Algérie

Bla Tiles, la promesse du poème



Bla Tiles, la promesse du poème
«Ce n'est pas que nous n'osons pas que les choses sont difficiles. Les choses sont difficiles parce que nous n'osons pas». La formule ne manque ni de célébrité ni de pertinence mais ne comptez pas sur le groupe de fous que sont les initiateurs de Bla Tiles (sans frontières) pour vous ressasser ça. Ils n'ont pas besoin d'illustrer leur folie, ils la vivent et font tout pour la partager. Et un jour, qui sait, la semer aux quatre vents. Au commencement était une discussion. Pas nécessairement savante, tellement ces gens-là cultivent plus de bonheur simple qu'ils n'entretiennent de discours. Salah Gaoua aime trop sa Kabylie pour en remettre une couche dans son désespoir. Alors, entre amis qui ne se regardent pas toujours dans les yeux à force de regarder dans la même direction, ils ont décidé d'aller mettre un pan de vie là où le désert et le chaos menacent de tout engloutir. Une idée différente de gens différents. A esquisser, vivre et puis jeter à la rue. Ça a donné un festival qui n'en est pas tout à fait un mais qui laisse tellement de portes ouvertes qu'il promet tous les horizons. Avec Patrick Michel, c'est une histoire de complices.De son passage professionnel comme directeur du CCF, il s'est fait un regard sur le pays. Un regard où il y a d'abord une affection infinie, ensuite la certitude que les potentialités sont énormes. Et enfin quelques douloureuses désillusions. Avec le comédien Sylvain Bolle- Reddat, Salah Gaoua avait déjà Lyon en partage.Et aller ensemble en quête de nouveaux espaces semble être dans l'ordre naturel des choses. Et d'autres complicités encore, comme l'attachant DJ Alex Milan le Montpelliérain et Emma sa compagne sur toutes les routes de la vie. Il y a aussi, bien évidemment, ceux qui sont de ce côté-ci de la mer pour défricher les champs du bonheur. Comme Arezki Larbi le peintre au regard agaçant de générosité, le réalisateur Slimane Bounia et plein d'autres soldats de l'ombre qui font les fourmis afin que la joie demeure. Mais les beaux rêves ont besoin de mettre les pieds sur terre. Il fallait donc parler aussi des choses qui fâchent. L'argent, bien sûr qu'il faut en trouver. Pour ne pas rester dans la «bricole», rêver plus grand et donner quelque chose aux dimensions de la folie. C'est encore loin d'être évident mais le projet est lancé.Une première édition l'an passé et déjà des satisfactions en dépit d'attendues «résistances». Mais il y a des oreilles attentives et quelques disponibilités. Bla Tiles a «pris» chez ceux qui en ont besoin et ceux qui sont capables de le prendre à bras-le corps. Comme les infatigables relais locaux dont l'association «Assirem» de Tigzirt a donné cette année l'étendue de sa disponibilité en dépit de la faiblesse des moyens. Mais il y a de belles choses qui se font sans presque rien. Presque, parce qu'il fallait quand même y penser. Arezki Larbi et Sylvain Bolle-Reddat l'ont fait.Une randonnée sur les traces de Si Mohand U M'hand. Si Mohand marchait, en quête d'ailleurs mais aussi parce qu'il ne pouvait pas faire autrement. Il suffisait donc d'emprunter un tout petit chemin sur les pas de ses interminables errances pour redécouvrir le chant des cigales au c?ur du poème. Entre Tafra et Tansa, la caravane pédestre a redécouvert le poète proscrit y compris en ces terres où le faisait venir son ami Mohand Akli qui le cachait dans les champs pour ne pas avoir à subir les foudres inquisitrices de la tribu bien-pensante. Mais le poème est resté, Si Muhand aussi.Comme resterait sans doute cet élan du c?ur «sans frontières». Cette année, il a commencé à Tizi et s'est terminé sur le port de Tigzirt autour d'un couscous humble mais gorgé de bleu et de soleil. L'année prochaine, Bla Tiles récidivera. C'est une menace aux «résistants» mais c'est surtout une promesse pour tout le monde.laouarisliman@gmail.com




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