Algérie

Bataille rangée autour de la certification halal



Le sujet qui fournit à  souhait un fonds de commerce électoraliste en Hexagone, en stigmatisant les populations musulmanes, porte en son sein des enjeux économiques certains. Car, faut-il le dire, dans un contexte où la filière viande est en crise en France, la filière halal est le principal relais de croissance et c'est peu de le dire. Le cabinet spécialisé en marketing ethnique Solis parle d'un marché de 5,5 milliards d'euros entre la boucherie, la restauration et la grande distribution. Un marché qui bénéficie également d'un fort potentiel de croissance avec un moyenne annuelle de 10%. Aussi et selon une étude Ifop datant de décembre 2009, un Français musulman consomme deux fois plus de viande que les autres, et un consommateur musulman dépense 30% de son budget dans l'alimentaire, contre 14% en moyenne pour le reste de la population.  Le marché constitue, certes, un enjeu de taille. Or, tout le débat qui s'anime aujourd'hui semble tourner autour de la certification halal, laquelle attire à  elle seule des vautours de tout acabit. Un décret datant du 29 décembre 2011, entré en vigueur la semaine dernière afin de réguler l'abattage rituel, a fait d'ailleurs vivement réagir. Le texte qui concerne l'abattage de 26% des animaux abattus en France évoque la formation du sacrificateur, l'obligation pour les abattoirs de se déclarer auprès des préfectures ainsi que l'étiquetage systématique pour les viandes halal. Destiné à  couper l'herbe sous le pied des frontistes et leurs arguments, le texte fait toutefois jaser certains organismes certificateurs qui évoquent la pression mise sur les abattoirs pratiquant l'abattage rituel, afin de les pousser à  assommer les animaux. Autre annonce qui fait polémique, celle du recteur de la Mosquée de Paris concernant la mise en place d'une commission théologique composée de savants et théologiens venus d'Arabie, d'Indonésie, de Malaisie et d'Europe chargée de «revenir aux principes fondamentaux de l'abattage rituel pour définir ce qui est licite ou non de façon très précise», et d'examiner au passage si «la pensée religieuse de l'islam permet un certain nombre d'avancées sur l'abattage rituel». L'annonce a, un premier temps, été interprétée comme un recul des principaux responsables du culte musulman en France face aux pressions de l'UMP. Or, force est de constater qu'il n'existe aujourd'hui en Europe aucune norme d'abattage halal. Ce qui a permis l'apparition d'une soixantaine d'organismes certificateurs dont seuls 3 dépendent des mosquées de Paris, Evry et Lyon. Donc, la religiosité de ces organismes et leur respect des minima de l'abattage dans la tradition coranique ne sont pas acquis. D'autant que l'appât du gain dans la filière a justifié bien des fraudes. Des certificateurs européens s'enorgueillissent d'ailleurs de pouvoir assurer une certification pour 1500 euros. Certains estiment que, pour un coût pareil, la certification ne peut àªtre faite sérieusement. De leur côté, des responsables du Conseil français du culte musulman en France (CFCM) ont prévenu, il y a quelques mois, que parmi les organismes certificateurs, il y a à  boire et à  manger, d'autant qu'en plus du marché européen, le Moyen-Orient attise les convoitises des exportateurs français.
Désormais, de grands groupes industriels «veulent édicter leur propre norme avec des cabinets d'audit, sans s'appuyer sur les religieux», affirme Kamel Kabtane, membre du CFCM et recteur de la mosquée de Lyon.


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