Algérie

Boubekeur Bessai 26 juin · Bonsoir les terriens



Boubekeur Bessai 26 juin ·  Bonsoir les terriens
LE BURNOUS
Ma mère pensive, sous l’ombre fraîche du grand olivier, où se fait sentir la présence des ancêtres. Elle est très peinée, par la femelle alouette, qui tourne au-dessus de nos têtes à maintes reprises, l’oiseau semble pleurer en poussant des cris. Cette scène est d’une immense tristesse. Car j’ai trituré le nid, de cet oiseau, en escaladant la falaise. Pour me punir ; Elle m’infligea une sanction, m’envoya aider à la tonte de la laine. Tewizi* du village, qui se fait à la fenaison avant les grandes chaleurs. Plusieurs mains allègent cette tâche. Les vieux étaient adossés au mur en pierres sèches avaient la bonne humeur, les pieds croisés à ras du sol. Ils sortaient la corne de bœuf sciée qui sert de tabatière, d’autres un mégot qui brûle entre les lèvres ; ou un haché de feuille à tabac, qu’ils roulaient à la main pour fabriquer des cigarettes. Il y a toujours du café, du thé, tighrifine*, et des sfindj* qui nous attendent quand on a besoin. Contrairement à nos bêtes qui étaient à la diète depuis la veille, pour ne pas se salir. Les bêlements affolés, des brebis et moutons, couchés sur le flan, me parviennent à l’oreille, l’odeur du suint de la laine me monte aux narines me fait éternuer. La tonte est une corvée sale et épuisante. Toute la journée j’avais, le nez et la gorge irrités par la poussière volatile de ces particules. Avec des yeux rouges, larmoyants, un gout de paille dans la bouche et de la démangeaison sur tout le corps. Je, me plaignais, à ma génitrice : pour lui dire que je ne méritais pas cette sévère punition.
-cheh*, cheh, i cheh tu vas payer, ta bêtise voilà un acte de cruauté volontaire détruire le nid de l’alouette, cette sanction n’est rien à côté de ton péché.
Je savais que l’alouette, est sacrée pour ma mère ainsi que l’abeille. La première elle fait la vie des champs, et d’éveil du printemps. L’abeille est aussi pure que son miel, se nourrit des parfums de fleurs et quand elle pique elle meurt. M’a-t-elle toujours dit

Cette réponse expéditive de ma mère ne me consola guerre. Malgré que je sente une tendresse dans son regard chargé d’amour qui exprime un regret, sans grâce devant ma supplique.
Après la tonte, c’est au tour des femmes, de préparer la laine, pour la confection des tissages nécessaires aux besoins de la famille. J’aidais ma mère à ramasser nos toisons et à les triées. Le pelage de la queue, rectum et du ventre de nos bêtes est souillé irrécupérable, impropre au tissage ou à la vente. La laine est bouillie avec du LEZZAZ*, pour la débarrasser du suint et lui redonner toute sa blancheur.
Je rêvassais, d’un burnous, à chaque fois ma sollicitation, devient conflictuelle, nos maigres moyens minent les efforts de ma mère à subvenir à nos besoins. Et mon songe devient illusion, de ce désir qui m’habite.
Notre région montagnarde se distingue souvent avec cet habit chargé de symboles identitaires. Que je voulais m’offrir.
Après le peigne, l’ourdissage, le cardage, vient le filage. Ce travail prend le temps et nécessite de multiples mains. Foulonner la laine pour lui donner cet aspect fin, doux et clair la rendait plus agréable à la peau.
Le tissage est lié à la vie quotidienne c’est un art, et un savoir-faire, très répandu en Kabylie une activité séculaire pour se vêtir. Ma tante Aicha et ma mère sont assises cote à cote. De leurs mains actives et joyeuses, travaillent rient, et parlent en plaisantant sans être gênées par le filage. Elles semblent jouer avec la laine si fine ; Leurs gestes sont identiques, les fuseaux, quenouilles s’affolent, commencent à tourner entres leurs doigts pour produire du fil.
Maintenant tout se trame derrière la trame à tisser tante Aicha essaie de convaincre ma mère, de la confection de mon burnous qui demande de la patience et du doigté. Cette femme ne tisse pas que la laine, elle tisse l’amitié qui dénote l’affection et l’amour pour l’autre. Avec ses pensées, elle pouvait tisser et coudre les rêves les plus fous.
Notre coq ne déchirera plus le silence de l’aube il fut sacrifié, son sang a maculé l’ensouple, qui est un rite protecteur du métier à tisser.
On prit mes mensurations de la tête aux pieds avec un fil de laine
C’est comme ça qu’elles s’assirent dos au mur, le visage vers l’envers du tissage. Les fils de trame se succèdent, se croisent, sans se défaire. C’est magique ces doigts de fées qui qui mènent cette tâche avec dextérité. Ces gestes accompagnent, le bruit harmonieux du peigne, en fredonnant peines et joies. Les fileuses avec leurs mélodies, interprètent des chants spirituels, traditionnels. Qui m’ont bercé maintes fois, jusqu’à m’endormir la tête appuyée sur le montant d’olivier du tissage.
A mon retour d’école, Il y a toujours du temps pour une corvée comme celle de fendre du bois et ramasser les œufs de poules au pondoir où la fiente tombe au travers de leur perchoir. Lorsque je franchis le seuil de la porte, je ne m’attendais pas, à ce je trouve ma mère, je me blottis contre elle, et me serra dans ses bras. J’ai senti un cœur capable de toutes les vibrations d’affection. Elle habillât mes frêles épaules du burnous à la blancheur de l’orchidée, garni de franges, qui reflète paix et pureté.
-Ne le laisse jamais, tomber à terre, me conseilla-t-elle.
Oui cet habit spirituel ne mérite pas souillure, j’ai ressenti cette satisfaction profonde, cette immense générosité réconfortante.
J’ai bien retenu la leçon, de mon erreur ma mère a voulu m’inculquer, les valeurs de labeur, pour connaitre la satisfaction après l’effort.
Tewizi=travaux bénévoles d’entraide et de solidarité
Tghrifine= crêpe
Sfindj=Beignet
Lezzaz=daphné plante
Cheh=allocution pour dire bien fait pour toi


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