Algérie

Blâmer le blâme



«Nous ne vivons pas en Suisse, la majorité des élèves sont turbulents et on nous demande, avec cette instruction, de les gâter et de leur donner beaucoup plus de liberté en nous interdisant de leur donner des sanctions. Je suis d'accord pour le blâme, mais pour un avertissement, c'est une alerte pour l'élève et ses parents.»C'est la réplique d'un syndicaliste à une instruction de la ministre de l'Education nationale demandant aux enseignants de ne plus mettre de remarques sanctions sur le bulletin des élèves de faible niveau.
Personne n'a dit au camarade syndiqué que les écoles d'Alger ou de Sétif étaient comparables à celles de Berne et de Zurich mais c'est déjà moins rigolo que «Ouled-Fayet, mieux que la Suisse». On prend les consolations qu'on a à portée de main, n'est-ce pas ' On peut même lui concéder qu'il est «dans son rôle», si on est obligé de rester collé à cette conception de l'action syndicale tout de même vieillotte. Mais parce que précisément... nous ne sommes pas en Suisse, l'école algérienne ne peut pas faire l'économie de quelques réformes pédagogiques, y compris quand elles se déclinent sous la forme de petites mesures du genre. Si elles n'ont pas la prétention de révolutionner un système éducatif qui en a pourtant terriblement besoin, elles préfigurent au moins ce désir ardent de changement qui, plus est, est porté par une femme avec un rare volontarisme. Et dans le cas précis, il ne s'agit même pas de savoir si madame Benghabrit a raison ou tort, c'est la réaction, quasiment clinique dans sa forme et péremptoire dans son argumentaire, qui est à méditer. Tout est dit comme si le principe chez ce syndicaliste était de dire non et advienne que pourra. On s'oppose, on verra ensuite pourquoi ! Quitte à ne pas répondre sur ce dont il est question. Plus simplement, l'instruction parle clairement d'élèves en difficulté de niveau, on lui répond sur les élèves... turbulents qui, en plus, seraient «majoritaires» dans nos classes ! Pourtant, le fait de ne pas accabler des enfants en difficulté scolaire, les «turbulents» compris, ça a donné de bons résultats ailleurs et depuis longtemps. Dans les pays les plus performants, parce que les plus innovants en la matière, non seulement il n'y a plus d'observations blessantes pour les élèves les plus faibles mais on en est à la suppression des notes dans les premières classes du cursus scolaire ! Si ça peut «rassurer» quelque part, la Suisse ne fait pas partie de cette avant-garde. Mais ce qui peut vraiment rassurer, sans guillemets, c'est que les enfants de tous les pays sont les mêmes. Ce sont les conditions générales de leur évolution qui changent d'un pays à l'autre. Ce n'est pas un hasard que les meilleurs résultats s'obtiennent là où on est le moins effarouché par la nouveauté.
S. L.


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