Algérie

Benghebrit: une femme de combat



Elle a vraiment marqué l'année en cours
Elle a tenu tête aux islamistes. Elle n'est pas la seule, d'autres avant elle l'ont payé de leurs vies. Son action est la continuation d'un combat qui a déjà ses martyrs.
De toutes les femmes médiatisées ces dernières semaines, il en est une qui, à la veille du 8 mars, était encore «au four» à tenter de convaincre des syndicats de la nécessité de mettre l'intérêt de l'institution éducative et des élèves au-dessus de toute autre considération.
On aura deviné que le propos concerne la ministre de l'Education nationale qui, actualité oblige, s'illustre comme la femme algérienne, actuellement, la plus proche de «l'enfer».
Au moment où des millions d'autres épouses, soeurs et collègues se préparent à s'offrir un après-midi de libre, histoire de méditer sur ce qui a été réalisé et ce qui reste à faire pour l'émancipation de la femme algérienne, Nouria Benghebrit est face à plus d'une dizaine d'hommes, à tenter de sauver une année scolaire fragilisée par une surenchère syndicale qui ne semble pas en finir.
A force de faire l'actualité, encore et encore, notre ministre de l'Education nationale est en passe de se voir décerner le titre de la femme de la décennie et pas seulement de l'année. Depuis sa nomination à la tête de l'Education nationale, elle n'a pour ainsi dire pas connu de repos. Missionnée par le président de la République pour réformer l'école, elle a trouvé sur son parcours une «meute» d'obscurantistes décidés à lui barrer le passage. Visée par une féroce campagne de dénigrement, allant jusqu'à «fouiner» dans l'étymologie de son patronyme pour lui trouver des origines juives, alors que son père est un moudjahid de la guerre de Libération nationale et son grand-père, un savant musulman connu et respecté, les forces de la régression ont multiplié les attaques, avec l'objectif assumé de l'empêcher de mener sa mission. Les têtes de pont de l'islamisme algérien ont tout fait pour la faire démettre.
Chaque décision, la moindre déclaration, le plus petit déplacement est scruté, analysé et systématiquement retourné contre la ministre.
L'affaire du programme scolaire prétendument rédigé par des spécialistes français, la disparition de la «basmala» de quelques manuels scolaires, la fausse réduction de la tranche horaire réservée à l'éducation islamique constituent autant de batailles d'arrière-garde imposées à la ministre pour, à défaut de la faire démettre, au moins l'empêcher d'avancer. De mémoire d'Algériens, on n'a jamais assisté à un tel déchaînement de critiques et d'attaques contre un seul ministre, sur une période aussi longue. De tous les membres de plusieurs gouvernements, Nouria Benghebrit est la seule à avoir fait l'objet d'un tir groupé émanant des partis islamistes, de l'association des ouléma et de personnages intégristes. n véritable plan de guerre a été monté pour freiner son élan. Si un véritable «arsenal» a été déployé contre elle, ses contradicteurs n'ont pas réussi à la démoraliser. C'est un fait, encore visible aujourd'hui, puisque après l'épuisante épreuve de la grève du Cnapeste, elle a reçu debout les syndicats du secteur, prête à mener d'autres combats. Ce tempérament de battante, on peut aisément le deviner à la lecture d'une partie de sa biographie: «Elle obtient en 1973 une licence en sociologie, puis en 1977, soutient son diplôme d'études approfondies (DEA) en sociologie de l'éducation à l'université d'Oran sur la problématique de l'orientation scolaire et professionnelle. Elle était une étudiante studieuse, en phase avec les données politiques de l'époque qui mettaient la majorité dans le giron des «progressistes» luttant contre l'impérialisme et le capitalisme exploiteur. Elle était alors très active dans le Comité universitaire de volontariat (CUV) qui mobilisait les étudiants dans la campagne d'explication de la Révolution agraire aux paysans. En 1982, elle obtient son doctorat, dans le même domaine d'études que son DEA, délivré par l'université Paris V. Elle est habilitée à diriger des recherches et spécialiste des sujets relatifs à l'éducation, la jeunesse, les femmes dans la société et la famille.»
Une femme avec un tel parcours et tous ces bagages intellectuels a encore de la réserve.
A 65 ans et quelques jours, Nouria Benghebrit entrera dans l'histoire de l'Algérie, comme la femme qui a tenu tête aux islamistes. Elle n'est pas la seule, d'autres avant elle l'ont payé de leurs vies. Et c'est parce que son action est la continuation d'un combat qui a déjà ses martyrs, Nouria Benghebrit ayant où puiser de l'énergie et de la volonté, que ses adversaires de l'heure ne pourraient même pas soupçonner la puissance.


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