Algérie

Blida, insolente de verdure



Blida, insolente de verdure
On entre dans la wilaya comme dans un immense trou de verdure. Et il est fortement conseillé d'éviter l'autoroute surchargée afin d'emprunter l'ancienne route, celle qui serpente à travers champs, prés, vallons et ces villages plantés dans la nature comme des dessins dans les livres d'enfants... Nous sommes au c?ur de la Mitidja, la région la plus fertile et la plus verdoyante d'Algérie. Celle-là que les colons ont quittée les larmes aux yeux. C'est vrai que, comme l'écrit cet écrivain très « Algérie française », la Mitidja, c'est le paradis perdu. Blida est nichée au c?ur de cette verte contrée et ce sont les musulmans andalous qui, s'étant installés au XV Ie siècle dans cette bourgade, appelée alors Ourida (petite rose), en feront cet immense territoire de vergers grâce à un savoir-faire dans l'irrigation. La ville sera de plus en plus importante, et passant sous domination ottomane, elle deviendra vite le lieu de villégiature des souverains turcs d'Alger. Ainsi, les Ottomans, bien installés, se mettront à l'ouvrage et construiront six portes. Bab el Dzaïr, Bab el Rahba, Bab el Sebt, Bab el Zaouia, Bab el Kseb, Bab el Kebor et Bab el Kouikha constitueront les principales entrées de la ville et si ces portes ont aujourd'hui disparu, leur appellation est toujours de mise par les Blidéens. La colonisation de la ville qui aura lieu en 1839 en fera une ville-garnison avec des casernes qui recevront le gros des troupes et des contingents successifs. Depuis, bien sûr, la cité a énormément évolué et malgré les gros bouchons que forme une circulation intense, il fait quand même bon s'y balader surtout quand avec le crépuscule s'estompe la circulation et que le parfum des roses émanant des villas alentour, devient plus fort que l'odeur âcre des diesel. Pourtant, la ville garde encore les séquelles de vieilles blessures comme cette épidémie de peste qui, au début du XIXe siècle, décima jusqu'à 100 personnes par jour, ou encore ces séismes successifs qui l'ont détruite avec à la solde des milliers de morts. A l'indépendance, la ville renaîtra peu à peu de ses cendres et retrouvera le lustre de cité-traditionnelle qui lui sied si bien. Avec un artisanat de broderie et de travail du cuir, profondément ancré depuis des générations, et aussi une gastronomie fine qui se décline surtout dans son aspect de pâtisserie orientale dans des saveurs uniques. A l'évidence, les Ottomans ont laissé de belles traces et il existe à Blida des pâtisseries-boulangeries réputées à des kilomètres à la ronde. On y vient d'Alger pour acheter ces douceurs typiques, surtout pendant le Ramadhan où les sucreries fonctionnent à plein régime. D'ailleurs, la ville de Blida draine aussi d'autres clientèles qui viennent des alentours et aussi de plus loin pour faire leurs emplettes dans de grands marchés réputés pour la disponibilité des produits de tous genres, épices, vêtements, quincaillerie, ameublement... à l'instar de Bab el Sebt, place forte de tous les négoces, prise d'assaut dès les premières heures de la journée, surtout les fins de semaine. Autour de ces rues bruyantes et surchargées, la vieille ville semble compter le temps et se figer dans une histoire ancienne comme ce quartier El Djoun appelé aussi Douirette où s'alignent de superbes demeures mauresques qui hélas se sont fortement dégradées avec le temps. L'édifice qui ne s'est pas dégradé est indéniablement la mosquée El Kawthar, magnifique joyau architectural aux quatre minarets qui tutoient les nuages. Semblant défier le temps, cet édifice cultuel représente surtout une revanche sur la rage destructrice de l'armée coloniale qui transforma deux des quatre mosquées de la ville en caserne et église. A l'heure du déjeuner, on nous conseille un restaurant gastronomique situé au centre-ville. La Casbah est un restau turc très propret. L'accueil est convivial, le service est rapide et discret, le filet de b?uf, un délice, et les prix sont franchement abordables. Sinon ily a une multitude de petits restaus très accueillants où l'on mange bien et propre. A Blida, il existe encore de nombreux cafés-terrasses où on peut s'attabler au milieu des massifs de fleurs et de roses sous le soleil indulgent de janvier. Blida, littéralement « petite ville » selon le nom qui lui fut donné par Sidi El Kabir, le saint patron qui repose entre ses murs, a donc vite outrepassé ses limites géographiques pour s'étendre d'est en ouest, du nord au sud. A la sortie ouest de la ville, l'hôpital Frantz-Fanon, réputé pour la qualité de ses soins. Beaucoup de services comptent parmi les meilleurs du pays. Dont la psychiatrie qui abrite entre autres la maison où vécut Frantz Fanon. Il paraît qu'il a laissé de dignes successeurs... Le soleil décline et on emprunte l'autoroute. Le chemin du retour est moins encombré et de l'autre côté, d'interminables files de voitures rentrent à Blida. On dirait une lointaine banlieue d'Alger.




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