Une nouvelle loi de finances complémentaire pour 2011 et un nouveau
billet de banque d'une valeur de 2000 dinars.
Ces «nouvelles» mesures annoncées jeudi par le ministre des Finances et
la Banque d'Algérie reviennent alimenter de vieux débats algériens sur la
prévisibilité économique, sur l'informel et l'inflation.
Une nouvelle loi de finances
complémentaire, une ! La «tradition» désormais établie est respectée. Jeudi, le
ministre des Finances a annoncé qu'une nouvelle loi de finances complémentaire
(LFC) sera nécessaire, pour la troisième année consécutive, afin de prendre en
charge les mesures prises par le dernier Conseil des ministres pour soutenir
l'emploi et l'investissement. Karim Djoudi a d'emblée choisi de répondre à la
critique - sérieuse - sur l'incapacité du gouvernement à faire une prévision
budgétaire annuelle qui est la durée la plus basique qui soit. Sans les mesures
exceptionnelles annoncées dans le dernier Conseil des ministres, l'Algérie
aurait-elle échappé à une autre «LFC» ? Certains en doutent et relèvent que la
LFC est désormais incluse, d'emblée, dans la démarche du gouvernement. La
répétition du recours à la LFC tend à les conforter. Ne pas avoir une démarche
sur un an, cela fait néanmoins désordre. A l'évidence, le ministre en est
conscient en affirmant que le recours à une loi de finances complémentaire «ne
signifie pas un manque de visibilité en matière de prévisions des finances
publiques du pays» mais apporte des «correctifs à des décisions exceptionnelles
qui seront prises durant un exercice donné». Bien entendu, les incidences
financières des mesures prises récemment doivent être officiellement inscrites
dans le budget de l'Etat. Mais la LFC servira aussi, selon le ministre, à
consacrer certaines «dispositions légales». Nul ne sait quelles sont ces
dispositions. Mais il faut savoir que les opérateurs, algériens comme
étrangers, n'oublient pas que les dernières lois de finances complémentaires
ont été l'occasion d'impulsion des changements significatifs en matière de
politique économique. L'absence de clarté sur les «dispositions légales» à
consacrer ne manquera pas de susciter quelques appréhensions. Le débat sur la
pertinence d'un recours systématique à la LFC n'est pas près de s'estomper.
Hausse des salaires et inflation
Les observateurs de la scène économique retiendront davantage le fait que
le ministre des finances, Karim Djoudi, admet qu'il existe un risque de poussée
inflationniste en 2011. Celle-ci est un effet quasi mécanique du
renchérissement des produits alimentaires – en général importés – et des
hausses de salaires sans contrepartie productive. Les augmentations de salaires
décidées par les pouvoirs publics n'allant pas, dans une proportion
significative, à l'épargne mais à la consommation, l'effet inflationniste est
certain. M. Djoudi semble tabler sur l'hypothèse que les nouveaux revenus ne
seront pas consommés mais transformés en épargne. Ainsi, selon la projection
optimiste du ministre des Finances, les rappels au titre du régime indemnitaire
de 2008, 2009 et 2010 pourraient être transformés en épargne par les ménages
afin de l'utiliser dans les dispositifs de soutien à l'accession au
logement.»Les banques ont tout intérêt à profiter de cette masse d'argent mais
doivent être plus actives en termes de mobilisation de l'épargne», a-t-il
déclaré. La masse monétaire en circulation enfle du fait des injections
massives d'argent public dans l'économie sans contrepartie de production. Les augmentations
de salaires comme les dépenses publiques vont renforcer une demande qui n'est
pas satisfaite par une offre croissante. Cela entraîne mécaniquement à une
hausse des prix qui vient annuler ces augmentations. L'épargne, qui est en
effet une issue à cette poussée inflationniste, n'est possible que lorsque les
ménages arrivent à dégager des excédents. Cela n'est possible que pour une
petite partie des ménages. Dans une économie où les revenus salariaux sont
engloutis par la consommation et les besoins primaires et où la production
stagne, l'effet inflationniste est assuré. Il faut ajouter également que les
taux d'intérêt, très bas, sont totalement dissuasifs pour l'épargne et poussent
à la consommation et donc à l'inflation. Cet aspect de la politique monétaire
algérienne, qui aurait été plus efficace dans l'encouragement de l'épargne, ne
semble pas près d'être remis en question.
Un billet de 2000 dinars… pour le bonheur de l'informel
«On perfuse un corps structurellement anémié au lieu de tenter de le
régénérer », estime un spécialiste qui précise que cette régénération est un
effort de moyen terme. Le fond du problème, selon lui, est l'indigence de la
production locale. L'inflation n'est pas un « mal absolu, mais elle est
dévastatrice dans un contexte de croissance réelle atone ». Les économistes
relèvent également que l'inflation est dans une large mesure importée et liée.
La tendance à la hausse des prix des produits de base est un phénomène global
contre lequel la seule variable d'ajustement serait la hausse de la production
locale qui reste… faible. Il faut aussi noter, ainsi que le fait le ministre
des Finances, que les effets multiplicateurs des investissements
d'infrastructures sont très faibles. Les autoroutes réalisées par les
entreprises étrangères améliorent le réseau routier, ce qui est important,
elles n'ont pas d'effet d'entraînement sur le reste de l'économie. L'annonce de
la Banque d'Algérie au sujet de la création d'un nouveau billet de banque d'une
valeur de 2.000 DA (deux mille dinars), afin d'assurer ‘'une disponibilité
accrue'' de la monnaie fiduciaire, va plaire au secteur informel. Les acteurs
de cette part importante de l'économie nationale seront sans doute les plus
impatients à vouloir palper ces 2000 dinars dont la date de mise en circulation
n'est pas encore connue. Selon la Banque d'Algérie, la nouvelle coupure, «qui
circulera concomitamment avec les autres billets de banque actuellement en
circulation, contribuera au rafraîchissement de la monnaie fiduciaire et à sa
disponibilité accrue». La nouvelle émission coïncide avec le 47ème anniversaire
de la création de la monnaie nationale, précise la BA dans un communiqué.
Au-delà de cet aspect
«commémoratif», la mise en circulation de ce billet à «forte» valeur faciale
est l'expression d'une inflation, jusqu'ici, relativement rampante et de la
domination très inquiétante de la sphère informelle.
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Posté Le : 26/03/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salem Ferdi
Source : www.lequotidien-oran.com