Algérie

Beaucoup de frayeur, une nuit à la belle étoile



Les Oranais garderont pour longtemps en mémoire cette nuit du mercredi 9 janvier 2008. A 23 h 24 minutes, le temps s'arrêta brusquement de tourner. Le vacillement des argenteries et autres lustres fixés aux plafonds des maisons à une cadence allant crescendo ne trompe pas. C'est bel et bien un tremblement de terre. Durant plusieurs secondes, la terre a violemment bougé. Une éternité pour les habitants d'une wilaya sérieusement menacée par son vieux bâti, particulièrement à Oran-ville où l'on dénombre, selon les derniers chiffres officiels, pas moins de 2.000 immeubles menaçant ruine. En dépit de la force du séisme et de la proximité de son épicentre des principaux centres urbains de la wilaya, aucun dégât matériel ou humain grave n'a été enregistré. Si le tremblement n'a pas fait de victime, la peur et la panique quasi-générale qui s'en sont suivis parmi la population faisaient craindre le pire. Au moment où le tremblement de terre a frappé, beaucoup de familles étaient devant leurs postes de télévision. Les amoureux de la balle ronde avaient les yeux rivés sur une affiche de la ligua espagnole, FC Barcelone-FC Séville. D'autres avaient en revanche préféré prendre avantage de ce week-end prolongé pour sortir en groupe. Un moment de détente vite interrompu. Hommes, femmes et enfants de différents quartiers et localités d'Oran investiront, tout de suite après la première secousse, les places publiques et autres espaces verts de la ville, par peur des répliques qui devaient suivre. Au niveau des cités à forte concentration, notamment les cités AADL, cité Perret et cité Mafal, entre autres, on pouvait assister à des scènes tout à fait inédites. Des familles entières, souvent avec des enfants en bas âge, avaient juste eu le temps d'emporter une couverture pour se protéger du froid. La ville s'est brusquement réveillée. Tous les gens était collés à leur téléphone portable, histoire de s'échanger des nouvelles sur l'ampleur réelle de la catastrophe. Ce qui a fait que le réseau a vite été saturé. A ce moment précis, tout le monde imaginait le pire, ce qui a donné lieu aux rumeurs les plus invraisemblables. On pouvait également voir des groupes entiers de personnes marchant en file indienne. Beaucoup de familles ont en effet préféré passer cette nuit à haut risque chez des amis ou des membres de la famille aux habitations plus «sûres». C'est moins risqué, estime-t-on, que de rester dans un immeuble de 16 étages. D'autres sillonneront en voiture, la nuit durant, les rues de la ville, le temps de s'assurer qu'il n'y aura pas d'autres secousses. Les patrouilles de police et de la protection civile continueront inlassablement de faire des rondes dans les différents quartiers de la ville, particulièrement ceux composés essentiellement de vieux bâti, tels Sidi El-Houari, St Pierre, St Antoine, El-Hamri, entre autres. Les maires des 26 communes de la wilaya et autres chefs de daïra seront également mobilisés tout au long de la nuit pour s'enquérir de la situation réelle de la population. Dès 1 heure du matin, les responsables locaux lanceront, via les ondes de la chaîne de radio locale, des appels au calme à la population. Ils inviteront les familles à rejoindre leur domicile en les assurant que le danger était passé. Certains, sceptiques, ne rejoindront leur domicile qu'au petit matin. Grosse frayeur également à Boufatis et ses environs, où des familles entières ont dû passer la nuit à la belle étoile, craignant d'autres répliques du séisme qui venait juste de les arracher d'un sommeil à peine entamé. Au milieu de la nuit, juste après les 11 interminables secondes qu'a duré le tremblement de terre (d'autres parlent de 32 secondes), par réflexe collectif, toutes les familles ont quitté dans la panique et dans la précipitation leurs demeures. Commencent ensuite les appels téléphoniques pour s'enquérir des uns et des autres, avant d'écouter à travers Radio Oran les dernières nouvelles qui n'annoncent rien de grave, sinon la panique générale qui s'est emparée des Oranais. Tout le monde, aux aguets, passe la nuit dehors à discuter autour d'une secousse jamais ressentie auparavant. Dès le lendemain matin, la mairie de Boufatis est le lieu de convergence de tous: citoyens venant solliciter aide et conseils, le chef de daïra de Oued Tlélat en président de la cellule de crise installée dans la foulée, agents de l'OPGI, de la DLEP, de la DUCH et du CTC dépêchés d'Oran pour évaluer de visu l'ampleur des dégâts. Un homme habitant Slatna affirme avoir perdu dix brebis écrasées par la toiture d'un vieux hangar. Mais personne ne l'écoute. Des citoyens, chacun de son côté, veulent montrer les fissures qui se sont dessinées sur leurs bâtisses. Le maire explique que tout est prévu pour héberger provisoirement ceux qui, après avis des services concernés, ne pourront plus retourner dans leurs demeures. L'appréhension manifestée par de nombreux citoyens est celle de voir une autre secousse beaucoup plus intense venir ébranler les bâtisses déjà touchées. Jeudi, les élèves de certains établissements scolaires ont eu droit à un cours sur le séisme et le comportement à adopter pour réduire les risques. Les instituteurs ont expliqué le phénomène des secousses telluriques et donné des conseils aux enfants afin de les appliquer en cas de tremblement de terre. Ce cours a attiré l'attention des élèves qui, dès leur sortie de l'école, ont commencé à répéter les recommandations des instituteurs. Ibtissem et ses camarades ont revu le cours sur leur chemin de la maison. « Nous avons appris ce qu'il faut faire, comment éviter les danger et les gestes à faire pour nous mettre en sécurité et éviter toute panique ou affolement». Sortir dehors, munis d'une valise de premiers secours si possible, se mettre dans les coins, près des piliers ou sous une table dès les premières secousses sont les premiers conseils donnés à ces enfants pour se protéger contre les effondrements, fermer tous les robinets de gaz et d'eau, arrêter le compteur électrique et s'assurer de la présence de tous les membres de la famille en cas d'évacuation des lieux. Ce qu'il ne faut pas faire, dira Ibtissem, «c'est de rester près des immeubles ou des fils électriques, rouler en voiture, se mettre près des étagères ou allumer des bougies ou des allumettes. «Tous ces gestes, nous a expliqué l'institutrice, peuvent conduire à des catastrophes en cas de séisme», dira-t-elle. Dernière recommandation: apprendre les premiers secours et apprendre à tous les membres de la famille les gestes qui sauvent.


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