La plaine d’Abadla était promise dans les années 1970 pour devenir une Mitidja au cœur du Sahara.
Les plus sceptiques auront eu raison: la visite du Premier ministre à Béchar n’a ouvert aucune perspective pour le sauvetage de la vallée du Guir. Pourtant, sa plaine, promise officiellement dans les années 1970 pour devenir une Mitidja au cœur du Sahara, devait faire d’Abadla un pôle régional de développement.
Les critiques notent que, pour évoquer le travail de la terre par les jeunes, Sellal s’est déplacé à la ferme Hassi El Houari, à quelques encablures de Béchar, mais pas à Abadla dont sa plaine poursuit sa lente agonie. Son aménagement, projeté du temps du Plan de Constantine, vidé pour une part de sa substance, avait été mis en œuvre.
Aujourd’hui, dans cette plaine s’étalant le long du lit de l’oued Guir entre 2 et 4 km de large et s’évasant en la partie sud de la vallée sur 8 km, le désert et la nature ont repris leurs droits sur une partie du périmètre irrigué.
Sur ses 5.400 ha initiaux, 3.000 sont en déshérence. Un projet d’aménagement et de réhabilitation de ce périmètre d’un montant de 4 milliards de DA ne fait pas l’unanimité. On n’oublie pas qu’au cours de la moitié de la décennie écoulée, plus de 800 millions de DA ont été inutilement investis à Abadla sans que personne n’ait été inquiété, d’autant que ce gâchis a aggravé celui de la plaine.
Projet contesté
Le nouveau projet a été contesté dès l’entame de l’étude de réalisation, cela aussitôt que les intentions du bureau d’étude ont été connues ou simplement supputées. Ce qui est critiqué dans la démarche est d’être marquée du sceau de l’autoritarisme, celui-là qui a toujours lesté le développement de la région. La population n’en veut plus. Les contestataires récusent un schéma d’irrigation qui a fait la preuve de sa faillite avant d’être reconduit. L’on avance une condition sine qua non avant toute étude: «Il faut d’abord régler la question de la disponibilité de la ressource hydrique puisque, par trois fois, la plaine a été privée d’eau en raison de l’aléa climatique d’une part, et d’autre part, du fait que la vocation du barrage de Djorf Torba a été détournée au profit de l’AEP.
Ce même barrage est actuellement envasé au point qu’il ne peut recueillir que la moitié des 360 millions de m3 de sa capacité de rétention. Il devient donc indispensable d’ériger un autre barrage en aval de Djorf Torba pour capter les eaux qui en débordent lors des crues.
Il existe un site à 16 km en amont de la plaine d’Abadla et à quelque 50 km de Djorf Torba, au lieudit Zeqiqat. Les experts l’ont considéré apte pour un tel projet. En outre, il y a la nécessité de réaliser un canal bétonné qui amène l’eau au barrage de retenue entre Djorf Torba ou le futur Zeqiqat. D’abord, cela diminuerait les pertes d’eau par infiltration mais encore et surtout empêcherait la salinisation des lâchers d’eau au passage de Dalaâ el malha (zone de roche saline)».
Une fois que la disponibilité de l’eau est garantie, la question de sa distribution doit être appréhendée au regard des réalités du terrain: «Le système d’irrigation tel que conçu répond au besoin d’une agriculture intensive, ce qui suppose de grandes superficies».
D’ailleurs, deux zones avaient été délimitées pour cela, l’une de 4.146 ha en rive ouest du lit du Guir et l’autre de 1.676 ha située en rive Est. Chacune est alimentée par un canal magistral alors que 19 canaux secondaires desservent 133 quartiers.
Ce schéma de distribution, s’il est réhabilité, sera inopérant maintenant que la répartition de la terre est en individuel puisqu’on est passé depuis 1987 des grands domaines aux EAI et EAC au point d’ailleurs que ces dernières ne sont collectives que sur papier. Elles ont été réparties en plusieurs parcelles entre les attributaires.
«C’est ce qui explique les actes de vandalisme sur le système d’irrigation, chacun voulant coûte que coûte sa part d’eau», indique un ingénieur.
Quant à Baba Belkacem, un agriculteur, il estime qu’il y a nécessité de réaliser la distribution non à travers des canaux à l’air libre mais sous pression, exactement comme pour l’AEP, par le biais d’un système de tuyauterie: «Les pertes seront limitées, pas d’ensablement et pas de roseaux et autres herbes bouchant les canaux».
Quant au problème du drainage, un ingénieur indique qu’il existe des solutions palliatives moins onéreuses que le système des drains: «Bien entendu, il faudra que l’on rapporte à Abadla des engins lourds qui puissent creuser des sillons à 1 m de profondeur. Ces machines peuvent réaliser un sous-solage qui permet le lessivage du sel en profondeur, l’opération devant obligatoirement se répéter tous les 3 ans».
Enfin, «si l’on veut réellement sauver la plaine, il faut cesser de faire de la politique au rabais. Il faut que les listes des bénéficiaires soient assainies. La plupart ont abandonné la terre. Certains ne vivent plus à Abadla ni dans la région. Pis, la majorité des attributaires sont des personnes âgées, même très âgées et incapables de travailler la terre. Certains sont même décédés.
A cela s’ajoute le fait que la plupart des bénéficiaires absentéistes ont une activité principale (commerçant, entrepreneur, fonctionnaire, etc) et pour lesquels la terre est une affaire secondaire.
Il se trouve que lorsqu’il est question de la plaine, ils s’imposent en interlocuteurs incontournables des autorités, imposant les mauvaises solutions. Les autorités, elles, refusent de passer à l’assainissement sous prétexte d’éviter des jacqueries comme cela s’est vu à Abadla. C’est vous dire combien demeure problématique le sauvetage de la plaine.»
Mohamed Kali
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Posté Le : 27/03/2013
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Photographié par : Photo: © Kali ; texte: Mohamed Kali
Source : El Watan.com du mercredi 27 mars 2013