Cette année, les plages de la wilaya de Boumerdèsont enregistré une fréquentation record, etmême la mystérieuse épidémie qui a aff ecté 175personnes pendant le mois de juillet n'a pas euraison des baigneurs. Restent les noyades, grandtube de l'été.
Plage Corso, du nom de l'oued qui se jette dans la mer, expointde mouillage pour corsaires assermentés, quelquesbrassées à l'est de la grosse Boumerdès. La plage est belle etlarge, et cette année, les espaces ont été bien aménagés. C'estvendredi, fin d'après-midi, le soleil entame sa lente descentevers l'ouest. « C'est l'heure de la noyade », annonce Amin, l'unde la dizaine de surveillants de baignade déployés sur laplage. « C'est maintenant qu'il faut faire attention », expliquet-il, allusion claire aux cars du vendredi qui déversent sur lesplages des centaines d'estivants venus des wilayas de TiziOuzou et Bouira, qui pour une bonne partie d'entre eux, n'estpas très à l'aise dans l'eau de mer. « Même avec un drapeaurouge et si la mer est dangereuse, ils ne vont pas raterl'occasion de plonger, parce qu'ils viennent de loin », expliqueencore Amin, 20 ans, chômeur formé à la hâte en 20 jours parla Protection civile sur la base d'une annonce et d'un test debaignade. « Là, c'est la fin de l'après-midi, ils se sentent enconfiance », poursuit Amin, l'oeil aux aguets. Le bilanprovisoire vient de tomber. Sur le territoire national, 224décès par noyade depuis le mois de juin, la plupart desadolescents mais 108 dans la mer, « seulement », le reste ayanttrouvé la mort dans les barrages et autres mares (voir encadré).Avec 5 morts par noyade, dont 3 sur les plages, soit près de lamoitié que l'année dernière pour deux fois plus d'estivants, lawilaya de Boumerdès détient l'un des bilans les plus « positifs »du pays, explique un officier d'intervention de la Protectioncivile. Pour cause, cette année, « une sélection stricte a étéopérée pour le recrutement des surveillants de baignade »,avec un « objectif zéro noyade » sur les 25 plages autorisés dela wilaya de Boumerdès. Résultat provisoire, les interventionsde la Protection civile sur les plages ont permis de sauver2300 personnes de la noyade. Comment 'Bouche-à-Bouche avec les doigts« Tachghil echabab », c'est ainsi que l'on dénomme les« emplois jeunes », comme ceux qu'ont trouvé ces jeunessurveillants de baignade affiliés à la Protection civile,sélectionnés par voie d'annonce et sur un test de nage. « Engénéral, ils prennent les gens de la mer, qui nagent bien »,explique Sofiane, surveillant validé après vingt jours de stage,pendant lequel il apprend à sauver les gens de la noyade. Carle défi est d'importance, 6 millions d'estivants pour l'instantsur les côtes de la wilaya contre 200 surveillants de baignade,alors que l'année dernière, les estivants n'étaient que 3millions sur l'ensemble de l'été. Pour 9000 DA par mois, cesjeunes surveillants, toujours encadrés sur chaque plage par unvrai agent d'intervention de la Protection civile, ont la tâcheardue de veiller, dans ces eaux où les courants sont très forts.Le Figuier. Sur cette plage près de Boumerdès, Samir, autresurveillant de baignade, explique fièrement que « cette année,on a du vrai matériel ». Zodiaque et Bay watch, « comme àMalibu », annonce-t-il en montrant une bouée longiligne auxextrémités raccourcies, plus pratique que la classique bouéeronde. Comme à Malibu mais sans les jolies femmes, starspulpeuses de Malibu qui poussent chaque homme à se noyer.Pas de femmes tout court d'ailleurs à la protection civile,« non, il n'y a pas de surveillants de baignade femmes »,confirme Samir. Mais si c'est une femme qui se noie ' Et lebouche-à-bouche ' Là, le débat s'installesur les rigueurs de la morale, le Figuierétant quand même dans l'un des fiefs del'islamisme. La question a d'ailleurs étésoulevée entre surveillants et Samir arépondu sans hésiter : « On met lesdoigts autour. » En mimant le geste,les doigts en rond autour de la bouche,Samir explique que l'on peut faire unbouche-à-bouche sans contact entreles lèvres.Ne nagez pas trop loinDe Corso à Dellys, point extrême dudernier noyé de la wilaya, s'étalent desplages très masculines, Sablière, leFiguier, Sghirat ou Zemmouri El Bahri,et là où il y a quelques années, peu demaisons parsemaient ces étenduessauvages, ce sont des dizaines de villagesnon identifiés qui ont surgi du néant. Sixmillions d'estivants, pourquoi autant demonde ' « Depuis le séisme de 2003,beaucoup de gens sont descendusprendre des chalets », explique l'un desconcessionnaires de la plage de Sghirat.« Pour qu'ils partent, il faudrait unnouveau séisme », rit-il, précisant que cesnouveaux arrivant « n'ont pas l'intentionde partir, ils sont bien installés, beaucoupd'entre eux louent leurs chalets en été,entre 50 et 70 000 DA par mois ».A Oued Sghirat, la plage est pleine. Lejeune noyé du coin, bachelier de TiziOuzou félicité par le président, est mortsans avoir eu le temps de profiter deson diplôme et est déjà oublié. Commes'oublient les affres de la guerre qui afait rage ici. Partout, de Corso àZemmouri, blocs de béton, herses etbarrages armés jusqu'aux dentsdonnent l'image d'une région en étatde guerre, où les maillots de bainsmulticolores et à vendre sontpourtant accrochés à chaqueboutique. A Zemmouri, plageOuest, près du port de pêche,même le préfabriqué de laProtection civile est surmontéde sacs de sable et de gendarmesen kalachnikov. Et si à CapDjinet, le bidon de poisonretrouvé sur la plage n'adécouragé personne denager, à Dellys, limite est dela wilaya, c'est une autrehistoire qui commence. Laroute de la plage s'arrête.Le tronçon Dellys-Tigzirt,u n e t r e n t a i n e d ekilomètres, est fermépour des raisons desécurité. Une routebalnéaire ferméedepuis 15 ans. L'Etata dû s'y noyer. Et laProtection civile n'arien pu faire.
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Posté Le : 15/08/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Chawki Amari
Source : www.elwatan.com