Algérie - Revue de Presse

Béni-Saf - Haï Ennahda (anciennement Sagla)



La partie immergée de l’iceberg Nul n’ignore dans notre ré-gion que la ville de Béni-Saf doit sa création à la mine de fer (Mactaâ El-Hadid), vers la fin de XIXe siècle et que plus tard, le port par lequel ce minerai était expédié vers les aciéries du pays colonisateur, avait contribué à développer définitivement la région. Les corons pour les cadres privilégiés Les gourbis pour les compagnons de misère Une ville dont les pionniers ne ciblaient que l’exploitation du minerai de fer et des hommes trouvés sur le terrain et qui n’avaient que leurs bras à leur offrir. Ces derniers étaient tout simplement vus comme une main d’œuvre taillable et corvéable à merci, puisque le côté social était totalement occulté de cette entreprise. Et pour cause. La main d’œuvre locale se scindait en deux catégories. Celle qui avait le «privilège» d’habiter les corons spécialement conçus par et pour l’exploitant et l’autre. Celle qui regroupait aussi bien les autochtones que les Marocains ramenés du Rif et qui venaient d’être soumis aux «réjouissances» du Protectorat français. Ces compagnons de misère étaient acculés à gîter comme ils pouvaient, sur les hauteurs de la ville, autrement dit, dans des gourbis, aux dires de très vieux mineurs, dont les parents avaient traversé plus ou moins sans encombre cette époque. «Ces populations s’agglutinaient dans des quartiers, comme ceux de Sidi Boucif, comme pour se placer sous la protection de la baraka du saint patron de la ville, rapporte Ammi Zenasni, un vieux mineur qui a hérité son métier de son défunt père, ou carrément ceux de Sagla survivant dans des conditions, où la promiscuité et les problèmes de salubrité publique étaient vécus dans l’indifférence générale».   La page de l’ère coloniale tournée, Oubliés les enfants qui ont tant donné de leur sang…   Dans la cité Sagla ou Boukourdan, comme se plaisaient à l’appeler nos ancêtres, «il semble que d’autres «gourbis» en dur aient supplanté ceux construits de bric et de broc ou en torchis, hérités de l’époque coloniale, notamment sur toute la façade orientale, où les constructions illicites sont légions et autant de sources de problèmes restés insolubles à ce jour», conclut notre interlocuteur. En fait, «Haï Ennahda», ce nom de baptême pompeusement attribué par l’Indépendance à l’ex-Sagla, n’a jamais autant souhaité renaître de sa léthargie, lui qui fut le berceau de la résistance à l’occupation coloniale, comme on le rapporte ici, en faisant référence à maints hauts faits d’armes. Parmi eux, celui d’un certain 22 avril 1956, témoin de l’attaque par nos Moudjahidine de la fameuse poudrière qui approvisionnait la mine en explosifs. Qu’a-t-on fait pour ce quartier dont les enfants ont donné tant de leur sang pour que vive l’Algérie? Et là, ce sont les habitants de la partie basse et orientale qui s’inquiètent. Les voies de Sagla, comme celles du Seigneur, restent impénétrables «Les voies d’accès y sont étroites et sinueuses. Les habitations pratiquement imbriquées et superposées ressemblent encore à ces villes européennes du Moyen Âge, où les maladies contagieuses trouvaient un lieu de prolifération idéal pour emporter des populations entières, quand ce n’étaient pas les incendies qui s’en chargeaient», nous dira Mohamed, un fonctionnaire qui avoue, la mort dans l’âme, vivre là depuis sa naissance, pour ne pas quitter ses vieux parents. En fait, les habitations conçues et érigées de manière anarchique dans cette partie Est de la cité, dans un style tout en escalier, à vous donner le tournis, font que les regards indiscrets même involontaires causent fatalement bien des problèmes de voisinage. Les voies d’accès étant essentiellement piétonnières, aucune ambulance ou véhicule des services de sécurité ne pourrait venir au secours des familles», déplore un père de famille dont la femme attend un heureux événement. «Combien de nos parturientes ont accouché en cours de route et de malades qui ont vu leurs cas empirer, avant d’arriver à l’hôpital, au temps où il n’y avait pas encore de polyclinique», surenchérit un autre citoyen. Sagla a résisté même au séisme de décembre 1999 Sinon,… il aurait pu contribuer à sa reconstruction «Le pire, fera remarquer un autre habitant, fut atteint à la suite du séisme du 22 décembre 1999. Même nos maisons ont été épargnées par la violente secousse et la panique qui s’en est suivie, appelle à une réalité incontournable. En fait, nous habitons dans une région réputée pour son activité sismique constante et où les risques sont bien réels. Alors, achève-t-il, quand donc se décidera-t-on à raser cette partie hideuse, qui continue à défigurer notre ville et que même le séisme de 1999 n’a pas réussi à faire?...» Pour un autre père de famille c’est le ramassage des ordures, qui rend encore plus précaire la situation sanitaire de ce quartier. Selon lui, «il faut grimper jusqu’au sommet de la colline, où sont accolées nos habitations, pour y déposer nos sachets.» Un jeune, un peu moins conformiste, nous invitera aimablement à nous pencher par-dessus le mur bordant le mausolée de Sidi Brik et courant le long de la façade maritime sur plus d’un kilomètre. Un hideux spectacle s’offre à nos yeux, nous qui croyions naïvement qu’un certain programme, dénommé «Algérie blanche» se donnait pour objectif d’assainir ce genre d’outrage à une vue qui se voulait imprenable. Voilà ce qu’il en est de la portion la plus mal lotie de la cité «Sagla». Des lotissements bien agencés, Mais une route gruyère et une pinède dépotoir Plus haut, à l’exception des lotissements bien agencés et témoignant d’un niveau de vie en expansion continuelle et auxquels toutes les infrastructures de base et sécuritaires répondent aux besoins légitimes, les chaussées ressemblent à de gigantesques morceaux de gruyère. Impact direct des précédentes saisons hivernales et l’enfer pour les automobilistes. L’infiltration des eaux n’épargne plus rien. Dernière victime des intempéries et de leurs dommages collatéraux, le mur de soutènement, censé faciliter l’élargissement de la chaussée, entre le pont en aval et le carrefour de Ghar Ribo (Plan II), s’est effondré sur près de 100 mètres de long. Un danger de plus pour les usagers et une autre raison de le bouder pour les taxis et transporteurs, lorsque le client a besoin d’eux. En bordure de la partie nord-ouest, près du lieudit «Oued Benchella», une belle pinède cerne les lieux. Au lieu de servir de terrain de villégiature, elle sert plutôt de dépotoir s’offrant à la vue de tous les passants. Tous les efforts de l’administration, pour y apporter une touche d’embellissement, semblent voués à l’échec et pour cause. Sitôt ramassées, les ordures sont remplacées par des mains inciviques. Sagla, réceptacle de tous les facteurs négatifs «Repose-toi sur ses électeurs et tu passeras sûrement» «On a rarement vu, dira un vieillard tout ridé, autant de facteurs négatifs rassemblés en un seul point, comme à Sagla. Heureusement que, grâce à la volonté d’Allah, aucune épidémie ne s’y est encore déclarée, même si du temps du défunt P/APC Zahraoui Med, des pétitions lui avaient été adressées, pour remédier aux problèmes vécus». Haï Ennahda ou Sagla, comme on continue à l’appeler, vivote ainsi et les quelque 7 à 8.000 âmes, qui y résident faute de mieux, représentent la plus importante concentration de la ville de Béni-Saf, dont la population avoisine les 50.000 habitants. Beaucoup comparent la partie basse, toute proportion gardée, à la fameuse Casbah d’Alger. D’ailleurs, ne conseille-t-on pas aux futurs élus? : «Repose-toi sur ses électeurs et tu passeras sûrement!...» Du côté de l’Hôtel de Ville, on nous confirme qu’un plan d’action avait bien été concocté effectivement, pour déloger quelque 200 habitations ciblées. «Un danger permanent», reconnaissait un cadre de l’APC. Mais qu’en est-il advenu depuis?... Madani Mohamed


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)