Algérie

Boualem Charef (entraîneur de l'ASM Oran) «La situation de notre football devient inquiétante»



De l'avis de tous ceux qui suivent de près l'évolution de l'équipe asémiste, Boualem Charef, l'entraîneur en chef de l'ASMO, est parvenu en un laps de temps assez court à reconstruire une équipe qui a permis à ses fans de rêver. Travail méthodique, abnégation et discipline, ce sont les mots d'ordre de ce technicien qui tire sa force de sa compétence et de sa parfaite maîtrise de son sujet. Il est parfois victime de ses principes et de sa personnalité. Mais, cela ne le décourage pas pour dire tout haut ce que les autres pensent tout bas. Suivons-le dans cet entretien. Le Quotidien d'Oran: Quel jugement portez-vous sur le bilan actuel de votre club ? Boualem Charef: Au départ, on a convenu de restructurer le club afin de le remettre à sa véritable place avec une équipe développant du beau jeu tout en lançant dans le bain des jeunes. Sur le plan purement sportif, notre parcours de l'aller a surpris plus d'un. On pouvait faire mieux si nous n'avions pas été perturbés par les blessures, les suspensions et autres indisponibilités. Par ailleurs, il est utile de le souligner, nous avons été victimes de quelques manoeuvres de coulisses. A titre d'exemple, l'ASMO n'a bénéficié jusque-là que d'un seul penalty, face à l'USB. Pendant la trêve, l'équipe n'a pas effectué un bon recrutement ni une bonne préparation en prévision de la phase retour. Les dirigeants avaient tablé sur une rentrée d'argent, un élément régulateur pour la motivation, mais en vain. La crise financière nous a poussés à restreindre notre recrutement en faisant appel à de jeunes joueurs, certes à l'avenir prometteur, mais qui manquent énormément d'expérience pour gérer cette pression engendrée par l'objectif de l'accession. Même la venue de Benamara et Farhi n'a pas solutionné le problème du fait qu'ils n'étaient pas compétitifs. Malgré tous ces aléas, en ajoutant à cela les déplacements par route à Béjaïa, Biskra, Sétif et Batna, le groupe travaille dans la sérénité. Q.O.: Justement la confection du calendrier suscite bien des interrogations... B.C.: C'est une réalité amère. Je me pose la question comment a-t-on fait pour confectionner ce calendrier ? On nous oblige à un repos d'un mois pour ensuite jouer deux matches en l'espace d'une semaine. Les clubs de la Nationale I et de la Nationale II ne disposent pas des mêmes moyens, ni des mêmes avantages. En division II, les joueurs sont pour la plupart jeunes et ont besoin de travailler et à cette cadence, ils sont exposés aux blessures. Après une étude effectuée par l'UEFA concernant les risques et les causes de blessures notamment pour les clubs qualifiés à la Champion's League, cette structure a pu diminuer les matches des tours préliminaires afin de permettre aux joueurs de mieux récupérer. Après quatre ans, ils ont remarqué que les blessures ont diminué de 15 à 20 %. Chez nous, on s'acharne à faire le contraire. Concernant le calendrier, je le dis et je répète, il faut consulter les techniciens et les spécialistes avant son élaboration. Un championnat ne se gère pas administrativement, mais d'une façon méthodique. Pourquoi, par exemple, ne pas revenir à un championnat à deux groupes afin de minimiser les dépenses et réduire les longues distances, ce qui permettra aux joueurs d'aborder dans de meilleures conditions leurs matches. Q.O.: Comment s'annonce pour vous la suite de la compétition ? B.C.: La suite du parcours est tributaire de la volonté des joueurs à jouer les premiers rôles. Mais ceci ne m'empêche pas de dire que l'espoir demeure, même si plusieurs joueurs clés restent indisponibles. Le travail des coulisses bat son plein. Je m'explique: pour un petit incident, on nous a imposé le huis clos. Si certaines équipes défendent leurs intérêts, c'est légitime mais il ne faut pas que ce soit au détriment des autres. On nous a contraints de jouer notre match retard face au CSC, alors qu'on a sollicité le report de cette rencontre du fait que nous avions un match de coupe à disputer face au WABT. Or aujourd'hui, on constate que le match PAC-MCEE de la phase aller n'a pas encore eu lieu. Alors, pourquoi ce deux poids, deux mesures ? Q.O.: Dans quel état d'esprit se trouve le groupe alors que le problème financier reste posé ? B.C.: Pour le moment, tout le groupe s'entraîne, à l'exception de Boumechra (blessé), et ce malgré les contraintes financières, ce qui est à l'honneur des joueurs que je remercie ainsi que les autres staffs. Dans cette situation, il est difficile de motiver les joueurs même si ces derniers se sont montrés toujours disponibles. J'ai confiance en mes joueurs et en leurs qualités et aussi en les dirigeants pour les récompenser.   Q.O.: Et si on évoquait la situation du football national... B.C.: Je vous répondrai illico que notre championnat est devenu une bombe à retardement. La situation s'est aggravée et devient même inquiétante. Seule une volonté politique peut dénouer cette crise, mais malheureusement on ne voit rien venir de ce côté-là. Q.O.: Quelles solutions préconisez-vous ? B.R.: Il faut prendre des mesures draconiennes avec des décisions à long terme tout en s'appuyant sur le volet technique et organisationnel. La DTN n'a jamais rassemblé, et ce depuis longtemps, les entraîneurs des divisions I et II et des autres paliers. Il est impératif que cette structure trace des objectifs réalisables à long terme spécialement pour l'aspect technique. La formation ne réussira pas sans formateurs spécialisés. Toute organisation doit se dérouler sous l'égide de la FAF et supervisée par le MJS. Dans le domaine organisationnel, il est indispensable d'exiger des cahiers de charges concernant l'infrastructure et la prise en charge des jeunes. La mauvaise gestion provoque des effets nuisibles à la société. Les stades sont devenus des lieux de violence, d'actes de régionalisme et cela va à l'encontre de l'éducation. Il n y a pas de véritable politique pour inculquer à nos jeunes la culture footballistique et ses bienfaits. Ceci s'est répercuté sur l'EN où nous n'avons pas de joueurs du cru capables de jouer à un haut niveau. Où est l'équipe nationale qui faisait la fierté du public ? Notre sport roi a été négligé et géré par ceux qui placent l'intérêt personnel avant celui de la Nation. Cette situation s'est encore amplifiée avec ce phénomène de guerres de communiqués entre dirigeants qui parlent de choses très graves et s'injurient sans qu'aucun responsable ne réagisse. Le football fait rêver nos jeunes chaque semaine, mais ce sport a tendance à se transformer malheureusement en cauchemar avec de nombreux blessés. Par ailleurs, pour un meilleur suivi, il revient au MJS de gérer l'activité sportive au sein du sport scolaire. Ailleurs, on a trouvé le juste équilibre en augmentant les heures de la pratique sportive, alors que chez nous c'est l'inverse. Avec de telles programmations et de telles charges de travail, comment voulez-vous que le joueur algérien puisse faire face aux dures exigences de l'élite ?


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