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Bilan d'une année d'exercice du gouvernement Sellal Des sorties pour occuper le terrain



Bilan d'une année d'exercice du gouvernement Sellal Des sorties pour occuper le terrain
Les déplacements du Premier ministre ont un double objectif : s'assurer de l'application effective des deux programmes quinquennaux qui ont coûté plus de 400 milliards de dollars et occuper le terrain, pour faire oublier l'absence prolongée du Président, et prouver, par les actes, que l'Etat fonctionne normalement et que tous ses engagements seront tenus.Le 3 septembre prochain, le gouvernement Sellal aura bouclé sa première année. Une année durant laquelle le Premier ministre aura sillonné une vingtaine de wilayas, en attendant de le faire pour les autres. Un privilège dont n'ont pas bénéficié ses prédécesseurs, sommés de s'effacer devant l'omniprésent président de la République, surtout depuis la "trahison" d'Ali Benflis, alors Premier ministre et qui se voyait déjà appelé à un autre destin. Mais voilà, le président Bouteflika, déjà affaibli par sa première hospitalisation en 2007, a dû ralentir sensiblement ses sorties et ses activités. Sa seconde hospitalisation, en avril dernier, qui le contraint, jusqu'à ce jour, à une éclipse quasi-totale, a laissé la place à son homme de confiance, Abdelmalek Sellal, deux fois directeur de ses campagnes présidentielles. Les déplacements du Premier ministre ont un double objectif : s'assurer de l'application effective des deux programmes quinquennaux qui ont coûté plus de 400 milliards de dollars, et surtout occuper le terrain, pour faire oublier l'absence prolongée du chef de l'Etat et prouver, par les actes, que l'Etat fonctionne normalement et que tous ses engagements seront tenus.
Rien que pour le plan quinquennal 2010-2014, qui tire à sa fin, une enveloppe de 286 milliards de dollars a été dégagée, sans compter les programmes complémentaires qui sont décidés à la faveur des visites qu'effectue le Premier ministre sur le terrain.
C'est, donc, pour vérifier que ces sommes colossales servent effectivement le but pour lequel elles ont été allouées : mettre en place des infrastructures de base à même d'encourager les investisseurs, et la prise en charge des doléances des citoyens en matière d'amélioration des conditions de vie, notamment le logement, l'éducation et la santé.
Il a réussi à allier humour et sérieux
Les sorties de M. Sellal sur le terrain étaient, d'abord, une curiosité pour voir comment l'homme, de nature joviale, allait prendre ses nouvelles fonctions et affronter les problèmes du terrain. Il a réussi son premier test en restant lui-même, c'est-à-dire, alliant humour et sérieux. Cependant, dès qu'il se mettait à parler sérieusement de choses graves, ça sonne la fausse note. L'homme n'est pas un grand orateur et ça se sent dans ses discours. Cela pourrait lui jouer de mauvais tours, au cas où il venait à être appelé à assurer la succession du président Bouteflika.
Même si son humour est fortement apprécié là où il passe et même s'il parvient à convaincre l'assistance avec des mots simples, du cru, il lui arrive souvent d'adopter un ton sérieux, voire menaçant.
Un protocole très allégé, à la limite de la décontraction, un ton du terroir utilisé en direction des responsables locaux, des conditions de travail idéales pour les journalistes, Abdelmalek Sellal imprègne son style. Lui qui a été chargé de faire le travail jusque-là réservé au chef de l'Etat, sillonne les wilayas et distribue des budgets complémentaires. Mais, pas de bains de foule, encore moins de troupes folkloriques dans ses passages, et surtout pas de discours à sens unique. Lui a opté comme son prédécesseur Ahmed Ouyahia, sous Liamine Zeroual, pour des rencontres avec la société civile, à la fin de chaque escale. Mais ces rencontres n'apportent rien, sauf pour les walis et les notabilités locales qui choisissent les invités et leur dictent les revendications à exprimer.
Ceux qui, sur le plan local, se sentent exclus, se considéreront davantage bannis après ces rencontres auxquelles ils n'ont pas droit d'accès ou de parole. Or, si le Premier ministre avait besoin d'un seul son de cloche, il se serait contenté des rapports rédigés par les services des wilayas respectifs. L'opération de communication et de proximité avec les populations, reste, donc, le talon d'Achille du gouvernement, comme elle l'a été pour les sorties officielles précédentes, qu'elles soient celles du chef de l'Etat ou des ministres. Ces visites guidées, tracées par les services des wilayas pour ne montrer que ce qu'elles veulent montrer, n'apportent rien de nouveau. Bien au contraire, elles confortent les imperfections, la mauvaise gestion et la prédominance des pratiques souvent à l'origine de malaises sociaux.
Lorsque le Premier ministre tance les responsables locaux sur les imperfections constatées dans la réalisation des projets, il ne va jamais jusqu'au bout, notamment avec les responsables du secteur de l'habitat où il fait souvent les mêmes remarques concernant l'absence de cadre à même de rendre vivable ces nouvelles cités. Qu'est-ce qui empêcherait le Premier ministre de visiter, à l'improviste, des logements, en principe finis, autres que ceux appelés "logements témoins" qu'on lui présente à chaque fois et qui ne sont pas forcément identiques à ceux qu'auront les futurs locataires ' Qu'est-ce qui empêche le Premier ministre de constater de visu les imperfections dans des projets qui ont coûté des milliards, au lieu de se contenter des explications sur maquettes et autres tableaux que les responsables costumés répètent inlassablement partout où il va '
Des remarques, le président Bouteflika en avait fait lors de tous ses déplacements, sans que cela ne fasse changer les mentalités au niveau local. Parce que, pour les responsables locaux, l'essentiel dans ces visites est d'arracher le maximum de budgets supplémentaires, de revendiquer le maximum de projets, notamment ceux qui ont déjà été arrachés par d'autres wilayas. Partout, on veut des aéroports, des stades olympiques, des CHU, des tramways, des connexions avec l'autoroute Est-Ouest, des quotas supplémentaires en logements sociaux. Partout, on réclame plus de dépenses de la part de l'Etat-providence.
Que faire face aux groupes de pression locaux '
En revanche, dès que le Premier ministre commence à parler d'investisseurs et d'efforts locaux pour en attirer, c'est le silence qui s'installe. Abdelmalek Sellal a beau dire que chaque wilaya a des potentialités qu'il faudrait mettre en valeur. Il a beau affirmer que l'Etat encourageait la création de zones industrielles notamment dans des régions qui n'en disposent pas, ses appels restent sans écho, parce qu'au niveau local, on a toujours cette fâcheuse habitude de ne compter que sur les subventions de l'Etat et, quand il s'agit d'investissements, ce sont les groupes de pression locaux qui en décident, loin de toute logique économique.
Sur ce plan-là, Abdelmalek Sellal n'a pas réussi à faire mieux que ses prédécesseurs et n'a pas su trouver sa propre méthode pour gérer ces problèmes qui se posent sur le terrain, comme celui récurrent de la non-consommation des budgets alloués, faute d'entreprises de réalisation ou de bureaux d'études dans plusieurs wilayas, où les projets et les budgets ont été alloués depuis plus de dix ans.
Ces mêmes wilayas réclament pourtant davantage de projets ! M. Sellal constate, ses conseillers prennent note, mais n'agit que pour faire le pompier pour des cas urgents en ordonnant l'envoi d'équipes de l'urbanisme et de l'environnement pour corriger les plans des projets de logements en cours de réalisation, l'envoi de ministres pour trancher sur certaines questions sectorielles. Mais le Premier ministre n'ose pas bouleverser l'ordre des choses. Il se contente de parer au plus pressé.
M. Sellal préfère adopter une attitude attentiste, préférant gérer les affaires courantes. Il a évité de se déplacer à Ouargla lorsque le mécontentement des chômeurs du Sud a pris de l'ampleur, même s'il a pris une batterie de mesures d'urgence pour répondre aux revendications des chômeurs, sans jamais les recevoir.
Même sur les sujets graves, touchant à la sécurité du pays et à la situation dans le voisinage, le Premier ministre se contente du strict minimum : dire ce qu'il en pense en deux trois phrases, sans recourir aux discours fleuves et aux expressions consacrées.
Pourtant, le Premier ministre a des idées et tient, partout où il va, à marteler qu'il est un homme de parole et qu'il tiendra ses engagements. Il a pris certaines mesures, comme celle relative au départ à la retraite pour les personnes ayant atteint l'âge de 60 ans, comme il compte proposer au débat lors la tripartite un certain nombre de questions d'ordre économique et social, mais ce sont les idées qu'il lance, et qui méritent un vrai débat, comme la révision du modèle économique qu'il évoque souvent, mais dont les contours restent très vagues.
Il est vrai que le Premier ministre est assis entre deux chaises : celle de la mission initiale qui lui avait été confiée, c'est-à-dire mener à bien le programme du président de la République, préparer la révision de la Constitution et l'élection présidentielle de 2014, et celle qui consiste à couvrir l'absence prolongée du chef de l'Etat et à prendre la parole quand il le faut. À sa décharge, également, le fait d'avoir hérité d'un gouvernement qu'il n'avait pas choisi et dont le remaniement devait se faire bien avant l'été, mais a dû être reporté en raison de l'hospitalisation du président Bouteflika.
A. B
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