Dans le jargon local des marins pêcheurs,
on l'appelle «Benamri». Il s'agit du phoque moine de la Méditerranée. «Dès
qu'il voit flotter quelque chose à la surface de l'eau, «Benam-ri» s'arrête. Et
sans qu'on sache trop comment, sardines, anchois, bonites et autres
s'agglutinent, tournent et virent vers le rirage», nous raconta ammi moussa, un
vieux briscard de la mer. Ne pas confondre avec le Delphinidé (Delphinidéa)
dont le rôle est aussi de détourner (peut-être encore mieux et plus) le flux
des bancs de poissons migrateurs. Avant d'ajouter avec grande tristesse,
qu'aujourd'hui ce serviteur manque énormément au marin pêcheur. Du nom
scientifique «Monachus Monachus», le phoque moine est un mammifère de la mer qui
passe pour être un maillon de la chaîne écologique. D'anatomie petite et de
peau noirâtre, ce phoque en costume de prélat est typiquement méditerranéen.
Le phoque mâle a un pelage brun foncé à
noir avec une tache blanche sur le ventre. La maman phoque moine porte son
petit pendant 10 mois. Le petit vient au monde dans une grotte où ils sont tous
les deux en sécurité. Le petit pèse déjà 16 à 18 kg à la naissance et mesure 80
à 90 cm. Le jeune a une belle fourrure laineuse noire avec une tache plus claire
sur le ventre. Espace protégé par les lois internationales, cette espèce est
apparemment en voie de disparition. Au milieu du siècle dernier, ils étaient
environ une trentaine de phoques moines à fréquenter les côtes bénisafiennes.
Dans la fin des années 1980, il n'en était resté q'un seul. En ce temps, ce
dernier apprivoisait l'homme de mer au point où il arrivait jusqu'au bassin du
port sans jamais être inquiété. Il avait même une grotte sous le port. Puis un
jour, il s'est éclipsé à jamais. Cela fait au moins deux décennies que plus
personne n'a vu ni ce phoque ni un autre nager dans les eaux bénisafiennes.
Sauf Rabah peut-être, un marin pêcheur qui traversait la Méditerranée en 2006
en revenant d'Almeria (Espagne) à bord d'un chalutier, où il croît dur comme
fer avoir aperçu un «Benam-ri» de 3 m en plein milieu de cette mer chaude.
Alors reverra-t-on un jour un phoque moine revenir ou même s'approcher de l'île
de Rachgoun ou du port.
Le phoque moine de la Méditerranée peut
vivre plusieurs décennies. Jamais, me lance un océanologue. Le phoque moine ne
pas supporter d'être dérangé. Le dernier rescapé vivait dans une grotte située
sous l'île de Rachgoun avant que viennent les braconniers nuire à sa quiétude.
Le phoque moine souffre aussi de la dégradation et de la perte de son habitat,
ajoute notre interlocuteur. L'avancée du béton sur la côte met en péril son
environnement. La pollution de la mer le rend aussi malade et faible à en
mourir. Et à cause de la pêche excessive, ces animaux trouvent moins de nourriture
et ils émigrent vers le large. Comme si cela ne suffisait pas, des phoques sont
pris dans les filets trémails des pêcheurs et furent passés sous silence entre
les lames de couteau des pirates des temps modernes. Pour la simple raison,
l'accusant de manger trop de poissons. En 1990, quand une équipe de chercheurs
de l'Université de Marseille était venue pour prospecter sur ce genre de
mammifère, elle était repartie bredouille. Pendant plus d'une semaine, ces
scientifiques français ont parcouru toute la côte de l'Ouest, de Ghazaouet à
Mostaganem, pour être à la rencontre de cette espèce marine afin de l'observer
dans son mode de vie. Finalement, pas un phoque moine n'a apparu à l'horizon.
Cette même équipe, en découvrant, sous l'île de Rachgoun, une grotte récente
mais presque totalement affaissée, avait mis fin à son expédition dans la
région. Aujourd'hui, beaucoup de Bénisafiens se rappellent du dernier
«Benam-ri» du port, un souvenir ineffaçable.
Enfin, on nous a fait un autre clin d'Å“il,
celui sur des tortues de mer. Plus connue sous le nom de caouane - et de nom
scientifique, Carrela - celles-ci ont aussi presque disparu pour les mêmes
causes. A Béni-Saf, la dernière en date s'était entremêlée dans un engin de
pêche d'un chalutier. Elle avait été remise à l'école de pêche de Béni-Saf où
on avait pris soin d'elle avant de lui remettre sa liberté une semaine après
non loin de l'île de Rachgoun.
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Posté Le : 30/06/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Mohamed Bensafi
Source : www.lequotidien-oran.com