Encore un peu moins de 15 jours et les Algériens seront au rendez-vous de deux événements majeurs, qui survenaient depuis plusieurs années séparés laissant souffler un peu les pères de familles, surtout les smicards, les sans-travail et les retraités.
Cette année donc, c'est aussi bien le Ramadhan que la rentrée scolaire qui attendent de pied ferme les ménagères qui ne savent plus ce qu'elles doivent acheter ou ce qu'elles peuvent laisser pour plus tard. Il n'y a d'ailleurs qu'à entendre les discussions enflammées entre elles dans les marchés, dans les bus ou même dans les cages d'escaliers qu'elles occupent des heures durant. Le prix des denrées alimentaires de première nécessité est décortiqué, certaines espèrent que le bidon d'huile restera au même prix alors que d'autres estiment qu'il leur faudrait au moins 10 millions de centimes pour faire face aux dépenses du Ramadhan, de la rentrée scolaire et de l'Aïd. Heureusement que les habits de la rentrée seront utilisés pour l'Aïd, pensent déjà certaines. Et les craintes de ces dames sont plutôt fondées quand on sait que déjà la pomme de terre, pour ne citer qu'elle, a déjà pris les devants en voyant son prix relevé de plus de 10 DA, alors que les autres fruits et légumes s'apprêtent déjà à suivre la même courbe ascendante. D'ailleurs des informations non encore confirmées font état de la rétention par certains grossistes de matières et denrées très demandées pendant les premiers jours du Ramadhan, comme le concentré de tomate, les pois chiches, le sucre, la farine et la grosse semoule. La viande aussi fait partie des produits qui risquent de manquer un peu sur le marché, du moins pendant la semaine qui précède le Ramadhan et verra donc tout naturellement son prix prendre l'ascenseur. En outre, un tour au marché nous fait toucher du doigt les augmentations qui affecteront beaucoup, sinon tous les produits de large consommation et nous voyons déjà l'oignon passer de 10 à 20 DA et la salade laitue a atteint les cimes à 100 DA le kilo dans la plupart des marchés. Bien sûr, nous ne sommes pas encore arrivés à la dernière semaine précédant le Ramadhan où nous voyons une véritable razzia opérée sur tout ce qui se vend, non seulement les denrées alimentaires, mais même les ustensiles de cuisine comme la nouvelle mode des soupières, des assiettes de différentes tailles, des couscoussiers de plus en plus jolis, ou encore les cuillers rutilantes, ainsi que les couteaux, les fourchettes et les verres multicolores. Ce sont justement ces nouvelles habitudes de consommation à l'approche du Ramadhan qui grèvent dangereusement le budget familial et font passer des nuits blanches aux pauvres pères de familles qui ne savent pas s'ils doivent satisfaire leur douce moitié ou garder un peu d'argent pour entamer le Ramadhan assez aisément. Finalement, c'est Madame qui l'emporte et qui renouvelle toute sa panoplie de cuisine alors que Monsieur se dit, fataliste: «On verra bien d'ici là». Pour les hommes, il s'agit surtout d'être à la hauteur même s'il faut se résoudre à emprunter un peu d'argent qu'ils mettront six mois pour rembourser, s'ils le peuvent. Beaucoup vont jusqu'à mettre les bijoux de leurs femmes au trou contre 30 % de leur valeur réelle qu'ils s'empresseront de dépenser. Hocine, la cinquantaine largement entamée, ne travaille plus depuis plusieurs années. Il arrive difficilement à joindre les deux bouts en temps normal, alors avec un doublé Ramadhan/rentrée scolaire, il ne sait vraiment plus comment faire. Il a bien une petite rentrée (environ 6.000 DA) qu'il a gagnée en travaillant chez un épicier, mais ce n'est rien par rapport aux besoins de sa famille composée de 5 membres. Nous l'avons trouvé au coin d'une rue, pas très passante, se tenant derrière un arbre, jaugeant les passants pour les interpeller d'une voix à peine audible et leur demander quelques dinars: «Mes enfants n'ont pas quoi manger ce soir, s'il vous plaît, juste quelques dinars». Certains mettent la main à la poche et lui donnent quelques pièces, d'autres passent sans le voir alors que quelques-uns bougonnent d'une voix coléreuse: «Je suis dans le besoin plus que lui, mais je n'oserais jamais tendre ma main, qu'il aille travailler, il est encore valide !». Parfois c'est à la mosquée, que Hocine et ses semblables essaient d'amasser de l'argent pour passer un mois tranquille. Nous en trouvons partout, généralement en-dehors de la ville où ils demeurent, des gens comme Hocine, qui ne trouvent que ce moyen pour avoir de l'argent. Pour ceux qui travaillent et qui ont un revenu régulier et assez élevé, les choses ne sont pas aussi simples qu'on pourrait le croire, puisqu'ils trouvent eux aussi des difficultés financières pour faire face aux dépenses de ces deux événements qui surviennent en même temps. Mais il faut dire aussi que la quasi-totalité des ménages algériens font des dépenses inconsidérées durant le mois de Ramadhan et c'est justement cela qui fait augmenter les prix par la loi de l'offre et de la demande - énorme - car comment expliquer que les premiers jours, une véritable razzia est opérée dans tous les marchés sur tout ce qui se vend. Il ne suffit que de quelques heures pour que tous les étals, très achalandés pour la circonstance, soient vidés et il ne reste plus rien à partir de 13 h, surtout les 4 ou 5 premiers jours. En plus, il y a l'achat de sucreries de différents modèles et nous voyons le vendeur de zalabia envahi par une foule très dense deux à trois heures avant l'adhan, bien que les prix pratiqués soient très élevés, et qu'ils le seront plus cette année, car le prix du sucre a gagné près de 10 DA en plus. Quoi qu'il en soit, l'été est encore là pour une dizaine de jours et les pères de familles ont encore le temps de se préparer surtout pour faire face aux dépenses de la rentrée scolaire.
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Posté Le : 23/08/2008
Posté par : sofiane
Ecrit par : Tahar Mansour
Source : www.lequotidien-oran.com