L'Aïd, cette année, a un goût particulier :
celui, habituel, de la viande, et l'autre, celui de la victoire de l'EN. Ce
n'est qu'un match diriez-vous mais il est devenu un fait de société, un lieu de
convergence de toutes les pensées algériennes.
En effet, et en dehors du fait que nous
renouons avec la grande fête mondiale du ballon rond, c'est cette frénésie
démontrée chez nos frères égyptiens qui retient l'attention de tous. Les petits
et les grands, les hommes et les femmes, les jeunes et les vieux, tous les
Algériens, et peut-être même nos moutons, s'étonnent : c'est l'Aïd, la journée
du pardon, la journée de la communion de toute la nation musulmane et nos
«frères» ne veulent pas changer de sujet. Une vieille femme, pleine de sagesse,
a affirmé : «Aâdjouza (une vieille femme) hakmet khaïène (une vieille femme a
attrapé un voleur)» c'est un proverbe bien de chez nous qui désigne celui (ou
celle) qui ressasse les mêmes paroles contre quelqu'un contre lequel il (elle)
a trouvé une tare, aussi petite soit-elle. Ainsi, durant les deux jours de
l'Aïd, c'était la même rengaine, c'est devenu obsessionnel, casser de
l'Algérien est le sport national égyptien par excellence. On nous ressort
toutes les rancunes enfouies au plus profond de leurs âmes, notre manière de
vivre est décortiquée (du mauvais côté) et on nous impute tous les malheurs qui
leur sont arrivés et même ceux à venir. Ils sont devenus pathétiques à chercher
des preuves de notre duplicité, de notre sauvagerie, de notre incivilité et,
surtout, de notre lèse-majesté ! Non messieurs, vous n'êtes pas nos rois et
nous n'avons commis que le crime de ne pas nous laisser marcher sur les corps !
Les animateurs des débats télévisés essaient par tous les moyens de recueillir
des témoignages nous incriminant. Il y a un qui a appelé un Egyptien vivant en
Algérie pour lui demander comment il a fait pour survivre à l'enfer que nous
autres avons allumé sous lui. Il répondit le plus naturellement du monde que
tous les Algériens sont ses frères, qu'il n'a vu aucun comportement hostile à
son égard et qu'il circule le plus normalement du monde. On lui affirma qu'il y
a un Egyptien qui est décédé dernièrement en Algérie : effectivement, je le
connais, il s'appelle.. il travaillait dans une entreprise de construction et
il est décédé d'une mort naturelle. Je peux vous assurer qu'aucun citoyen
algérien, civil ou faisant partie des services de sécurité, ne l'a touché ni
même ont su qu'il était mort, sauf peut-être à l'état civil. L'animateur était
manifestement déçu par cette réponse et il s'est tourné vers un de ses invités
sans laisser son concitoyen terminer. Heureusement que, chez nous, c'est un
silence hautain qui répond de manière tonitruante à leurs insultes, même les
illettrés écoutent leurs diatribes avec un sourire condescendant, le sourire
que nous avons généralement devant le comportement d'un débile mental.
Pourtant, les choses sont beaucoup plus sérieuses que cela : conditionner tout
un peuple pour qu'il haïsse un autre peuple, un peuple frère, un peuple avec
qui nous avons partagé de longs moments de notre histoire, est une action
indigne !
En
Algérie, c'est la fête, et même le goût amer qu'aurait dû nous laisser toutes
ces paroles fielleuses ne nous empêchera pas d'être fiers et de ne point
répondre à ces provocations enfantines.
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Posté Le : 30/11/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Tahar Mansour
Source : www.lequotidien-oran.com