Algérie

Beni Haoua : Un été morose à l'ombre de Mama Binette



Beni Haoua. 160 km à l'ouest d'Alger. Avec Ténès dont elle est distante d'une quarantaine de kilomètres, Beni Haoua est l'autre grosse attraction du littoral de la wilaya de Chlef. Sur la plage principale, une splendide grève de 2 km bordée d'une belle montagne, des grappes d'estivants se dorent au soleil. Parmi eux, Bilel, 22 ans, jeune campeur originaire de Blida qui est venu passer ses vacances avec ses potes. Lunettes de soleil, chapeau noir et mèches rebelles, il a quelque chose de Micheal Jackson. « Nous sommes ici depuis trois semaines. Nous sommes venus camper ici, car c'est vraiment beau et tranquille, et les gens sont très gentils », dit-il. « Nous resterons encore quelques jours, jusqu'à ce que nous ayons épuisé toutes nos économies et nous reviendrons la dernière semaine du Ramadhan », confie Bilel.S'il apprécie la majesté du site, notre jeune campeur n'en déplore pas moins le peu de commodités que propose la plage. « Makach ettaouil. Il n'y a même pas de toilettes, pas de douches, pas d'électricité, même pas une buvette. Il faut aller dans la nature, à des distances parfois impossibles, pour faire ses besoins. Pour une bouteille d'eau fraîche, il faut remonter jusqu'en ville. Je ne comprends pas pourquoi ils n'ont pas loué la plage à des prestataires de services. Tout le monde y aurait trouvé son compte », s'interroge-t-il. Seul un poste de la Protection civile donne un semblant de solennité au site. Sinon, le camping sauvage paraît être la règle. D'ailleurs, nos jeunes vacanciers ont posé leurs baluchons sans demander l'avis de personne. Les traditionnels rabatteurs qui écument les plages pour proposer parasols, transats et autres accessoires de baignade sont invisibles. Il faut tout ramener avec soi. Voilà qui résume l'état d'abandon auquel est livrée une bonne partie de notre littoral. Même l'eau potable fait défaut. Comme à Ténès, des camions sillonnent la ville de Beni Haoua et proposent de l'eau douce, l'eau du robinet étant saumâtre (quand on la trouve). Et c'est 1000 DA la citerne de 1000 l. En termes d'infrastructures, Beni Haoua ne dispose que de quelques bungalows, patrimoine de la commune pour une partie d'entre eux, et d'un camp de toile loué « à vie » à Sonatrach pour un montant annuel de 60 millions de centimes.Avec l'été et le Ramadhan qui se chevauchent, c'est l'économie de la ville qui prend un coup. A la plage du centre-ville aussi bien que celle de Tighza qui est aussi une dépendance de la commune de Beni Haoua, les estivants se sont massivement volatilisés avec l'arrivée du mois du jeûne. « Les vacanciers sont partis passer le Ramadhan chez eux, alors, le commerce périclite. On ne travaille plus qu'avec les locaux », dit un épicier. Une situation que la ville partage, au demeurant, avec nombre de bourgades côtières qui ne travaillent que trois mois sur douze. Beaucoup de légendes ont été tissées à propos de Beni Haoua et son histoire. Sa population, majoritairement berbérophone, ne jure que par une femme pieuse, une Hollandaise convertie à l'Islam, nommée affectueusement Mama Binette, et à qui l'on attribue une certaine baraka. « Son bateau avait chaviré dans la région. Elle a été repêchée, s'est convertie à l'Islam et est devenue une sainte, une waliya dont les gens viennent à ce jour quérir la baraka », explique un habitant de la ville. Son mausolée est perché à flanc de colline et domine la grande plage de Beni Haoua. Nous lui avons rendu une « ziara » mais le mausolée était, hélas, cadenassé. « A la mémoire de quelques femmes dites hollandaises, rescapées du naufrage du Banel, dans la baie des Souahlias en 1802 », décline une plaque commémorative posée par l'ambassadeur des Pays-Bas, Henk Revis, en 2008. L'ambassade de Hollande avait, de fait, financé la restauration du mausolée. Puisse Mama Binette veiller sur les trésors cachés de Beni Haoua en attendant un sauveur sous l'apparat d'un preux capitaine d'industrie'


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