaré
jeudi dernier à la radio tunisienne. Puis vers 17 h ce même jour, Mohamed Ghannouchi reçoit un coup de téléphone d'un haut gradé
militaire qui lui dit: «Benali est parti, le pays est
entre tes mains. Si tu n'assumes pas, il va y avoir un bain de sang ». Deux
heures plus tard, ce 14 janvier 2011, il déclare à la télévision qu'il assure
l'intrim en remplacement de Ben Ali.
BOUTEFLIKA AVEC LES REVOLUTIONNAIRES TUNISIENS ET LIBYENS
Le Président Bouteflika participe, aux côtés du
chef du CNT libyen Mustapha Abdeldjalil, aux
festivités de la jeune révolution tunisienne. Une présence porteuse de forts
symboles. Même si Alger est resté ‘'réservée'' dans les premiers moments de la
révolution de Jasmin, d'autant que des émeutes faisaient rage en Algérie en
janvier 2011, le contact n'a pas été rompu, et très vite, la diplomatie
algérienne a fait le reste. Le reste c'est la venue à Alger dans les premières
semaines qui avaient suivi la chute de Ben Ali, d'officiels tunisiens, repartis
avec le soutien entier de l'Algérie aux nouvelles autorités à Tunis. La
présence à ces festivités des émirs arabes, dont celui de Qatar notamment, sera
en fait une opportunité pour l'Algérie de mettre définitivement un terme aux
accusations libyennes et, surtout, de ressouder les rangs des pays maghrébins
dans l'actuelle conjoncture politique marquée par la ‘'vague verte'' et le
début de la fin de l'ère des régimes dictatoriaux et des potentats dans les
pays arabes. Pour autant, la
Tunisie n'oublie pas l'essentiel lors de cet anniversaire :
se rapprocher encore plus avec les pays du Moyen-Orient. A Tunis, on prépare
même, à travers la rencontre entre l'Emir de Qatar Hamad
Ben Khalifa Al Thani et le Premier ministre Hamadi Jebali, la prochaine
visite de celui-ci en Arabie Saoudite, ‘'terre d'accueil'' du président en
fuite Benali.
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Posté Le : 14/01/2012
Posté par : sofiane
Ecrit par : Yazid Alilat
Source : www.lequotidien-oran.com