Algérie

Sur les traces de la dernière calèche
L’opiniâtre propriétaire refuse de partir à la retraite, d’envoyer au chômage son cheval et de livrer à la rouille sa voiture. Des nombreuses calèches sillonnant jadis la ville de Biskra, il n’en reste aujourd’hui qu’une seule pour proposer ses services aux rares personnes appréciant encore une virée urbaine à bord d’un véhicule hippomobile. L’opiniâtre Hocine est le propriétaire de ce dernier tilbury. Il croit fermement à l’idée que le développement, sans cesse croissant, des véhicules à moteur sur le triple plan de la performance, du luxe et du confort, n’empêche pas la survivance des vieux moyens de transport comme le vélo, le motocycle ou la bonne vieille calèche. «Ma rescapée de voiture est certes aujourd’hui orpheline dans cette ville, mais je continuerai à refuser de partir à la retraite, d’envoyer au chômage mon cheval et de livrer à la rouille ma voiture», répète Hocine à qui veut bien l’entendre.Il peut compter en cela sur le soutien moral de la présidente de l’association de protection du patrimoine, Mlle Hizia, qui pense, elle aussi, que la calèche, comme d’autres anciennetés, est aujourd’hui «plus qu’un gagne-pain, c’est le témoin d’un mode vie d’un autre temps qu’il faut maintenir et protéger pour la postérité». Ce moyen de locomotion, agréable, est de surcroît écologique. Prenant son travail très au sérieux, Hocine n’hésite pas à fleurir chaque jour les deux côtés de son cabriolet. Sa tenue est authentiquement artisanale avec un large pantalon houiki, une large gandoura blanche, une paire de chaussures en cuir tanné et un turban blanc (chèche). Un tour en calèche dans Biskra avec photo garantie en compagnie de l’excentrique Hocine? Une seule adresse, un petit espace réservé du côté d’une vieille salle de cinéma, l’Atlas (ex-Casino), en plein centre de la capitale des Ziban.Comme un vrai professionnel des relations publiques, Hocine accueille, depuis cinquante ans, ses clients avec un grand sourire et une entière disponibilité. Et selon les voeux du client, il est, soit le simple cocher conduisant un usager vers sa destination soit un guide touristique chevronné.Il se souvient avec nostalgie du temps où Biskra était une destination prisée des touristes étrangers en mal de découverte des oasis, de lieux paisibles, de milieux naturels vierges et de la simplicité et de l’hospitalité des habitants du Sahara. C’était surtout dans les années 70 lorsque les touristes se comptaient par milliers et les hôtels affichaient complets, poussant les visiteurs à louer des maisons de particuliers, signale-t-il. Le service «calèche» était alors très prospère et l’offre ne parvenait pas à suivre la forte demande.Le reflux constaté durant les années 90, commença à sonner le glas du métier de propriétaire de calèche, menacé d’extinction pure et simple. «On en était à un point où il n’était plus possible de gagner de quoi subvenir aux besoins élémentaires de nos familles, encore moins assurer l’entretien coûteux de nos chevaux», affirme Hocine. Et de poursuivre: En ce qui me concerne, c’est surtout ma volonté et mon attachement à cette activité qui m’ont permis de résister aussi longtemps. Mais les choses commencent maintenant à bouger et la ville de Biskra semble retrouver quelque peu son lustre d’antan en matière de tourisme et des innombrables activités économiques qui vont avec.En attendant, cinq hôtels de Biskra ont été nouvellement classés et des travaux d’aménagement de zones d’extension touristique dans les communes de Tolga, El Hajab et Foum El Ghorza ont été engagés à une vitesse tout de même supérieure à celle de...l’unique calèche de la cité.
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