Algérie

Belkacem, un céramiste novateur pionnier à Oran Artisanat



Belkacem, un céramiste novateur pionnier à Oran Artisanat
Belkacem le dit lui-même : «Sans vouloir nous vanter, nous sommes les pionniers à Oran et même aujourd'hui ceux qui ont essayé de faire comme nous ont fini par jeter l'éponge car, en plus du métier,il faut peut-être aussi avoir la passion.»
Notre interlocuteur est céramiste, diplômé d'abord de l'Ecole des beaux-arts d'Alger en 1979 avant de bénéficier d'une bourse qui le conduit en Espagne, à Valence, où il passe 6 années à parfaire ses connaissances. De retour au pays en 1987, il commence tout de suite à travailler à Oran. «J'avais déjà mon matériel et dès que j'ai fabriqué les premiers articles, j'ai entamé une petite campagne de prospection en allant démarcher quelques clients. Certains ont refusé parce que c'était nouveau, mais d'autres, heureusement, ont accepté et c'est comme cela que je me suis lancé», se remémore cet artisan (qualifié d'artiste par ses pairs) qui, aujourd'hui encore, malgré les produits d'importation bon marché, tient toujours le cap. «Des clients me demandent le prix d'un article et quand je leur annonce par exemple 2000 DA, ils me répondent qu'à 500 on peut acheter une veilleuse de même dimension à Mdina Jdida. C'est un choix à faire car ce n'est pas la même chose. Si vous voulez acheter quelque chose d'authentique, avec la signature, il faut payer le prix.»
Cette explication ne tient pas compte de l'augmentation du coût des matériaux utilisés et de toutes les façons les prix pratiqués ne sont pas exagérés. Evidemment avant ça marchait beaucoup mieux. Les gens étaient épatés et en redemandaient, mais en même temps il fallait tenir compte des goûts qui s'exprimaient, ce qui a conduit l'artisan novateur à adapter ses créations mais sans trahir le souci de la qualité. «Notre parole était en jeu et c'est pour cela que nous ne prenions qu'un client par ville : Annaba, Constantine, Alger, Sétif, Djanet, Tlemcen, Tiaret, Saïda, etc. Après la décennie noire, il y a eu l'importation mais, comme nous avons gardé notre ligne de conduite, franchement on a pas eu de problèmes.» Entre-temps le style a évolué en même temps que la décoration avec un penchant parfois vers le moderne, parfois vers le mauresque avant de passer à la redécouverte du mode berbère relooké avec la déformation des motifs et l'ajout d'une palette de couleurs, ce qui a fini par séduire le public. Pour la poterie traditionnelle, on utilise généralement de la terre rouge.
Aujourd'hui, celle-ci est mieux traitée mais Belkacem travaille avec la terre blanche, indisponible et donc importée. Le constat est que personne ne produit de la terre en Algérie mis à part la terre rouge. Pourtant, tous les ingrédients existent mais encore faut-il que des entreprises se penchent sur cet aspect. «La céramique, explique-t-il, englobe tout : la terre rouge, la terre blanche, la porcelaine, le grès, toutes ces argiles cuisent à différentes températures. A titre d'exemple, la vraie porcelaine cuit à 1480 degrés mais, malheureusement, personne ne le fait, car les matériaux coûtent excessivement cher. Nous avons tous les ingrédients pour faire de la porcelaine en Algérie mais personne ne s'y aventure parce que ces ingrédients se trouvent dans des mines et il faut aller les extraire, les nettoyer avant de les mélanger pour obtenir la matière de base.»
Parlant des procédés qui entrent en jeu dans son travail, l'artisan dit privilégier le moulage, qui consiste à créer la pièce avant d'en fabriquer un ou plusieurs moules et passer à la cuisson puis à la décoration. Si c'est une production semi-industrielle, on peut aller jusqu'à 100 ou 200 moules pour une même pièce, sinon on peut fabriquer dix moules et commencer à travailler. «Nous avons des articles qui se vendent depuis 20 ans car ils sont très demandés. On change juste le moule car il s'use et perd son relief et ses motifs, sinon la technique de réparation est toujours la même.» La transmission de ce savoir-faire n'est pas toujours aisée car, pour lui, les jeunes d'aujourd'hui veulent en même temps apprendre et gagner beaucoup d'argent, ce qui n'est pas possible. «J'ai commencé tout seul pendant une année, mais il y avait ma femme qui m'a aidé et je peux vous dire qu'au début c'était toute la famille qui a mis la main à la pâte : mes belles-s'urs, ma belle-mère et mon beau-père.»
Son atelier reçoit des apprenants venus d'un centre d'Oran et même de tout le pays par l'intermédiaire du ministère. Des expériences qui, malheureusement, n'ont pas abouti. Mais son affaire marche aujourd'hui avec des salariés qu'il a lui-même formés. Ses produits ont été exposés un peu partout dans le monde, en Europe, mais aussi dans certaines villes du Moyen-Orient : Dubaï, le Caire, etc. Pour lui, ce n'est pas toujours la fête mais, «Dieu merci, il n' y a pas à se plaindre.»


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