1ère partieLa ville de Béchar vit actuellement sous lafrénésie d'une grande métamorphose infrastructurelle. Elle fait en quelquesorte peau neuve par une vaste opération de toilettage. Du moins en ce quiconcerne le centre de la ville, dans ses aires réservées à la circulationautomobile et piétonne.Ainsi, les trottoirs et leurs borduressont-ils pris d'assaut par une ruche de terrassiers et de maçons qui s'échinentà arracher les vieilles bordures et les anciens revêtements pour les remplacerpar des matériaux nouveaux et ce, au grand plaisir des citoyens de cette cité,heureux d'avoir enfin (à défaut d'autres choses) des trottoirs neufs et parvoie de conséquence propres : pour combien de temps ? Effectivement, il ne faitaucun doute que la propreté et l'hygiène sont avant tout des faits culturels,autrement dit, des faits de civilisation avant d'être des actes matériels.UNE REFECTION FRENETIQUED'aucuns se demandent : «pourquoi tant detravaux «maintenant et tout de suite», qui touchent pratiquement tout le centrede la ville et même certaines parties de sa périphérie, perturbant lacirculation et créant une tension avérée sur les matériaux de constructionbasiques : sable, gravier, ciment, eau etc. ?». Il est vrai que d'autres villessubissent le même rush mais pas dans ces proportions. Cela ressemble à unecourse contre la montre, comme s'il fallait consommer les crédits à tout prixet avant une certaine échéance qui serait fatidique. Cestravaux, quoique bienvenus, gênent la circulation aussi bien automobile quel'usage des trottoirs. Ainsi, piétons, cyclistes, motocyclistes etautomobilistes se disputent le seul espace laissé libre par les travaux àsavoir : le bitume. La circulation est quasi-dangereuse, anarchique parendroits, voire pénible aux heures de pointes, aggravée par la poussière et lachaleur caniculaire. Les travaux étant réalisés en même temps sur les trottoirsde gauche comme sur ceux de droite, les usagers de la circulation sont obligésde contourner amas de gravier, tas de sable, piles de carrelage, réservoirsd'eau, madriers, brouettes etc. Bref, un véritable branle-bas de combatgénéralisé et insolite. On peut déplorer que ces travaux, qui, quand ils sontsignalés le sont très sommairement, ce qui les rend périlleux surtout pour lacirculation de nuit. Cependant, il est néanmoins nécessaire d'ajouter une précision detaille : les gens ne se plaignent que rarement des désagréments que leurcausent de telles activités, dès lors qu'ils savent qu'ils auront des trottoirssalubres à la clé. Qui, en effet, irait crier «que la mariée est trop belle ?». Peut être quelques dames ou demoiselles qui perdent de temps àautre un talon de leur chaussure mais qui tiennent obstinément (par étourderiesommes-nous tentés de dire), à porter des talons aiguilles dans un espace aussichahuté. Néanmoins, les incidents de ce genre peuvent prendre des dimensionsplus dramatiques. Ainsi, il est rapporté qu'une dame s'est cassée dernièrementun bras, lors d'une chute sur un lieu public où l'on refaisait le carrelage :son talon s'étant malencontreusement enfoncé dans un vide entre deux carreaux.Aussi, pour éviter ce genre d'incidents fâcheux (qui peuvent être graves, voiremortels), des rubans phosphorescents et barrières de protection devraientlimiter de façon rigoureuse les aires de travaux (les matériaux et matérielsutilisés étant confinés dans les aires ainsi délimitées). UN LIFTING AMBULATOIRE QUI LAISSE PERPLEXELe toilettage de la ville semble tenir àcoeur à l'actuel wali de Béchar. Et il en était que grand temps car cette villeétait l'une des plus salles du pays. Dernièrement, ce haut fonctionnaire del'Etat a donné d'amples détails sur les programmes en cours de réalisation ouenvisagés. Ceci, lors d'une émission radiodiffusée en boucle par la radiolocale. Il est en effet rare qu'un responsable d'un aussi haut niveau de lawilaya «rend compte» directement à ses administrés de ses actions et activitésdans le détail. Il est peut-être intéressant de souligner qu'il s'agit du waliinstallé tout de suite après les émeutes de 2005, lesquelles émeutes on s'ensouvient, avaient défrayé la chronique par l'intensité de leurs violences,laissant des empreintes sociétales dont certaines ne sont pas tout à fait effacées.Il est en effet judicieux de panser les plaies non encore tout à fait ferméeset d'embaumer les cicatrices rémanentes. Des «délestages» de Sonelgaz, (unelitote pour dire «coupures» drastiques du courant électrique) avaient mis lefeu aux poudres. Ces coupures répétées en pleine canicule, avaient ému lapopulation de Béchar et provoqué un véritable «traumatisme» au sein de lapopulation directement concernée, celle de Béchar-Djédid d'où étaient partiesles premières émeutes. Actuellement les coupures de courant ne sont pas rares,mais le scénario de 2005 et sa crainte demeurent toujours dans les consciences. Pour revenir au lifting ambulatoire et ambiant en cours auchef-lieu de wilaya, il est à espérer qu'il ne s'agisse pas d'un simple cautèresur une jambe de bois et que ces actions opportunes s'inscrivent dans lapérennité. Il faut reconnaître que des améliorations sont patentes quoiqueencore fort insuffisantes. La ville est certainement moins «crado» qu'elle nel'était il y a très peu de temps. On voit moins d'immondices joncher lesespaces (supposés verts) dans certains quartiers. Malgré les travaux en cours,les ordures ménagères semblent être levées régulièrement. Des trémies à orduresà l'instar de celle de Haï Riadhi construite en dur, devraient être multipliées: il s'agit apparemment d'une «bonne trouvaille» qui reste à améliorer. Il y aaussi moins d'égouts, qui déversent leurs eaux fétides et excrémentielles surla chaussée comme auparavant et l'on peut observer l'apparition de temps à autre,de nouveaux engins mécaniques pour les besoins de la cause. Par exemple (faitnouveau) on peut tomber nez à nez avec un «camion suceur» flambant neuf, la«trompe» dans une bouche d'égout essayant de venir à bout de quelque occlusionrebelle dont souffrent couramment les vieilles conduites de la ville. Une sortede «bouche à bouche» spéciale pour égout occlusé. Des éboueurs en giletsluminescents, mieux équipés, se démènent pour maintenir les rues moins salles. Quant aux sachets plastiques, que charrie le moindre zéphyr, noirsdans un passé récent, ils sont devenus multicolores aujourd'hui mais toujoursprésents en quantité incommensurable, envahissante. Malgré la peur «médiatique»du sachet noir celui-ci n'a pas pour autant disparu de l'usage courant dans lecommerce de l'alimentation générale. Si vous faites la remarque sur le dangerqu'il représente pour la santé du citoyen à votre marchand de légumes quil'utilise d'autorité pour vous servir, il pourra vous rire au nez et c'est toutjuste si vous ne passez pour un taré congénital «de croire à de pareillessornettes». Néanmoins, pour le cas des sachets plastiques, il s'agirait commequi dirait d'un épiphénomène de portée nationale dont on ne peut tenir rigueurqu'aux seuls responsables locaux. UN OUED SOURCE DE BEAUCOUP DE MAUXL'oued de Béchar, cette césure béante etsouvent putride qui coupe la ville en deux et qui était autrefois sa source devie, son poumon générateur d'oxygène, voire sa raison d'être, est devenuaujourd'hui son cauchemar. Là où jadis coulait une onde pure, féconde, arrosantsur son passage une palmeraie prospère aux ombrages idylliques, couleaujourd'hui une eau grise, tantôt verdâtre ou sombre, nauséeuse dans tous lescas de figure. Cette eau miasmatique, charrie toutes sortes de détritus et dedéchets ménagers, et ce, malgré des efforts notoires de ces dernières années,pour détourner les déversements d'égouts dans ce cours d'eau. Les moustiquessont légions et des maladies graves liées au développement de cet insecte,telle la leishmaniose, ont fait leur apparition. Lerécent gabionnage en banquettes des berges de cet oued leur donne un aspectmoins hostile, alors qu'il n'y a pas longtemps, elles relevaient presque dudomaine de la déshérence. C'était une décharge publique à ciel ouvert, où toutun chacun et en particulier les riverains, pouvaient déverser n'importe quoi,comptant sur les crues de l'oued pour «nettoyer» ou pour emmener au loin lesdéchets dont ils se sont débarrassés sans vergogne et sans autre forme de procès.Cet espace fut et est encore, un no man's où marginaux et autres «rebuts» de lasociété se réfugient pour une paix bien précaire. Dans un passé qui n'est passi lointain, ces endroits aujourd'hui poussiéreux et salles, étaient recouvertsde jardins «heureux» pourrait-on dire. Ils constituaient des lieux devillégiature. Les propriétaires des jardins pouvaient y passer des journéesentières avec femmes et enfants. Aux voisinages, on pouvait y pique-niquer. Ons'y baignait et même qu'on s'y promenait en barque (cf. «Béchar entre maux etmalaises» par Abdallah AZIZI, le Q.O. des 5, 7 et 8 mai 2005).DES DIGUES A LA MANIERE DES CASTORS NORD-AMERICAINS Pourquoi serait-il si difficile deréaménager ces berges en espaces verts de nouveau ? Faut-il croire que les«anciens» avaient plus d'imagination que nos «hydrauliciens» d'aujourd'hui ?Lesquels en auraient moins que les castors nord-américains ? En effet,auparavant les jardins étaient arrosés par un système d'irrigation très simplequi consistait à ériger en amont de chaque groupe de jardins, des digues quiretenaient l'eau. A partir de ces bassins ainsi constitués artificiellement,l'arrosage des jardins en aval se faisait par un réseau de rigoles où l'eaucoulait par gravitation sur les deux rives de l'oued. Il n'y avait ni pompe nirien. En plus, les jardins bénéficiaient du limon charrié par les cruescycliques qui enrichissaient ainsi la terre cultivée de façon perpétuelle. Ilest vrai que lors des grandes crues ces digues en terre étaient emportéespartiellement ou entièrement selon la puissance de la crue. Mais elles étaientaussitôt reconstruites. Pourtant, avec les moyens modernes, ne peut-on pas réaliserdes digues et des retenues d'eau beaucoup plus efficientes, mieux élaborées etdonc plus rentables ? Redonner vie à une palmeraie qui inspira au début dusiècle dernier à Mohamed Ould Cheikh, le premier roman algérien d'expressionfrancophone : «Miryem dans les palmes». Et n'est-ce pas cette félicité oasiennequi inspira aussi, à Isabelle Eberhardt son unique «chef-d'oeuvre» : «Dansl'ombre chaude de l'Islam» ? Parailleurs, ces retenues d'eau avaient des effets secondaires fort bénéfiques surl'environnement : non seulement elles engendraient un microclimat humidefavorable aux cultures et aux hommes, mais aussi permettaient la reconstitutiondes nappes phréatiques et par voie de conséquence, les niveaux des puitsenvironnants. Ainsi, elles participaient au développement des jardins nonconcernés directement par les crues de l'oued. Enfin, cet oued, au lieu d'êtreune source de problèmes, ne peut-il pas être transformé en source de richesse ?En attendant la réalisation de ce voeu pieux, notre oued continue toujours àcharrier ses eaux boueuses au loin, et à répandre inutilement ces sédimentsalluvionnaires le long de son lit. Une partie de cette eau aboutit à DaïetEttiour, un site écologique vital unique en son genre pour la région, un sitequi demande aussi à être connu et protégé par les pouvoirs publics. Nousenvisageons de faire connaître ce fameux site, sa situation géographique, safaune et sa flore, dans un article à venir afin de sensibiliser tout le mondesur la nécessité de sa protection. A suivre
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Posté Le : 13/08/2007
Posté par : sofiane
Ecrit par : Abdallah Azizi
Source : www.lequotidien-oran.com