Algérie

Bons du Trésor américain : savoir raison garder



C'est la question à 43 milliards de dollars. Au vu de la crise financière qui ébranle actuellement les Etats-Unis, les Bons du Trésor américain méritent-ils encore d'être considérés comme un placement infaillible et sans risque ? Disons-le tout de suite, l'heure n'est certainement pas à l'alarmisme, et on imagine mal les agences de notation se décider du jour au lendemain à dégrader le rating des « T-Bonds » et autres « T-Notes ». Comme l'a expliqué une note de l'agence Moody's il y a quelques jours, l'économie américaine demeure, crise des subprimes ou non, la première du monde (*). Avec un Produit intérieur brut (PIB) de près de 15.000 milliards de dollars, une croissance économique qui a montré sa capacité à rebondir en permanence au cours des vingt dernières années, et un dynamisme sans conteste de ses entreprises, l'Amérique est un débiteur qui demeure à ce jour fiable et cela malgré son endettement (moins de 70 % du PIB). Malgré l'importance de la crise financière, il n'y a donc aucune raison de penser que le triple-A qui caractérise la dette américaine - il s'agit de la meilleure notation possible - soit remis en cause à court terme.

En clair, le scénario d'une soudaine désaffection des bailleurs de fonds vis-à-vis des Bons du Trésor américain est certes alléchant - cela constituerait un beau sujet « d'économique-fiction » - mais la réalité est tout autre. Il faut bien comprendre que les principaux prêteurs des Etats-Unis, c'est-à-dire la Chine, le Japon, et les pays du Golfe n'ont pas intérêt à déprécier leurs placements en vendant les Bons du Trésor US. Pour Pékin, il serait aventureux de vendre en masse ses avoirs américains, car cela provoquerait immédiatement une panique sur le billet vert, et la valeur des quelque 12.000 milliards de dollars de réserves possédées par la Chine s'en trouverait affectée. Pour résumer, les Etats-Unis et leurs prêteurs se tiennent par la barbichette, ce qui démontre que nos 43 milliards de dollars n'ont pas grand-chose à craindre. Du moins à court terme.

Car à long terme, la question du rating des obligations américaines finira par se poser tôt ou tard. Deux risques majeurs pèsent en effet sur les finances américaines : il s'agit des coûts respectifs des retraites (Social Security) et de l'assurance-maladie (Medicare), deux chantiers de réforme que les présidences Clinton et Bush se sont révélées incapables de mener à bien. A cela s'ajoute le risque politique. Dans vingt ans, la Chine devrait avoir le même poids économique que les Etats-Unis. Cela signifiera que le rapport entre ces deux nations risque de changer, avec un rapport de force qui basculera en faveur de Pékin ce qui aura fatalement des conséquences sur la manière dont les marchés jaugeront la dette américaine.

Il reste enfin, que les interrogations des Algériens à propos des 43 milliards de dollars sont légitimes, car elles posent la question de la manière dont sont gérés les avoirs extérieurs de l'Algérie. Un petit exercice de transparence ne devrait faire de mal à personne. Quelle est la stratégie de la Banque centrale algérienne en la matière ? Ne faut-il pas donner plus de place aux actifs libellés en euros dont certains bénéficient eux aussi du Triple-A ? Enfin, et sans s'aventurer dans les marchés d'actions qui démontrent actuellement leur volatilité, n'est-il pas temps de réfléchir sérieusement à la création d'un fonds souverain ? Avec la crise financière, des entreprises de renom sont plus que jamais bon marché. C'est peut-être le moment de diversifier les placements de l'Algérie.



(*) The Unshaken Foundations of The US Government's Aaa Rating, septembre 2008.




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