Algérie

Bouira : La crise des fusils confisqués



Bouira : La crise des fusils confisqués
Le 28 mars dernier, une Coordination nationale pour la restitution des fusils de chasse a été créée à Bouira rassemblant des représentants de tout le territoire. Face au mutisme des autorités, des milliers de propriétaires de fusils confisqués par l'Etat depuis 1993 sont déterminés à récupérer leurs armes. « Sans mon fusil, je ne pourrais prétendre travailler ma terre à cause de la prolifération des sangliers qui ravagent tout sur leur passage. » Mohamed Ouali, 75 ans, fellah dans la localité de Aomar, ne décolère pas. « Confisquer les fusils, c'est mettre à mort toute une population rurale pour qui le fusil représente surtout une dignité ! » Les propriétaires des fusils de chasse confisqués par l'Etat en 1993 ne cessent de crier à l'injustice. Après plusieurs démarches sans succès auprès des autorités compétentes, ces citoyens ont investi larue dans plusieurs wilayas du pays pour revendiquer une « solution juste et équitable à même de les réhabiliter dans leur droit légitime ». Des rassemblements sont organisés un peu partout dans le pays. A Chlef en 2006, Tlemcen en 2007, Nassiria (Boumerdès) en février dernier, et en mars à Biskra et à Tagdembt (Tiaret). Après plusieurs marches et sit-in hebdomadaires, une Coordination nationale pour la restitution des fusils de chasse a été créée lors d'un regroupement tenu à Bouira le 28 mars dernier. Cette organisation entend réunir toutes les personnes dont les fusils ont été confisqués pour demander leur restitution ou une indemnisation. Exprimant leur désarroi devant l'attitude ambiguë des pouvoirs publics, les membres de l'association déclarent qu'ils en arrivent même « à douter de l'existence de la conservation des fusils en dépôt ». Pour la Coordination, il faudrait d'abord savoir qui est amené à prendre des décisions. « Des dizaines de démarches, toutes wilayas confondues, auprès des autorités politiques et sécuritaires, locales et nationales n'ont pas permis d'identifier qui est en charge de la décision sur ce dossier et encore moins trouver une solution », a déclaré Ighil Foudhil, président de la CNRFC. Recham Brahim, président de l'association Essalam pour la restitution des fusils à Bouira qui a, depuis de longues années, frappé à toutes les portes, indique que « toutes les démarches se sont soldées par un échec dans la mesure où aucun parmi les responsables avec lesquels nous nous sommes entretenus n'a daigné nous répondre de manière claire. Pire ! Chacun essaie de dégager sa responsabilité ».Sourde oreilleQue ce soit le wali, le chef de la 1re Région militaire à Blida, le ministre de l'Intérieur, le président de l'APN et à la présidence de la République : tous ont été saisis. Aucun n'a tranché. Yazid Zerhouni, par exemple, tergiverse à chaque fois que la question lui est posée. En janvier 2008, il a répondu à une question d'un député à l'APN : « L'éventualité d'une restitution de ces armes à leurs propriétaires est une mesure prématurée, car des indices fournis par le cours des événements indiquent que les terroristes sont toujours à la recherche de nouvelles armes qui sont chez leurs propriétaires. » Au mois de mai de la même année, lors de l'installation du nouveau wali de Bouira, ce même ministre déclarait que « les causes de cette confiscation n'ont pas totalement disparu », écartant toute possibilité de restitution. Un discours que, paradoxalement, il ne tiendra pas lors de la visite de Abdelaziz Bouteflika à Bouira le 27 juillet 2008 en déclarant que ces armes sont répertoriées et que dès la réunion des conditions nécessaires pour aborder ce dossier, l'Etat procédera de la manière « la plus judicieuse » à la restitution ou à l'indemnisation. Depuis, rien n'est venu soulager les propriétaires des fusils confisqués. Pour eux, « le dépôt des fusils de chasse des citoyens en 1993 a trop duré. Il frise la saisie ». « Nous avons été légalistes, nous avons respecté la décision des pouvoirs publics en 1993, mais le retard pris dans le traitement de ce dossier nous a fait beaucoup de tort, insiste Salah Ider, 75 ans, fellah à Haizer. Nous sommes ainsi dépourvus de nos biens, et nous ne comprenons pas quelle est notre faute...


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